Celestial Season - The Secret Teachings
Chronique
Celestial Season The Secret Teachings
L’avantage d’être un vieux con, c’est d’avoir pu découvrir, en leur temps, les groupes / albums / performances devenus cultes avec le temps. C’est tout à fait le cas de Celestial Season, découvert avec Forever Scarlet Passion en 1993, année post-bac, acheté en direct chez le tout aussi culte Adipocere Records, à une époque où le livret papier me faisait tant rêver, une époque sans portable, sans internet… sans rien d’autre que la passion et l’échange épistolaire.
Celestial Season est en effet un vieux de la vieille. Pour toi, au fond de la classe, qui vient d’arriver en cours de metal, le combo hollandais existe depuis 1991 et, sauf une traversée du désert de quasiment 20 ans, a été relativement actif, pondant trois albums marquants en l’espace d’à peine 4 ans : le très célèbre Forever Scarlet Passion donc, Solar Lovers en 1995 et Orange en 1997. La suite, Chrome et Lunchbox Dialogues m’ayant laissé plus dubitatif. Laissé pour mort en 1999, voici donc que le combo se réveille en 2020 et revient taquiner nos douces oreilles avec ce The Secret Teachings qui sort de nulle part.
J’avoue l’ampleur de ma surprise à la vue de ce full-length revenu d’entre les morts, tout autant qu’une curiosité devenue intenable au moment de son écoute. Allions-nous replonger dans le doom/death qui avait fait sa renommée ? Etait-il possible de retrouver ce romantisme suranné qui faisait ma joie dans les 90’ ? Allions-nous poursuivre dans cette espèce de faux stoner par lequel il avait ensuite souhaité réorienter sa musique ? Mon cœur avait déjà fait son choix, restait donc à assumer et à écouter !
La durée de l’album devait déjà me mettre sur la voie : un peu plus d’une heure pour 13 titres. The Secret Teachings est donc long, même si les chansons, en elles-mêmes, restent relativement ramassées. Celestial Season amorce en effet une sorte de retour en arrière, de réorientation vers le doom/death de ses débuts. Hélas, là s’arrête la comparaison. Cet album aurait pu être merveilleux. Il n’est qu’intéressant et agréable et je vais tenter de t’expliquer pourquoi, selon moi.
The Secret Teachings of All Ages ouvre pourtant sur une mélodie sublime au violon et au piano, avec un son dont on note immédiatement la puissance et l’extrême clarté, quasi cristalline. La magie d’antan, le romantisme légèrement noyé dans un son un brin caverneux ne sera donc plus la norme. C’est l’un des premiers problèmes : ce son très puissant, très « fort » au sens premier littéral du terme, a tendance à écraser la structure, à noyer les mélodies sous un amas de plomb inapproprié. Celestial Season a toujours puisé sa force, précisément, dans un son étouffé, favorisant le désespoir et l’opacité. On en est à l’extrême opposé. Alors, il ne faut pas non plus être injuste : la voix accompagnée du violon rappelle, par instants, les meilleures heures du combo. La structure progresse lentement, tout en gracilité et en subtilité, comme les meilleurs titres de Forever Scarlet Passion. For Twisted Loveless, Salt of the Earth, A Veil of Silence (et ses beaux soli aériens) et Long Forlorn Tears, plus loin, rappellent encore l’heure de gloire du combo, son romantisme sombre exacerbé, son doom/death marchant sur un fil, entre ombre et lumière. Les mélodies y sont travaillées, aériennes même si, là encore, la puissance du son, sa clarté ont tendance à écraser les atmosphères les plus fragiles. L’omniprésence du violon et du piano apportent une touche épique et profonde tout à fait admirable.
Mais, car il y a un mais, un second problème tient, selon moi, à la volonté du combo hollandais de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier. Le cul entre deux chaises demeure une position délicate, sauf si tu as des hémorroïdes. La multiplication de titres plus courts, plus ramassés, ne permet pas au groupe de développer ses atmosphères. Du coup, sur ces titres, il s’oriente davantage vers un rock plus raw qui brise la dynamique instaurée par les morceaux les plus sensibles (They Saw It Come from the Sky par exemple). Parfois, c’est même dans le morceau même que la difficulté prend corps : The Ourobouros débute ainsi sur des accents orientaux magnifiques, très aériens avant de basculer sur des atours nettement plus sombres, raw, quasi death, qui tranchent, à mon sens, trop avec les ambiances antérieures. Le fil conducteur perd en cohérence. Le titre reste toutefois intéressant. De même, l’enchaînement Salt of the Earth, beau morceau lent de doom/death romantique avec They Saw It Come from the Sky aux accents nettement plus stoner, tranche beaucoup trop et nuit à l’ambiance globale. Idem enfin pour Lunar Child, un peu inutile, qui n’apporte pas grand-chose ni en terme d’atmosphère, ni en terme de mélodie.
Les transitions sont en revanche bien travaillées. Qu’il s’agisse de Dolores (qui permet de passer de la première partie de l’album à la seconde), de White Lotus Day ou de Beneath the Temple Mount qui en font de même de la seconde à la troisième partie et de celle-ci à la dernière partie de l’album, les mélodies à la guitare sèche sont magnifiques même si, pour Dolores, elles tombent comme un cheveu sur la soupe après The Ourobouros alors que précisément White Lotus Day développe des atmosphères identiques et aurait sans doute été mieux placé pour y faire suite. Mais de nouveau, on pourra regretter qu’après le si beau titre qu’est Long Forlorn Tears (fermes les yeux, tu replonge direct dans Forever Scarlet Passion, jusque dans la voix si typique), on doive endurer un titre relativement plat, Amor Fati, perclus de voix-off un peu dark folk / martiales sur les bords et donc, à mon sens, déconnectées de l’univers ici présenté. Les guitares dissonantes, un peu noyées dans le mix, les petits arrangements indéfinissables en arrière-plan brisent de nouveau, à mon sens, une dynamique qui pourtant prenait sans difficulté.
A noter qu’une reprise de Type O Negative clôture l’album, : Red Water tiré d’October Rust.
Ne vous y trompez pas. Je chicane parce qu’à la première écoute, l’émotion de retrouver le « véritable » Celestial Season m’a enthousiasmé. Ce n’est qu’en y revenant que certaines aspérités m’ont interpellé, notamment le manque de cohérence dans l’enchaînement des titres, dans la réflexion même sur la tracklist. Pour autant, The Secret Teachings demeure un très bel album qui vous replongera dans vos souvenirs (heureux).
| Raziel 7 Novembre 2020 - 1423 lectures |
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