Heresie - Par-Delà Les Vents
Chronique
Heresie Par-Delà Les Vents
Révélé il y’a quelques mois à peine avec le très bon
« Poésie Noire » le duo de Haute-Vienne a déjà remis le couvert avec un premier opus très attendu, tant l’Ep en seulement deux morceaux et vingt-deux minutes dévoilait un style particulièrement intéressant qui ne demandait qu’à s’étoffer sur une durée supérieure et avec un soupçon d’expérience supplémentaire. Evoluant toujours dans un univers aux atmosphères météorologiques nombreuses le combo livre ici de nouvelles compositions particulièrement homogènes et différenciés, où ça va autant à l’essentiel qu’en laissant le temps aux ambiances marécageuses et légendes campagnardes de se dévoiler intégralement même si ces dernières vont être moins marquées. Car visiblement le binôme a décidé de ne pas s’enfermer dans le même carcan, et montre ici des compositions à la fois plus courtes et primitives tout en lorgnant dorénavant vers le dépressif suicidaire digne des débuts de SHINING.
Mais au départ ce qui va marquer c’est cette doublette très expéditive et dépouillée particulièrement authentique qui va renvoyer automatiquement vers les débuts du genre et l’époque du tape-trading de par la musique au son et à l’exécution plus que sommaire, comme cela s’entend sur la doublette « Dévouement pour la nature » / « Âmes Putrides » qui n’est pas sans rappeler l'origine du Black dans les années 80. Si cette veine fait office d’hommage appuyé à ses créateurs l'intérêt musical y est lui plus que limité, mais heureusement après cela les choses vont rentrer dans l’ordre et en premier lieu via le brumeux et automnal « Pensées Morbides ». Montrant autant une facette rampante qu’inquiétante cette plage joue sur l’alternance rythmique avec des cris désespérés et flippants sortis des entrailles de ses créateurs et y exprimant toute leur douleur, avant que cela ne se calme un peu sur le plus posé « Le loup en cage » qui renvoie vers les feux de camp nocturnes dans les bois, où mythes et rumeurs ne sont jamais bien loin aidés en cela par une musique moins agressive et un tempo plus posé et lent qui ne bouge pas vraiment, laissant ainsi le temps de créer une vraie marque spécifique autour d'elle. Se terminant de très bonne façon cette première partie montre en tout cas que le groupe s’est un peu éloigné du genre de sa précédente réalisation pour y faire une musique plus classique et moins personnelle, un choix que certains regretteront à coup sûr tant on aurait aimé une suite de ces poèmes sombres - et au lieu de ça on a droit à un son plus nordique typique de la période 80-90 qui n’est heureusement pas dégueulasse du tout, loin de là !
Du coup pour la seconde moitié de cet album c’est la formation à Niklas Kvarforth qui va être mise à l’honneur, vu que « Etoiles persistantes » et « La mort du temps » - de par leur construction mid-tempo, leur riffing légèrement voilé et ses voix qui s’égosillent à tout va - vu ça lorgne facilement vers la doublette « I – Within Deep Dark Chambers » et « II - Livets Ändhållplats ». Aidé par quelques nappes douces et variations bienvenues ces compositions à l’obscurité intégrale sentent le crachin automnal et l’odeur des feuilles mortes et humides en pleine décomposition, tel un terreau fertile autant pour la nature que pour l’esprit créatif des deux acolytes, qui livrent une musique pleine de promesses et de maturité malgré la grande simplicité de façade (où les gars sont nettement plus convaincants en alourdissant le tempo qu’en le faisant vivre à deux cent à l’heure). Car si effectivement une certaine fougue et un enthousiasme à enregistrer ces titres peuvent facilement s’entendre et se faire comprendre celles-ci compensent de fait des erreurs de jeunesse, et un sentiment parfois légitime que l’ensemble (malgré sa qualité intrinsèque indéniable) a été mis en boîte quasiment dans la foulée de son écriture créant ainsi un ressenti bizarre d’inachevé ou de bordel organisé, qui auraient demandé à germer un peu plus longtemps avant d’être enregistrés et envoyés à la face du monde.
Néanmoins on a toujours un ressenti positif sur le potentiel de l'entité qui ne demande qu’à prendre un peu plus son temps et à maturer sur une temporalité plus importante, où son vrai visage et ses idées créatrices feront preuve d’une intensité et force plus importantes. En attendant même si ce passage vers la longue-durée n’est pas aussi passionnant et réussi qu’attendu il faut voir le bon côté de ce verre à moitié plein qui remplit quand même parfaitement son rôle, et qui n’oublie pas le côté champêtre et nostalgique (présent aussi sur l’interlude du même nom et l’outro finale), tout en offrant une radicalité plus grande qui suinte la sincérité de bout en bout. Rempli d’une volonté de bien faire et de tout réaliser soi-même de a à z (le ”do it yourself” fonctionne ici à plein) ce « Par-delà les vents » certes imparfait mérite quand même qu’on s’y attarde et qu’on lui donne une chance tant ces petits défauts seront rapidement oubliés une fois lancé dans son écoute attentive. Incisif et rempli autant de nihilisme que d’espoirs déçus cet enregistrement ravira autant les amateurs de bon son ultra-dépouillé que ceux aimant les plans plus acoustiques et éthérées, confirmant que nos deux hérétiques ont un sacré potentiel et qu’il prendra toute sa valeur avec un soupçon de vécu et d’expérience supplémentaire ce qui ne devrait être qu'une formalité imminente.
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