Esoctrilihum - The Telluric Ashes Of The Ö Vrth Immemorial Gods
Chronique
Esoctrilihum The Telluric Ashes Of The Ö Vrth Immemorial Gods
"Intriguant". Je pense que c'est le meilleur résumé que l'on puisse faire d'Esoctrilihum et de sa discographie. C'est que le one-man band Français sait cultiver le mystère : peu d'interviews, des paroles et des titres aussi énigmatiques que son imagerie, pour laquelle ce dernier sait bien s'entourer. Après Luciana Nedelea ("Mystic Echo from a Funeral Dimension"), Alexander Shadrin (" Pandaemorthium") et Wrest ("Inhüma"), c'est au tour d'Alan Brown de donner le ton de ce quatrième full-length, par le biais de sa toile "Humbaba the Terrible". Et cette dernière sied parfaitement au contenu de "The Telluric Ashes Of The Ö Vrth Immemorial Gods" : une bestiole aussi massive que grotesque. Vous êtes prévenus.
"Productif", aussi...Quatre monolithes en trois ans, jugez du peu. Un rythme effréné qui, à en croire les critiques, n'a pour autant jamais affecté la qualité des chimères d'Asthâghul, le seul maître à bord. Pour être sincère, ce n'est qu'avec cette dernière galette et son nom à rallonge que j'ai finalement décidé de me pencher avec attention sur Esoctrilihum, n'ayant fait que survoler ses précédents disques. En creusant, j'y ai découvert un univers très affirmé, au carrefour de nombreuses influences, une patte aussi hermétique qu'attirante, nous poussant à y revenir sans cesse pour tenter de déchiffrer ses gammes. I, Voidhanger ne s'y est d'ailleurs pas trompé, offrant à chacun des albums d'Esoctrilihum un pressage en bonne et due forme, en DLP et digipacks A5 - "Parce que les noms complets des disques ne passaient pas sur la tranche d'un format classique" diraient certaines mauvaises langues... Je préfère y voir le fait que le label connaît la valeur de son poulain, et lui laisse carte blanche pour laisser libre cours à sa créativité. Les livrets, contenant les paroles (en forme de mode d'emploi), sont d'ailleurs bienvenus pour savoir comment défricher ce qui se passe dans la tête du chef d'orchestre.
"Dense", en effet ! A l'image de ses pochettes toujours surchargées, difficile d'attaquer l'univers du frenchie de face, tant les compositions de "The Telluric Ashes Of The Ö Vrth Immemorial Gods" fourmillent de détails, de constructions tarabiscotées, d'ajouts tantôt mélodiques, tantôt complètement psychédéliques. Un torrent ponctué de saillies Black/Death dont la brutalité feraient pâlir les plus endurcis ("Invisible Manifestation of Delirium God"), la faute à cette boîte à rythme élevée aux hormones de croissance (qu'est-ce que c'est que ce son sur "Aborted Sun" ?) et à l'organe profond d'Asthâghul, qui grogne, murmure, psalmodie des mantras sans queue ni tête. Un délire tantôt mystique, tantôt plus tribal, incarné par ces arpèges fiévreux, donnant du relief aux parties plus lentes ("Kros Ö Vrth") quand ils n'apportent pas une caution mélodique fort bienvenue aux blast-beats (à 2:46 sur l'excellent "Stone of Static Void"). Parlons-en, des guitares, justement ! Elles tricotent sans discontinuer des motifs tarabiscotés, superposant les couches pour mieux nous égarer : "Thar-Voknargh" l'illustre bien, démarrant de façon tout à fait orthodoxe, pour évoluer en un monstre presque progressif qui n'a plus rien à voir avec le motif de base. Même les composition plus "classiques" dans l'âme ont droit au même traitement, à la manière du titre de clôture, "Torment of Death", certes un peu longuet, mais qui tire son épingle du jeu grâce à son millefeuille de cordes et d'ajouts ambiants. Malgré tout, le néophyte pourra se sentir désemparé face à Esoctrilihum, une autre constante dans sa discographie. Car ce quatrième opus n'est pas exempt de défauts.
"Imparfait", oui. En même temps, difficile d'éviter les excès quand on dépasse l'heure au compteur. Au-delà de la dimension subjective, des goûts de chacun, notions fondamentales quand on parle d'une formation aussi particulière, c'est bel et bien la générosité de cet opus qui pose problème. Asthâghul veut tant nous régaler qu'il en oublie d'être digeste. Si l'album, bien que surchargé, est une réussite, on ne peut cependant pas faire l'impasse sur quelques choix pas toujours très heureux : le changement de production inexplicable d' "Aborted Sun", par exemple, titre le plus bovin du disque (et le moins bon), qui traîne sa grasse carcasse pendant six minutes, rallongeant un album qui n'en avait pas besoin; "Inexorable Plague of Time" également, pas inintéressant mais trop "classique", surtout au sein d'un si gros morceau qui ne fait que partir dans toutes les directions. Amputé de quelques minutes, le disque aurait probablement gagné en impact et en lisibilité - ce qui allait probablement à l'encontre de la raison-d'être même d'Esoctrilihum, si l'on se fie à ses précédentes sorties.
"The Telluric Ashes Of The Ö Vrth Immemorial Gods" en laissera sûrement plus d'un sur le côté. Trop long pour certains, trop chargé pour d'autres, des arguments que je comprends et accepte. Néanmoins, on ne pourra pas reprocher à Esoctrilihum de "sonner comme untel" tant ce que propose Asthâghul est "différent". Pour le meilleur comme pour le pire, qui se côtoient sans cesse, s'entrechoquent au cours de l'heure et quart de cette galette. Un gros morceau qui, malgré ses longueurs et ses menus défauts, reste assez fascinant dans sa démesure.
| Sagamore 3 Septembre 2019 - 1833 lectures |
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