Attic - Sanctimonious
Chronique
Attic Sanctimonious
Planquez les gosses! Parce que je vais parler d'érection, de jouissance, d'orgasme et autres plaisirs intenses bientôt interdits aux moins de treize ans. Et pourtant ce n'était pas gagné pour Attic. Ce que j'avais entendu du premier album des Allemands, The Invocation, avait certes éveillé mon intérêt mais le rapprochement flagrant, que dis-je, le plagiat total de King Diamond, surtout au niveau vocal, m'avait rendu mal à l'aise. Je ne recherche pas l'originalité, je sais apprécier des hommages mais là, ça allait trop loin pour que je puisse savourer sans arrière-pensée. Ce pourquoi je n'avais pas approfondi l'écoute de The Invocation. Cinq ans après, Attic dévoile en ligne une nouvelle composition, "Sanctimonious", morceau-titre de son prochain disque à venir sur Ván Records. J'écoute, par curiosité, pour voir si le groupe a franchi un cap en se détachant de son influence. Grosse claque dans la tronche. Deuxième extrait. Re-baffe. Écoute de l'album complet. Kiki tout dur collé au bide. On ne va plus pouvoir se mentir: Attic est grand.
Pas qu'il se soit affranchi de l'emprise de King Diamond toutefois. Car Sanctimonious ne fait pas que mâcher danois. Il le mord à pleines dents. Par sa musique, le heavy metal sombre, mélodique et racé des Allemands y faisant allègrement référence, mais surtout au niveau du chant. Meister Cagliostro mime en effet à la perfection la voix de Kim Bendix Petersen. Les montées ultra aiguës d'eunuque, la versatilité théatrâle du registre du plus haut perché au guttural diabolique, cette façon possédée de conter une histoire en en vivant chaque parole pour plonger l'auditeur dans cette ambiance gothico-horrifico-satanique kitsch, tout y est. C'en est bluffant! C'est d'ailleurs ça qui m'avait freiné sur le premier opus. Ce qui change ici? Rien. Mais force est de constater que le frontman, lui aussi grimé, fait montre d'un talent insolent. Parce que même si l'on peut parler de plagiat (j'y vois désormais plutôt un hommage vibrant), encore faut-il avoir la capacité de marcher sur les plates-bandes de cette légende dont le registre s'avère un des plus complexes de toute la scène heavy metal. Il faut être un sacré chanteur pour réussir ce type de performance. Et quelle performance, foutre Satan! Ses lignes de chant sont absolument fantastiques. Les mélodies vocales accrochent l'oreille dès la première écoute, que ce soit sur les couplets dynamiques qui portent tous les titres avec une conviction contagieuse ou les refrains mémorables qui vous hantent pendant des jours comme ceux de "Sanctimonious", "A Serpent In The Pulpit", "Penalized", "Die Engelmacherin", "The Hound Of Heaven", "On Choir Stalls", "Dark Hosanna", "Born From Sin", "There Is No God" et "Sinless", mon préféré que je chante toujours à gorge déployée en serrant le poing et en faisant des grimaces. Oui en fait je viens de citer toute la tracklist, pour vous dire à quel point ce Sanctimonious se révèle richement pourvu en refrains magiques qui vous transportent. Le maître de cérémonie se révèle aussi à son avantage lors de la séance de spoken words sur l'interlude glaçante "Scrupulosity". L'Allemand délivre ainsi une performance à couper le souffle face à laquelle on ne peut que s'incliner. Heureusement d'ailleurs car son organe se trouve très en avant dans le mix, Attic ayant bien compris qu'ils tenaient là un sacré phénomène!
