Terminer sa carrière avec son unique album après 17 ans à avoir sorti des splits, EPs et compilations : une certaine vision de l’underground.
C’est ce qu’aura fait Dystopia, concluant ainsi une longue période d’inactivité des Ricains, sans doute plus occupés avec leurs autres projets (Noothgrush, Ghoul, Medication Time ou encore Asunder pour les plus notables). Une manière de mettre les formes à une fin que je regrette encore aujourd’hui, vénérant les compilations
Human = Garbage et
The Aftermath comme des exemples d’un sludge aussi déprimé que contestataire. Une atmosphère d’humanité arrivée en bout de route, dépravée, médicamentée (même si, comme dit, « ça ne marche pas ») et violente à laquelle la pochette de l’album rend bien hommage, assemblant des images d’atrocités de son époque (presqu’un « worst of » des années 2000).
Enregistrée en 2004 et 2005, puis sorties sur le mythique label Life Is Abuse une fois l’arrêt des activités du groupe officiellement annoncé, cette petite trentaine de minutes peut paraître bien maigre en comparaison des heures entre sludge et crust que Dystopia a déjà pu nous laisser. Et, pour être tout à fait honnête, cela est bien le cas : certes rallongée dans la version CD par de longues plages de silence et quelques expérimentations – que je zappe toujours –, elle laisse une certaine frustration faisant que j’ai plus tendance à retourner vers les œuvres antérieures du trio sur le temps long. Pour autant, n’importe quel fan de Dystopia aura acheté ce disque sans sourciller et il est facile d’en comprendre les raisons : contenant tout ce qui a fait l’attrait du projet, il possède également une certaine évolution, plus doom dans sa façon de composer, le rendant essentiel aux amateurs malgré quelques réserves lors de son écoute.
I hate myself more everyday, I guess I'll always be this way : Cette phrase tirée des paroles de « My Meds Aren't Working » en dit long sur l’humeur générale de ce disque, poussant encore d’un cran la dépression qui a toujours habité les Ricains. Une noirceur qui s’habille régulièrement de samples misérabilistes, parmi les plus convaincants et les mieux utilisés de leur part. Le surligneur est sorti et utilisé dès que l’occasion se présente, rappelant le jusqu’auboutisme dans les extraits sonores au bord du gouffre de
Damad et son Rise and Fall. Heureusement, point de cache-misère ici (on l’affiche plutôt, et en grand) tant les compositions suivent la même tendance ! Dès les premières notes de « Now and Forever », une atmosphère glauque se met en place, une lourdeur rampante et implacable menée par le jeu de Dino Sommese. Même sur des durées courtes (l’expéditive « Control All Delete »), le trio ne lâchera jamais cette peinture de rues où les soi-disant parasites pullulent et envahissent l’espace. On entendrait presque un appel à se soulever dans les élans punk de « Leaning With Intent to Fall » mais qu’on ne s’y trompe pas ! C’est bien une vie de défaite dans un monde horrible qu’exprime Dystopia, faisant tout pour mériter son nom.
Il y a toujours cette alternance de voix si particulière, l’une prise dans sa colère et l’autre dans sa douleur, guidant plus que jamais des compositions qui, si elles sont plus variées que l’on peut l’imaginer – les racines crust du projet sont toujours bien présentes, frôlant même le grind / death metal sur la reprise de Carcinogen « Illusion of Love » –, se révèlent moins impressionnantes que les hymnes qu’a déjà pu produire la bande, à l’exception de « My Meds Aren't Working » clôturant tel un clou final l’album. Le climat se fait alors encore plus pesant, une certaine inquiétude, comme écouter un esprit dérivant dans la folie, s’invitant dans ce déluge où chaque riff semble être plus intense que le précédent. Pour son dernier titre de sa dernière œuvre, Dystopia aura vu les choses en grand avec succès !
C’est bien cette ambiance de décadence moderne qui rend ce disque précieux, au-delà des questions de fanatisme que créé Dystopia, son sludge unique et en même temps totalement typique dans ses images de rues malfamées et de gens affamés. Difficile, après avoir écrit tant de morceaux qui sont des chefs d’œuvres du style, de garder le même niveau tout du long ! Moins marquant car moins extrême, son unique longue-durée n’en reste pas moins un testament qui remplit parfaitement sa mission : celle de lettre d’un déjà-mort à ses contemporains, sa haine comme legs laissé à l’humanité.
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