Neon Nightmare - Faded Dream
Chronique
Neon Nightmare Faded Dream
On dit souvent que « l’imitation est la forme de flatterie la plus sincère ». Une citation qui ne date pas d’hier puisqu’on la doit à l’écrivain anglais Charles Caleb Colton (1780-1832) mais qui aujourd’hui encore continue de se vérifier chaque jour et cela quel que soit le domaine. Pour autant, il n’y a souvent qu’un pas entre l’hommage et le plagiat à tel point qu’il est parfois difficile pour certains de donner du crédit à ces groupes qui dans les faits se contentent effectivement de singer avec généralement un petit peu moins de talent ce que d’autres ont su initier en leur temps... Si je vous raconte tout cela ce n’est évidemment pas pour griffonner de caractères inutiles cette chronique mais bel et bien parce que le groupe dont il va être question aujourd’hui rentre à pieds joints dans la catégorie des imitateurs.
Cependant, avant de tourner les talons et de partir en courant, sachez tout de même que Neon Nightmare n’est pas le genre de "copycat" auxquels nous sommes généralement habitués en ces pages puisque loin de toutes ces évocations quasi-quotidiennes à des groupes comme Entombed, Death, Morbid Angel, Incantation, Darkthrone ou Emperor, l’influence principale de ce one-man band est à chercher complètement ailleurs. En effet, si cette illustration bleutée ne vous a pas déjà mis sur la piste, c’est du côté d’un certain Type O Negative que le one-man band américain puise son inspiration. Une proposition suffisamment rare et alléchante pour se montrer bien plus enthousiaste que méfiant face à un projet sur lequel on ne savait encore pas grand chose jusqu’à la semaine dernière.
Annoncé par le label américain 20 Buck Spin durant l’été dernier, ce premier album intitulé Faded Dream est le fruit de quelques années de travail de la part de son seul et unique géniteur. D’ailleurs, si son identité nous a été caché durant plusieurs semaines, on sait désormais qui se cache derrière Neon Nightmare puisqu’il s’agit de Nathan Raleigh Garrett des excellents Spirit Adrift. Un multi-instrumentiste talentueux qui n’a pas attendu 2024 pour briller mais qui en cette occasion ne devrait pas manquer de faire parler de lui.
Effectivement, en choisissant de rendre un tel hommage au célèbre groupe de Brooklyn, l’Américain savait qu’il susciterait beaucoup d’enthousiasme mais aussi probablement un petit peu d’agacement. De l’enthousiasme d’abord parce que depuis 2010 et le décès tragique de Peter Steele, aucun groupe ne s’était approché de manière aussi juste de Type O Negative. Certes, des bribes ou des évocations ont pu être entendues entre temps ailleurs (on pense naturellement à des groupes comme A Pale Horse Named Death, Seventh Void et Silvertomb ou plus près de chez nous aux Parisiens d’Hangman’s Chair) mais certainement pas de façon aussi mimétique. De l’agacement ensuite parce qu’on imagine bien que pour certain il est tout simplement impossible de toucher au mythe et que de toute manière aucun groupe ne parviendra jamais à égaler l’aura des Drab Four.