Ce qui n'empêche toutefois pas ses comparses de se faire entendre et de briller eux aussi. Si le bassiste Christoph Erdmann fait quelques apparitions de-ci de-là et que le nouveau batteur J.P. prouve son savoir-faire en réalisant une démonstration musclée simple et efficace rehaussée de certaines séquences plus ardues, ce sont bien les guitaristes Tim "Katte" Katteluhn et Robert Piel qui impressionnent le plus aux côtés de leur chanteur surdoué. Leurs riffs, toujours mélodiques, font tout le temps mouche, sur du mid-tempo pêchu ou sur des rythmiques plus speed comme aux démarrages de "Penalized" et "Sinless", "Born From Sin" qui thrashouille sévère et "There Is No God" et son accélération bourrine avant la première minute. Le duo épice même son jeu de quelques influences black metal encore plus extrêmes fort bienvenues à l'ouverture de "Born From Sin" et surtout sur "Sanctimonious" et son début jouissif à base de blast-beats (oui, dans un album de heavy!) sur un tremolo magnifique presque triste. On retrouvera encore quelques traces de blastouille à la fin du dernier titre "There Is No God". Rajoutons, pour revenir aux guitares, quelques notes acoustiques du plus bel effet (miam ce passage à 4'50 avec la basse et le chant faussement doucereux sur "A Serpent In The Pulpit", la poignante "Dark Hosanna"). Ce qui me fout encore plus sur le cul toutefois, ce sont les solos et autres leads, sublimées par un son limpide. Il y en a partout, une véritable orgie! Ça gazouille tout du long avec une qualité qui laisse pantois. Un feeling mélodique hors du commum sans trop en faire mais qui vise juste grâce à de superbes mélodies simples et mémorables (intros de "A Serpent In The Pulpit", "The Hound Of Heaven" et "On Choir Stalls", "Sinless" à 0'35, "Die Engelmacherin" et son final grandiose qui colle des frissons, les solos de "Sanctimonious" à 4'13, "Die Engelmacherin" à 3'45, "Dark Hosanna" à 1'30 et 4'03, "Born From Sin" à 1'35 et "There Is No God" à 3'45 et 5'07 où l'on touche au divin). On finira sur l'ambiance générale sombre et gothique délectable dans laquelle nous plongent les musiciens de par leurs mélodies dark et hantées et ces fameuses lignes de chant envoûtantes racontant les mésaventures de trois nonnes (Sœur Alice, Sœur Joan et a prieure Claire) persécutées par leur abbesse Margaret. La magnifique intro "Iudicium Dei" faite d'orgues religieux, rejoints par les douces vocalises haut perchées de Meister Cagliostro, ne pouvait nous souhaiter la "bienvenue" de meilleure façon. L'interlude "Scrupulosity" utilise lui aussi l'orgue avec brio, sublimé par les mots du frontman qui se mue en narrateur théâtral.
Bref, c'est génial. Il fallait de toute façon bien ça pour s'enquiller un album de plus d'une heure! J'avoue d'habitude ne pas apprécier ces durées excessives qui réservent toujours des longueurs. Mais là ça passe tout seul. Il est d'ailleurs impressionnant de voir Attic conserver un tel niveau de composition tout du long des soixante-quatre minutes qui en paraissent trente. Il n'y a ici absolument rien à jeter. Pas un morceau moins captivant, pas un passage à l'inspiration moindre, pas une ligne de chant plus bancale, pas un riff banal, pas un solo bâclé. Même la pochette est brillante. C'est tout simplement grandiose.
Ouais, je suis amoureux. Gros, gros coup de cœur. Plus j'écoute ce Sanctimonious, plus je l'adore et plus j'ai envie de l'écouter. Il était grand temps que je le chronique avant de finir par lui coller un 10/10 tant on tutoie la perfection. Alors bien sûr, tout le monde n'aimera pas, même parmis les fans de heavy. Si vous faîtes une allergie aux chants ultra aigus, vous pouvez passer votre chemin. Si la ressemblance vocale trop frappante avec King Diamond vous dérange, ce que je peux comprendre puisque c'était mon cas au début, vous n'utiliserez sans doute pas autant de superlatifs que moi pour décrire le deuxième opus du combo d'outre-Rhin. Certains pourront aussi trouver risible ce satanisme kitsch mais ça fait partie de son charme. Pour moi, ce Sanctimonious est déjà culte. J'avoue même y prendre davantage mon pied qu'avec n'importe quel album de King Diamond que j'aime aussi beaucoup mais auquel j'ai toujours préféré le plus old-school Mercyful Fate. Ça en fera bondir certain de préférer la copie à l'original mais c'est pourtant le cas. En ce qui me concerne, l'élève a dépassé le maître. Le heavy metal d'Attic dégage une classe folle. La maîtrise est impressionnante, le feeling mélodique incroyable, le riffing efficace, le chant divin, l'ambiance prenante, la production cristalline. Certes moins riche, complexe et fouillé que King Diamond car plus simple, direct et mémorisable, Attic démontre néanmoins une technique et un talent d'écriture impeccables. Le quintette pimente en plus sa musique d'influences plus modernes voire extrêmes avec quelques accélérations pas piquées des hannetons (il y a même deux-trois blasts pour mon plus grand plaisir!) ainsi que certains tremolos à la saveur black metal. Comme quoi même bourré de belles mélodies et de montées aigues, Sanctimonious n'est pas si gentillet et propret. Sanctimonious se place ainsi, avec Motherless de Trial, comme le meilleur album heavy metal de 2017 et de ces dernières années. Une œuvre somptueuse et magistrale qui m'émeut comme rarement. All hail the new king!
| Keyser 24 Novembre 2017 - 2651 lectures |
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