Avant de s'intéresser au nouvel EP de Deiquisitor paru en début d'année, il serait temps de revenir sur l'album précédent
Towards Our Impending Doom qui faisait suite au fort sympathique
Downfall of the Apostates, seule sortie des Danois à avoir l'honneur de figurer dans ces augustes pages. À ma décharge, il a fallu attendre près d'une année pour que
Towards Our Impending Doom, débarqué en juin 2019 sur Night Shroud Records en LP puis juillet 2019 via Extremely Rotten Productions en version K7, se voit enfin pressé au format CD grâce à Dark Descent Records en mars 2020. Et je n'achète que du CD. Vous me direz, ça fait déjà plus d'un an. Et là je vous répondrai que je vous emmerde, même si vous avez raison. Ce troisième album de Deiquisitor aurait en effet mérité un traitement plus rapide.
Surtout que ce n'est pas comme si je n'aimais pas ce groupe ou que les Scandinaves s'étaient plantés. C'est même plutôt le contraire. Deiquisitor reprend là où il nous avait quittés sur
Downfall of the Apostates en peaufinant son style qu'il maîtrise désormais à merveille. Un style qui, s'il prend pour modèle le death metal tourmenté d'Immolation, réussit à se détacher de la tendance dark old-school habituelle et à revêtir un caractère plus personnel. Toujours plus sombre, toujours plus brutal, toujours plus implacable. Voilà un peu le crédo de ce
Towards Our Impending Doom à la pochette évocatrice et qui porte décidément bien son nom. Cela commence par une production impeccable, couillue sans sonner artificielle, avec notamment une batterie au son naturel (oh, une vraie caisse claire !) et non sur-mixée qui fait tellement plaisir à entendre. Et cela n'empêche pas Henrik "HBC" Christensen (Had, Ulcerot ...) d'envoyer du pâté comme jamais à grands renforts de blast-beats annihilateurs et de semi-blasts punitifs. Deiquisitor est ainsi un des rares groupes avec Suffocation pour lequel je tolère volontiers l'utilisation de ces hammer blasts que je trouve souvent trop patauds. Pour le trio de Ringsted toutefois, ils s'avèrent tout à fait justifiés en ajoutant une couche de barbarie à un death metal déjà fort peu tolérant, tout en faisant flirter le groupe avec le brutal death où l'on retrouve davantage ce type de rythmique. On notera aussi quelques patterns thrashisants plus entraînants jusqu'à du presque d-beat sur "Extinction". Pour le reste, un peu de ralentissements menaçants et du mid-tempo plus strictement efficace. Et malgré l'intransigeance du propos, le jeu de batterie dégage un certain groove pas désagréable.
Un batteur en mode pilonnage intensif doté d'un son adéquat, cela me donne déjà envie de coller une bonne note à l'album. Ce serait tout de même oublier que l'on est là avant tout pour les riffs. Tant mieux, Deiquisitor y fait aussi des merveilles. Thomas Friis Jørgenssen alias TFJ (Ulcerot) a su rendre son riffing un peu plus mémorable, sans sacrifier le caractère opaque de sa musique. Son jeu se révèle même paradoxalement plus complexe et tarabiscoté. Ça sent le Immolation comme déjà évoqué mais en plus abrupt, plus cru et plus chaotique. En ressort parfois un petit côté Khthoniik Cerviiks en moins voivodien voire des accointances avec les plans plus lisibles d'un Portal. Certains riffs old-school plus classiques font également mouche. TFJ varie en fait peu sa gamme, donnant une impression de répétitivité, un côté monolithique qui rend le tout obsédant, aliénant. Une prouesse pour une musique aussi musclée. Concernant les quelques solos chaotiques vite expédiés, on sera par contre plus réservés sur leur intérêt d'autant que les morceaux n'en ont pas besoin. Peu importe à qui peut faire penser le riffing et ce qu'il évoque en tout cas, le résultat se montre magistral et instaure une atmosphère incroyable qui s'avère pour moi la principale qualité de la formation. Pas juste une simple ambiance sombre comme tout le monde, même si évidemment le death metal de Deiquisitor ne donne pas envie de sortir son skate ou de boire de la limonade sur la plage. Non, une ambiance vraiment brutale, dominatrice, autoritaire, menaçante. J'irais presque jusqu'à dire totalitaire. Le chant growlé inhumain de TFJ, souvent épaulé de ses deux comparses HBC et DA (Daniel Andersen, ex-Purification Kommando), contribue lui aussi à ce ressenti, encore davantage qu'auparavant. De toute façon, rien qu'avec un nom comme Deiquisitor, on sait que ça va porter ses couilles et imposer sa loi. Martiale, bien sûr. À l'écoute des Danois, j'ai ainsi toujours cette image de race extra-terrestre en mode "we don't come in peace" venue éradiquer l'humanité. Nickel pour assouvir ses envies de génocides !
Avec
Towards Our Impending Doom, déjà son troisième album, Deiquisitor confirme ses bonnes dispositions qu'il affûte comme un forcené depuis 2013. Jusqu'à s'imposer désormais comme une force sur laquelle il faut compter dans le paysage death metal. C'est bien simple, je place le combo tout en haut de la nouvelle scène danoise pourtant très compétitive. C'est dire le niveau atteint par le trio tyrannique qui signe ici sa meilleure sortie. Le groupe a progressé dans tous les secteurs, en particulier le riffing et le chant, tout en musclant encore un peu plus son jeu. La formation n'a ainsi jamais sonné aussi impitoyable que sur ce jouissif
Towards Our Impending Doom. Quelle branlée de bout en bout ! Seuls les pseudos-solos s'avèrent dispensables et la fin minimaliste du bien nommé titre de clôture "Extinction" traîne un peu trop en longueur. L'atmosphère de désolation qui y règne s'avère toutefois la conclusion parfaite au disque, telle une pluie de cendres après la bombe atomique. On leur pardonnera donc volontiers de l'étirer un moment pour faire durer le plaisir. Prenant pour base le riffing sombre et menaçant d'Immolation, Deiquisitor a pourtant en plus le mérite de se démarquer de la masse OSDM par une brutalité accrue (le brutal death n'est pas loin, notamment avec ces semi-blasts très présents) et une ambiance de domination totale jubilatoire (oh oui fais moi mal !) que je ne retrouve nulle part ailleurs. Allez, venez prendre votre fessée !
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