Lamp Of Murmuur - Heir Of Ecliptical Romanticism
Chronique
Lamp Of Murmuur Heir Of Ecliptical Romanticism
Dans le petit microcosme du raw Black Metal, Lamp Of Murmuur est probablement l’une des formations ayant rencontré l’un des succès d’estime les plus retentissants. Il n’y a qu’à voir les prix hallucinants auxquels s’échangent ses productions sur Discogs (200 euros pour certaines) pour comprendre l’ampleur du phénomène (et les limites d’un tel business plan qui favorise évidemment de tels abus…). Originaire d’Olympia dans l’état de Washington, Lamp Of Murmuur a commencé à faire parler de lui avec la sortie en 2019 de plusieurs démos éditées pour la plupart par le label anglais Death Kvlt Productions (Abduction, Akasha, Mäleficentt, Nocturnal Departure, Revenant Marquis, Thy Dying Light, Somme...). Après plusieurs de ces mises en bouche ayant contribué à entretenir cet intérêt autour de Lamp Of Murmuur, le one-man band américain a sorti en fin d’année dernière son tout premier album.
Intitulé Heir Of Ecliptical Romanticism, ce premier longue durée d’ores et déjà sold-out et qui au passage reprend deux titres issus des démos Chasing The Path Of The Hidden Master et Melancholy Howls In Ceremonial Penitence bénéficie d’une production plutôt éloignée de ce qui nous est servi habituellement dans le genre. Si cette dernière conserve un certain caractère (ce son de guitare particulièrement incisif, cette basse très présente...) ainsi qu’une aura taillée pour le job, le résultat reste tout de même assez éloignée de ces productions volontairement cradingues et rachitiques proposées par l’essentiel de ces formations évoluant dans ce genre de Black Metal particulièrement primitif (je pense par exemple à Bašmu, Lampir, Megalith Grave, Orgy Of Carrion, Revenant Marquis et tant d’autres...). Un choix qui devrait donc faciliter la vie de certains auditeurs habitués à rester sur le bas côté à cause d’instruments et autres mélodies jugées parfaitement inaudibles.
Moins surprenant, le contenu qui s’inscrit naturellement dans la continuité des précédentes réalisations de Lamp Of Murmuur, c’est à dire un Black Metal intense et passionné mené à grands coups de séquences particulièrement soutenues mais également de passages plus modérés et atmosphériques. Une dualité que le one-man band va développer et entretenir à travers des morceaux relativement longs puisqu’à l’exception de "Gazing Towards The Hallways Of A Peaceless Mind" et "The Stars Caress Me As My Flesh Becomes One With The Eternal Night" faisant office d’interludes, on navigue ici entre cinq et dix minutes (bien tassées) par titre. Ces changements de rythmes relativement nombreux vont notamment permettre à Lamp Of Murmuur d’étoffer sa formule et ainsi tenter de conserver l’attention de l’auditeur en lui offrant autre chose que du simple matraquage dans les règles de l’art, aussi efficace et redoutable soit-il. M. va alors faire se succéder (et même parfois faire cohabiter) fulgurances Black/Thrash menées le couteau entre les dents notamment à grand renfort de riffs ultra incisifs et d’une batterie en mode tchouka-tchouka des plus entrainantes, séquences tout aussi intenses mais au développement mélodique bien plus prononcé et passages plus en retenu mettant là encore en avant le travail mélodique de Lamp Of Murmuur.
C’est en effet un autre des atouts du one-man band, ce sens de la mélodie particulièrement développé que ce soit à travers ces riffs décharnés et glaciaux ("Of Infernal Passion And Aberrations", "Bathing In Cascades Of Caustic Hypnotism", "The Scent Of Torture, Conquering All", "Chalice Of Oniric Perversions") qui par moment m’évoquent la majesté d’un certain Emperor (les premières secondes de "Of Infernal Passion And Aberrations" ou "Bathing In Cascades Of Caustic Hypnotism" à 5:11 par exemple) ou ces nappes de synthétiseur vaporeuses et oniriques - bien qu’un poil surannées - ("Of Infernal Passion And Aberrations" à 5:41, "Chalice Of Oniric Perversions" à 5:44, "Heir Of Ecliptical Romanticism") qui ont pour elles cette faculté de vous transporter ailleurs... Nous pourrions également évoquer "Gazing Towards The Hallways Of A Peaceless Mind" et "The Stars Caress Me As My Flesh Becomes One With The Eternal Night" qui à leur manière participent à ces atmosphères crépusculaires et spectrales. À noter que ce premier album se conclue sur une reprise de Dead Can Dance avec le titre "In The Wake Of Adversity". Un pari relativement osé mais plutôt réussi dans la mesure où Lamp Of Murmuur a su conserver toute la portée mélodique et mystérieuse de ce titre, notamment à travers ce chant lointain et majestueux et ce riffing particulièrement entêtant.
Après plusieurs démos, EP et autre split, Lamp Of Murmuur signe avec Heir Of Ecliptical Romanticism un premier album tout aussi réussi. Alors c’est vrai, certains morceaux ne sont pas de toute première fraîcheur et d’autres revêtent peut-être un peu moins d’intérêt (je pense à ces deux interludes heureusement suffisamment courts pour ne pas plomber la dynamique de l’ensemble) mais tout de même, il n’y a pas vraiment matière à râler ici. L’intensité, la passion et la dévotion (mention spéciale pour le chant habitée de M.) insufflées dans ces compositions ainsi que la portée de toutes ces mélodies rendent ce premier essai longue durée particulièrement réussi. Pas foncièrement très original (même si la variété des compositions lui apporte pas mal de caractère) mais rondement mené. En espérant qu’une version CD un peu moins exclusive puisse voir le jour un de ces quatre...
| AxGxB 26 Février 2021 - 1672 lectures |
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