Cependant, si nous sommes bien d’accord pour dire que Type O Negative est un groupe définitivement à part auquel il est difficile de se frotter sans se planter, le fait est que Nathan Raleigh Garrett a fait ici les choses proprement. Car même si Faded Dream n’est pas exempt de petits défauts (un nombre de compositions et une durée un brin frustrants puisque l’album est affiché à quarante-et-une minutes seulement et un dernier titre peut-être un brin en deçà du reste), il semble difficile de ne pas tomber sous le charme d’un tel album si l’on est naturellement client des New-Yorkais et de leur Doom si particulier. Doué d’un sens du détail particulièrement affûté, l’Américain n’a absolument rien laissé au hasard. De cette illustration réussie qui, bien qu’elle ne soit pas verte, renoue cependant avec cette fameuse disposition du nom et du titre à des angles opposés à ce "Higher Calling" qui de loin ressemble à l’un de ces canulars dont la bande avait le secret en passant par cette production massive et équilibrée (avec à la clef quelques marqueurs forts comme ces guitares à la fois abrasives et métalliques ou cette basse saturée et tout en rondeurs) signée Jeff Henson (Duel, Eyehategod, Spirit Adrift...), ce chant particulièrement bluffant de similitudes (sans pour autant chercher à jouer coûte que coûte la carte du mimétisme) et tout un tas d’autres gimmicks évoquant effectivement la musique des fameux Green Men (ces gros riffs plombés empruntés à Black Sabbath, ces quelques descentes de manches stridentes toujours un brin saccadées, ces nombreuses nappes de synthétiseur, ces cordes romantiques et autres notes de piano, ces sonorités gothiques évidentes, ce sens de la mélodie catchy et j’en passe...), on ne peut pas dire que l’animateur du podcast Big Riff Energy ait oublié quoi que ce soit (un petit coup d’oeil aux clips de "Lost Silver" et "They Look Like Shadows" et à leurs nombreux easter eggs finiront d’ailleurs sûrement de vous convaincre).
Si le parallèle avec Type O Negative ne fait donc aucun doute, Nathan Raleigh Garrett a choisi de porter son intérêt sur une période relativement spécifique allant grosso modo des albums Bloody Kisses à Life Is Killing Me. On va donc retrouver ce mélange de titres lents aux ambiances automnales, gothiques romantiques et mélancoliques ("Lost Silver", "It's All Over (For You)", "She's Drowning", "Promethean Gift") et de compositions faisant montre de davantage d’allant comme par exemple "LATW2TG" (en référence au titre "IYDKMIGTHTKY (Gimme That)") et ses saillies Stoner Rock ou encore le très bon "They Look Like Shadows" qui quant à lui n’est pas sans dresser quelques parallèles avec des titres aux entournures Pop tels que "My Girlfriend's Girlfriend", "I Don't Wanna Be Me", "I Like Goils" ou "Angry Inch". Une variété dans le propos de Neon Nightmare qui n’a rien de surprenant puisque les albums des New-Yorkais bien plus généreux en matière de chiffres (plus de titres proposés pour des durées bien plus conséquentes) sont eux aussi caractérisés par un sens de la nuance tout aussi prononcé.
Chercher à ressembler à Type O Negative est une chose, se montrer (presque) aussi efficace et convaincant en est une autre bien différente. À ce petit jeu pour le moins risqué, Nathan Raleigh Garrett s’en tire pourtant avec les honneurs et même peut-être davantage grâce à des compositions particulièrement bien ficelées qui de l’instrumentation riche et variée à l’exécution sans faille en passant par les arrangements soignés et ces mélodies entêtantes n’ont en effet aucun mal à convaincre. Il faut dire que s’il n’y a effectivement rien de nouveau dans ce qui nous est servi tout au long des quarante-et-une minutes de Faded Dream, on ne peut que saluer et même s’enthousiasmer de la qualité d’un tel hommage et du degré d’implication de sa tête pensante qui n’a effectivement rien laissé au hasard. En ce qui me concerne (et je ne suis a priori pas le seul à le penser), ce premier album est presque une bénédiction dans la mesure où j’avais fait comme tout le monde le deuil de Type O Negative (tout en écoutant encore régulièrement chacun de leurs albums) et qu’aujourd’hui c’est un petit peu comme si le groupe nous revenait d’entre les morts. En tant qu’éternel suiveur de part la chronologie des faits, Neon Nightmare n’égalera jamais le statut des New-Yorkais dans le coeur de ses admirateurs dévoués mais il convient néanmoins d’être juste à son égard et de saluer ce premier album avec un enthousiasme non feint, encore une fois parce qu’aucune formation avant elle n’avait aussi bien réussi ce genre d’exercice périlleux et tout simplement parce que ces sept compositions sont incroyablement bluffantes et convaincantes.
| AxGxB 5 Novembre 2024 - 539 lectures |
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