S’il y a bien une chose qui caractérise les Allemands de Drowned c’est évidemment leur très grande discrétion. Que ce soit sur les réseaux sociaux où il convient d’être pour exister (en tout cas lorsque l’on est un groupe de musique souhaitant toucher une partie de son auditoire) ou bien sur les planches lorsque ces derniers daignent sortir de leur tanière, on ne peut pas dire que les trois Berlinois soient parmi les plus actifs que la scène ait compté. Formé en 1992, Drowned ne sortira son premier album qu’en 2014 après une série de plusieurs démos plébiscitées à l’époque des seuls connaisseurs. Malgré une activité relativement chargée à la sortie d’
Idola Specus (quelques festivals par-ci par-là ainsi qu’une tournée européenne en compagnie de Ravencult), il faudra tout de même pas loin de dix ans au groupe allemand pour accoucher d’une suite que plus personne n’attendait...
Intitulé
Procul His (qui, si je ne me suis pas planté, signifie « loin d’eux » en latin), ce deuxième album a été composé sur une période allant de 2012 à 2023. Vraisemblablement toujours en très bons termes avec le label Sepulchral Voice Records, c’est sur cette même structure qu’est donc parue en janvier dernier cette suite quelque peu inattendue. Un disque à l’illustration toujours aussi peu parlante puisqu’une fois de plus on n’imagine pas forcément qu’un groupe de Death Metal puisse se cacher derrière ce type d’artwork dont la sobriété et le caractère peu explicite tranchent effectivement avec le genre pratiqué. Côté production, pas de surprise, c’est une fois de plus le batteur Tobias Engl qui s’y colle avec le soutien cette fois-ci de son compatriote Michael Zech (ex-Secrets Of The Moon ayant notamment déjà collaboré avec des groupes comme (Dolch), Ascension, Bølzer, Hell Militia, Stormkeep ou The Ruins Of Beverast). Le mastering à quant à lui été confié à Patrick W. Engel pour un résultat final sobre et efficace qui naturellement sied à ravir à un groupe tel que Drowned.
Pour ce retour aux affaires entamé dans l’ombre avant même la sortie de son prédécesseur, les Allemands n’ont bien évidemment pas cherché à innover ni même à mettre un pied en dehors de ces sentiers battus qu’ils arpentent pourtant depuis déjà un moment. Ainsi, malgré les années qui séparent
Idola Specus de ce récent
Procul His, on ne peut pas dire qu’il y ait de grandes différences entre ces deux albums, autant sur le fond que sur la forme. Avec ces huit nouveaux morceaux s’étirant sur plus de quarante-trois minutes, Drowned reprend donc le chemin de ce Death Metal à l’ancienne qui a fait sa réputation. Une approche rigoureusement classique dont les seules « extravagances » vont être ces quelques arrangements disséminés tout au long de l’album (ces cordes frottées sur "Star Tower" et "Phantom Stairs" ou bien ce synthétiseur et ce Mellotron sur "Seed Of Bones").
Dans le sillage de formations comme Grave Miasma, Necros Christos, Cruciamentum ou Venenum, Drowned nous offre pour son grand retour un Death Metal caverneux et sombre aux atmosphères chargées d’encens. Une musique dense et occulte qui effectivement coche à peu près toutes les cases de ce cahier des charges bien connu de tous et qui à défaut de briller par son originalité reste malgré tout le fruit d’artisans appliqués dont l’expérience a toujours permis de faire la différence (que ce soit sur disque et même sur les planches).
Partagé entre quelques passages aux cadences relativement soutenues (sans jamais être pour autant dans la démonstration de force ou l’explosivité), séquences mid-tempo plutôt enlevées et moments un petit peu plus en retenue à même d’entretenir et développer ces ambiances évoquées plus haut,
Procul His est un album plein de relief qui compense ses « faiblesses » en matière d’originalité (faiblesses partagées par 90% de la scène) par une approche dynamique, variée et efficace. Évidemment, par leur nature directe et primitive, ces brèves séquences menées tête dans le guidon (quelques blasts mais surtout beaucoup de toupa-toupa toujours très entrainants) sont les plus à même de convaincre ("Phantom Stairs" à 1:38, "Corpse God" à 1:58 et 2:58, "Malachite Mirror" à 3:21, les premières secondes "Man In Devil In Man" menées tambour battant, "Blue Moth Vault" à 1:48 et 2:39, "Seed Of Bones" à 0:55 et 1:29...) mais le groupe n’a aucun mal à conserver notre attention et notre intérêt lorsque celui-ci lève le pied pour donner lieu à des instants tantôt pesants et menaçants, tantôt plus chaloupés. Dans le même ordre d’idée, le soin apporté au riffing et aux mélodies tout au long de ce nouvel album participe également sans surprise à son succès. Des riffs qui n’impressionnent pas nécessairement mais qui grondent et servent de fondation à ces ambiances de cryptes humides, lieux de rituels occultes, que viennent par ailleurs entretenir également ces quelques leads et autres solos dispensés sur chaque titre ou presque.
Les années passent mais la musique de Drowned, inspirée par celle de formations plus grandes que lui (Incantation en tête), n’a quant à elle pas pris une ride. Certes, le groupe allemand n’est peut-être pas le plus original, le plus véloce, le plus impressionnant, le plus brutal ou le plus je ne sais quoi mais toujours est-il qu’à chaque écoute c’est pareil, on se demande pourquoi la formation ne fait pas davantage l’unanimité et à titre personnel pourquoi je n’écoute pas sa musique plus régulièrement alors que tout est si savamment composé et interprété. Sans faillir à sa réputation, Drowned revient donc dix ans après un très bon
Idola Specus se rappeler à nos bons souvenirs sans forcément chercher à en faire forcément plus. Certes, ce n’est probablement pas comme ça que le groupe pourra espérer changer de division mais tout ceux qui ont déjà écouté leur musique vous le diront, Drowned est quoi qu’il en soit un groupe tout à fait recommandable qui très justement brille par la rigueur et l’authenticité de sa formule à laquelle
Procul His ne déroge pas.
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