Caged - Stricken by Continuance
Chronique
Caged Stricken by Continuance (EP)
Ça se passe comme ça chez Thrashocore : une petite news publiée dès potron-minet un matin de mars, un échange de textos avec une recommandation d'écoute entre membres de l'équipe, deux-trois posts dans le topic des écoutes de notre accueillant forum, et c'est l'emballement généralisé pour l'EP He Whose Name Was Long Forgotten de FOSSILIZATION, et je ne vais pas démentir, cet EP défonce tout ! Sauf que je ne vais pas vous en parler, héhé ! Je ne dois pas être la seule à procrastiner sur Metal Archives en ces sombres temps de solitude et de confinement, alors je me promène, je déambule, un clic en appelant des dizaines d'autres et je fais de chouettes découvertes au gré de mes pérégrinations nocturnes. La recherche sur FOSSILIZATION m'a amenée sur la page du label Transylvanian Tapes, qui elle, m'a aguichée avec le nom de CAGED. Tiens, la photo des gars est sympa, Death/Doom, ça commence bien, et ... oh ! Un EP à l'artwork sombrement séduisant, sorti dans un premier temps en cassette sur ledit label en 2020, puis le 18 mars 2021 en version CD sur Cursed Monk Records. De quoi piquer au vif ma curiosité. Quand on jauge la cuvée vingt-vingt dans son ensemble, on est en droit de se dire qu'il est fort probable qu'une petite pépite soit encore passée au travers de nos radars pourtant performants.
Je me suis donc jetée tête la première dans le caveau fétide de cet EP intitulé Stricken by Continuance et me suis laissée enfermer dedans, si je puis dire, mais avec quel plaisir ! Quatre titres desquels j'ai depuis toutes les peines du monde à m’extirper, tant j'y ai retrouvé plein de choses me titillant affectueusement les oreilles. On y retrouve pêle-mêle, parfois de manière très fugace je vous l'accorde, des accents de SPECTRAL VOICE, un riff rappelant les darons de RUNEMAGICK ou de DRUID LORD, une mélodie typée KRYPTS, une ambiance plombée à la COFFINS, la liste est loin d'être exhaustive, mais étrangement CAGED ressemble plutôt à l’enfant naturel de CRYPTIC BROOD et de PRIMITIVE MAN, dont le visage rappelle sans conteste celui d’un DRAGGED INTO SUNLIGHT qui abuserait de temps à autre du Xanax. Cependant, on ne se dit à aucun moment : Tiens, ces mecs font du [nom d’un groupe X] worship. C'est bien plus personnel et plus subtil que cela. CAGED déroule son EP en s’appuyant sur des bases solides, bien ancrées dans le Death/Doom, sans pour autant avoir fermé la porte à quelques autres influences (j'ai écrit Sludge, moi ?) permettant quelques respirations bienvenues avec l'apport d'une juste dose de samples bien incorporée et de quelques larsens tranchants bien placés. Mais la lourdeur demeure écrasante et les relents putrides tenaces.
Les compositions de ces quatre longs titres allant de 5 à plus de 9 minutes déjouent tous les pièges de la longueur et de l'ennui : des ouvertures toujours accrocheuses avec cette sensation de se faire happer par le colbac, des breaks ravageurs à mi-parcours des titres ("Demolished by Neglect" et "The Concrete That Encased the Rose" notamment), la joliesse et délicatesse du travail sur les cymbales, les mélodies discrètes mais entêtantes entrecoupées de riffs incisifs, une basse robuste et virile, comme une épaule musclée contre laquelle s’appuyer ("Unearthed from Heaven’s Carrion Pastures"). Un régal ! Enfin, saluons comme il se doit l’énorme travail de John Jones derrière son micro, dont les vocalises sont proprement bluffantes, du growl long et caverneux aux cris stridents et suraigus, qui une fois de plus, me rappellent énormément DRAGGED INTO SUNLIGHT ! Un vrai régal, je vous dis ! Vous n'êtes pas encore sur Bandcamp ?
Si les Anglais de DRAGGED INTO SUNLIGHT (je vous en ai déjà parlé, je crois, non ? Je les adore ! ) veulent nous faire cramer comme des vampires au contact de la lumière du soleil, les Américains de CAGED envisagent sérieusement de nous coffrer dans un tombeau suintant la désolation et jonché de toiles d’araignées. Mais, on ne tourne pas en rond dans cette cage rouillée et malodorante, non, on a presque envie de fermer soi-même à double tour, de humer à pleins poumons cette atmosphère mortifère et de jeter le trousseau de clefs au fond d'un puits.
Toute la saveur du Death/Doom réside dans ces coitus interruptus ou ces éjaculations précoces, lorsque le rythme s'accélère subitement ou au contraire ralentit sans crier gare. Dans ce registre, CAGED s’en sort haut la main avec une première sortie solide et convaincante. J’espère que les Américains n’en resteront pas là et je miserais bien une piécette sur le fait qu’il faudra désormais compter avec eux dans le paysage sépulcral. Si je dois me faire enfermer, je m’y résigne, si tant est que ce soit par des geôliers de la trempe de CAGED.
| ERZEWYN 19 Mars 2021 - 840 lectures |
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