Ceremony of Silence - Oútis
Chronique
Ceremony of Silence Oútis
J'avoue mon ignorance sans aucune honte : Jusqu'à récemment, j'étais absolument infoutu de vous citer un groupe slovaque - Faites les malins, mais je suis prêt à mettre dix balles que c'est également le cas pour la moitié d'entre vous. Vous comprendrez aisément pourquoi Ceremony of Silence s'est imposé, chez moi, comme une véritable surprise : le Metal extrême slovaque existe, et oui, il peut également truster sans pression aucune les charts de fin d'année. Ça fait beaucoup d'un coup ? C'est que vous n'avez pas encore écouté "Oútis", et c'est pour vous convaincre de le faire au plus vite que j'ai pris la plume.
Avant toute chose : Ceremony of Silence est un duo, composé de Svjatogor aux fûts et Vilozof, responsable des cordes et du chant. Petite entité, donc, qui signe son véritable acte de naissance avec cet album. Si la somptueuse pochette, concoctée par le batteur, me faisait craindre un énième projet Post-BM chiant signé chez Les Acteurs de l'Ombre, c'était sans compter sur l'étiquette Black/Death que le groupe défend bec et ongles, avec autant de passion que d'intensité. Willowtip a eu du flair, en produisant cette toute première livraison des slovaques : le résultat est à la hauteur de son écurie. Et ce n'est pas peu dire ! Brûler les étapes en sortant directement un full-length était un pari couillu, que Ceremony of Silence remporte haut-la-main.
Parce que le duo n'est pas une formation de Black/Death classique, qui se contente de blaster pépouze en hurlant. Certes, il utilise les codes du meilleur des deux univers, mais ce qui le place au-dessus de la mêlée, c'est bel et bien son inventivité et son sens de la composition. En quelques mots, "Oútis" est à l'image de sa pochette. Les riffs sont torrentiels, la batterie fracasse, et l'atmosphère est aussi confuse qu'un quartier-maître perdu en pleine tempête, gardant la barre mais pas sans difficulté.
Magnifié par une production aux oignons, lisible, précise sans être chirurgicale, "Oútis" dévoile un univers aussi inquiétant que séduisant. Effectivement, les influences sont encore palpables (Ulcerate en tête), mais Ceremony of Silence parvient toujours à les dissimuler par le talent de ses deux musiciens. Svjatogor est un monstre d'endurance et de feeling derrière ses fûts, en équilibre permanent sur la frontière séparant la technique et la démonstration de force, dispensant blasts destructeurs et belles textures au moyen de cymbales judicieusement utilisées. Vilozof n'est pas en reste : si son chant est l'un des points faibles d' "Oútis", car trop monocorde, le bonhomme se rattrape aux cordes. Si ça tricote énormément, la palette est large : on passe du riffing acéré ("Trance of Void" soutenu par de fantastiques cassures de rythme) au tremolo nébuleux (l'explosion finale de "Ceremony of a Thousand Stars"), avec toujours ces quelques détours presque psychédéliques qui donnent sa saveur à l'album. On sent bien que Ceremony of Silence propose un peu plus que les clichés habituels. Je craignais que l'album ne s'essouffle au fil des déshabillages, que l'habitude s'installe mais force est de constater que chaque écoute est une redécouverte. Parce qu' "Oútis" sait toujours prendre son auditoire par surprise, que ce soit au moyen d'un break jazzy (respiration bienvenue à 1:00 sur "Black Sea of Drought"), de quelques riffs dissonants sans être putassiers ("Arising of No Man"), ou tout simplement en changeant constamment de structure dans un seul morceau de 5 minutes (l'explosion "Trance of Void").
Si je reproche au duo quelques passages à vide alourdissant l'ensemble (le titre "Upon the Shores of Death" qui casse un peu la dynamique du disque, notamment), et surtout les abrutissantes parties vocales de Vilozof, je ne peux que m'incliner face à la qualité de cette toute première sortie, qui m'aura cueilli complètement par surprise. Fan de Black ou de Death, qu'importe, vous trouverez certainement de quoi manger parmi les sept titres de cet opus - Et vous reviendrez sûrement à la charge, plateau vide entre les mains. Séduisant par le sens de la composition, la technique et le feeling des deux slovaques, "Oútis", à force de tourner en repeat, réussit le tour de force de s'imposer en tant que découverte, surprise, et grand album de cette année. Chapeau, messieurs.
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