Caronte - Wolves Of Thelema
Chronique
Caronte Wolves Of Thelema
Deux ans après le sympathique mais pantouflard
« Yoni » revoilà le combo italien aux affaires, toujours aussi motivé et qui se lance dans un nouveau défi musical où sont venus se greffer un second guitariste et un claviériste de session. Car évoluant maintenant sous la forme d’un quintet celui-ci en a terminé de sa trilogie consacrée aux rites chamaniques les plus divers, pour offrir désormais une autre orientation plus planante et cosmique mais toujours occulte à souhait. En effet on va voir apparaître au grand jour des influences rétro agréables et délicieuses, qui vont faire de cette quatrième livraison la meilleure jamais sortie par les transalpins, cela notamment grâce à l’apport des nouveaux arrivants qui vont apporter un second souffle au groupe, celui-ci réussissant enfin à produire un disque cohérent de bout en bout. Ce dernier à la fois puissant et intéressant porté par un son typique des années 60-70 va se révéler être particulièrement massif et lourd via l’apport de la deuxième guitare, mais aussi surtout grâce à l’invité qui va se révéler primordial dans la réussite de ce projet. Car ces nappes discrètes et jamais proéminentes vont renforcer la noirceur ambiante, et outre un clavier classique il ne va pas hésiter à ressortir le bon vieil orgue Hammond si prisé des formations de l’époque fans des substances hallucinogènes. Il n’y aura donc rien de surprenant à ce qu’on y entende des harmonies que l’on croirait sorties des DOORS, PROCOL HARUM ou encore DEEP PURPLE, qui vont se greffer avec justesse avec le reste de la musique de CARONTE.
D’ailleurs dès les premières notes de « Wolves Of Thelema » on va s’apercevoir du bond en avant franchit par l’entité (et ce même si ce premier morceau reste plus dans la lignée des précédentes galettes), car la brume et l’orgue vont envelopper l’ensemble de façon inquiétante avant que la suite ne soit plus classique entre passages lourds, riffs glaciaux et batterie tout en cassures et roulements. Pourtant alors qu’on pourrait croire que les frères Bones restent dans leurs travers anciens on s’aperçoit que malgré son classicisme cette compo se montre des plus prenante et intéressante, ceci grâce à un certain dynamisme que l’on va retrouver tout du long par la suite et qui évite ainsi les pertes d’intérêt que l’on retrouvait par le passé chez ses géniteurs. Après ces débuts prometteurs « 333 » va confirmer que l’on est en présence d’un opus de qualité de par ses notes douces et froides et surtout une rythmique active qui ne faiblit à aucun moment, donnant de fait à la noirceur présente une certaine luminosité pleine d’espoir. Cependant l’obscurité reste néanmoins le crédo majeur de la bande et cela va être confirmé sur le très bon « Hypnopyre » où des parties tribales apparaissent de façon flagrante, comme pour donner à la messe noire des airs de transe ainsi qu’un argumentaire au grand prêtre, d’autant plus avec ce riffing que n’aurait pas renié BLACK SABBATH. En effet on sent que ce titre a été inspiré par Ozzy Osbourne et ses acolytes, à l’instar du solo coupant et déchirant qui maintient l’auditeur dans un état comateux.
C’est à partir de ce moment-là que le voyage dans le passé va s’accélérer et aller crescendo, car avec « Queen Of The Sabbath » on est en présence d’influences Hard-Rock discrètes mais importantes, et surtout de notes stylées clavecin horrifiques qui renforcent ce sentiment oppressant tout en mettant paradoxalement en avant une facette musicale plus directe. Après toute cette noirceur et ces trous noirs une petite pause lumineuse est la bienvenue, et elle intervient via « Amalantrah Sonata » un interlude éthéré et nuageux où on a la sensation que le défunt quitte son enveloppe charnelle pour se diriger vers l’au-delà (porté des arpèges délicats et une frappe sur les toms très légère, et où la basse chaude est mise en avant), mais cependant il ne va pas trouver le sommeil tout de suite. En effet avec « Quantum Ecclesia » c’est un retour à l’occultisme car le chant se fait particulièrement religieux et les instruments se mettent au diapason en proposant quelquechose de très lent et lourd, où la sensation d’écrasement n’est jamais très loin mais où l’accroche reste incontestable tant les ambiances et les arrangements d’une grande sobriété permettent de garder un intérêt constant. « Black Hole Dawn » qui s’enchaîne dans la foulée conserve cette même trame d’écriture tout en misant davantage sur le vénérable instrument chéri de Ray Manzarek et John Lord tant on se retrouve dans une ambiance riche en fumées diverses et encens de toutes sortes, à l’instar de « Starway To The Cosmic Fire ». Avec un nom pareil on se doute dans quoi on met les pieds et là on est présence de rites diaboliques qui rendent hommage au Malin et à ses légions, tant le piano est encore de sortie et porté par une lenteur étouffante et suffocante, d’où émerge un solo mélodieux comme pour signifier que la cérémonie arrive à son terme (et qu’il est l’heure pour le décédé de partir rejoindre le royaume des cieux ou des enfers). Mettant la vitesse au rebut elle est compensée par ce sentiment de bien-être bizarre malgré la présence de maléfices et de spectres les plus étranges, qui concluent ainsi une galette réussie en tous points.
Si l’on n’attendait rien de cette sortie force est de reconnaître qu’il s’agit d’une vraie surprise, dont l’exploration va prendre du temps pour en percevoir toutes les subtilités, tant sous son apparence accessible se cache un vrai travail sur les harmonies et les effets divers. Si elle conserve une trame avec ce qui a été fait auparavant ce nouveau volet des aventures des parmesans montre une évolution plus personnelle, bénéfique au plus haut point qui lui fait franchir un cap dans sa carrière. Et même s’il y’a fort à parier que ce long-format passera tout aussi inaperçu que ses prédécesseurs il faut quand même souligner la qualité de la copie rendu par ses créateurs qui s’obstinent à faire vivre une musique pas si évidente que ça à concevoir comme à écouter. Ayant toujours la passion et l’abnégation nécessaire, ceux-ci méritent les encouragements les plus nourris tant leur obstination a fini par payer malgré les déconvenues de toutes sortes, comme quoi il ne faut jamais rien lâcher quel que soit le domaine concerné.
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