Nirvana - Unplugged In New York
Chronique
Nirvana Unplugged In New York (Live)
Aujourd'hui, pas de brutal death, pas de blast-beats sauvages, pas de vocaux gutturaux aboyant du gore ou blasphémant sur le petit Jésus et pas de mosh-parts de tueurs. Non, pour fêter cet événement interplanétaire que constitue la 1000è chronique de votre webzine préféré (Thrashocore oui, faîtes un effort!), nous allons nous intéresser à des albums non métal qui ont marqué vos chroniqueurs préférés (ceux de Thrashocore suivez un peu bon sang!). Pour ma part, le groupe qui m'a le plus touché est Nirvana, le dernier génie du rock comme il est souvent présenté à juste raison. Mais au lieu de discourir une énième fois sur Nevermind, mon choix s'est porté sur le très controversé Unplugged In New York. Début de l'exploitation morbide du mythe Nirvana pour les uns, chef-d'oeuvre absolu pour les autres, cet album fait toujours débat mais pour moi c'est incontestablement une des plus grandes réussites du groupe. Je ne vais pas parler de l'aspect purement commercial de cette sortie ni du fait que cet enregistrement est plus dû à une histoire de contrat et de gros sous qu'à une rélle volonté de Nirvana de couper le jus. Je vais simplement me concentrer sur ce qui restera toujours le plus important, la musique.
Ce Unplugged fait partie d'une série d'albums dont l'idée, à savoir inviter des groupes rock pour qu'ils interprètent leur répertoire en acoustique devant un public restreint, vient de la chaîne américaine MTV. En voyant Nirvana à cette place on ne peut malgré tout s'empêcher de tilter tant il semblait impossible pour des punks de base de participer au star-système, et on n'oublie pas que MTV a longtemps méprisé le groupe de Seattle, avant de s'apercevoir qu'il devenait un phénomène de société et qu'il serait donc judicieux pour son image d'en parler. Pitoyable! Ah merde j'ai dit que ne parlerai pas de ça, tant pis c'est raté!
Passons donc à la musique et là, c'est vraiment le pied intégral. Je ne suis normalement pas un adepte de l'acoustique (ou alors quelques passages par ci par là) mais il faut bien avouer que les morceaux s'en trouvent sublimés. Cela peut paraître paradoxal car l'intérêt de Nirvana résidait notamment dans l'intensité de ses compos, la hargne, la colère qui s'en dégageaient. En fait ici la palette d'émotions ressenties est bien plus large: mélancolie, tristesse, désespoir, douleur et j'en passe, confirmant, s'il en était encore besoin, le talent de songwriter de Kurt Cobain. Cobain tiens, parlons-en. Le concert a été enregistré en novembre 1993 et est sorti en octobre 1994, soit 6 mois après la mort de la tête pensante du groupe (délai maximum qu'on dû définir les magnats de l'industrie du disque pour éviter de se faire traiter de charognards!). La mort de Kurt est évidemment présente à l'esprit à chaque note jouée, chaque parole prononcée, et les morceaux prennent donc une autre dimension, symbolique et tragique, dimension qui n'aurait pas existé si Kurt ne s'était pas donner la mort. Sa voix véhicule à merveille les émotions et le fait qu'elle ne soit pas toujours juste (comme l'interprétation, parfois bancale) rend le tout encore plus vrai, plus authentique. Entre les morceaux, le bonhomme blague avec Chris Novoselic et Dave Grohl et s'amuse avec le public, comme si tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes, alors que tout ce succès dont il ne voulait pas était en train de le dévorer. Le public est d'ailleurs un des seuls éléments qui me gênent. J'aurai préféré une relation plus intimiste avec le groupe, ne pas l'entendre applaudir et partager toutes ces émotions en une sorte de tête à tête posthume. Un caprice égoïste mais d'autant plus justifié que la plupart des spectateurs, sans doute triés sur le volet, ne devaient pas être de vrais fans. Kurt en a parfaitement conscience, les premières paroles qu'il prononce (après un rapide "good evening") pour introduire la magnifique chanson "About A Girl" en témoignent: "This is on our first record, most people don't know it".
Autre pied de nez et pas des moindres, la setlist. On s'attendrait à une avalanche de tubes mais pas du tout, seul le culte "Come As You Are" était prévisible. Pas de "Smell Like Teen Spirit", de "Rape Me", de "Lithium" ou de "Heart-shaped Box". Au lieu de cela des titres moins connus mais néanmoins excellents: "About A Girl", "Dumb", "Something In The Way" (et son sompteux violon) et "All Apologies". Seuls "Pennyroyal Tea" (un peu massacré au chant malheureusement) et "Polly" sont en dessous, sans doute parce ce que je n'aime déjà pas les versions originales. Mais le plus étonnant reste la présence de 6 reprises (sur 14 morceaux) et de groupes méconnus (à part Bowie) qui plus est. Chose amusante, ce sont ces reprises, ou devrais-je plutôt dire ces interprétations, tant Nirvana les a personnalisées, qui me touchent le plus. "Jesus Don't Want Me For A Sunbeam" (la version originale est de The Vaselines et s'intitule "Jesus Wants Me For A Sunbeam") est bouleversante, grâce à la voix très douce de Kurt et à l'apport d'un accordéon (instrument qui m'énerve d'habitude au plus haut point!) joué par Chris Novoselic. Le morceau final, "Where Did You Sleep Last Night" (reprise de Leadbelly) est aussi excellent avec un Kurt qui pousse la gueulante sur la fin, énorme! Mais la meilleure reste sans conteste la reprise de David Bowie, "The Man Who Sold The World". Magnifique, bouleversant, d'une mélancolie et d'une tristesse infinie, les mots me manquent pour décrire ce que je ressens à chaque fois que j'écoute ce morceau (notamment ce passage fabuleux de 2'45 à 3'28). A y réfléchir on est quand même con hein? Quand on est triste on écoute toujours quelque chose de triste alors que pour nous remonter le moral on devrait plutôt se passer en boucle le best-of de Patrick Sébastien! Les trois autres reprises (qui se suivent), "Plateau" (très bon), "Oh Me" (magnifique) et "Lake Of Fire" (moyen) ont été écrites par les Meat Puppets et sont l'occasion de les inviter sur scène. C'est assez "comique" de voir ce groupe inconnu interpréter trois de leurs morceaux avec LE groupe à la mode. Clin d'oeil à une scène underground que Kurt n'a au fond jamais quittée?
Certains vous diront que cet album est une injure à Nirvana, une prestation lamentable ou la mise en scène macabre d'un groupe à l'agonie. Pour moi c'est une page de l'histoire de la musique qui se tourne, un témoignage inestimable d'un groupe qui aura marqué son époque, grâce à un personnage aussi attachant que perdu au milieu de toute cette folie, un songwriter hors pair. Pour tout ce que Nirvana a apporté, à moi et à la musique, pour Kurt, je mets la note symbolique de 10/10.
| Keyser 1 Juin 2005 - 3015 lectures |
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