meth. - SHAME
Chronique
meth. SHAME
Ça fait toujours quelque chose de particulier quand on rencontre ce genre de disque. Le genre qui n’a pas de genre, à part l’impression de nécessité pour ceux qui l’ont créé.
Comment voulez-vous rendre compte, formellement, de la musique de Meth ? Dire que l’on est à la croisée de l’industriel, du noise rock, du mathcore et du metal extrême circonscrit de manière trop floue le style des Ricains. Même leur premier album, déjà fortement alien, ne laisse que peu d’indices sur la sauvagerie clinique, précise et chancelante (on est déjà dans l’oxymore), de Shame. Parler de Gorguts, Chat Pile, Portal et The Body, s’y référer et dire que l’on entend une réunion de ces quatre entités est déjà s’approcher un peu plus de ce que l’on a ici. Mais même là, l’essentiel s’échappe, ne se laisse pas attraper.
Meth est comme quelques-uns de ces nouveaux groupes où hardcore et metal ne sont pas tant des chapelles à vénérer que des moyens d’exprimer ce qui nous fait violence. Une violence que l’on souhaite transmettre à l’autre, dont on veut se libérer. C’est cela qui semble guider Shame plus qu’aucune autre intention : ce besoin viscéral d’expulser. Un peu comme dans le film Chromosome 3 de Cronenberg, à ceci près qu’ici, les névroses deviennent des morceaux non pas de chair, mais de musique. Excroissances ayant la forme de l’évidence, elles ont leur difformité propre mais ne tombent jamais dans l’originalité pour elle-même, le gadget fait pour retourner la tête, sans substance autre qu’une agressivité superficielle – pensée pour ces formations de mathcore extrême des années 2000 aussi rapidement oubliées qu’elles sont apparues. Non, les Ricains trouvent là-dedans un dénominateur commun, un mal-être – où le hurleur exprime notamment ses déboires avec la boisson – qui se vomit tel quel, avec la fluidité, l’urgence et la simplicité que l’on sait. Direct au caniveau.
Clairement, Shame s’adresse à ceux qui trouvent un plaisir à affronter ce genre de terreur toute personnelle car elle est un peu la leur. Ils n’y trouveront pas de catharsis cependant, à peine le réconfort d’une solidarité dans la chute. Dès « Doubt », le disque est intense et ne lâche rien, au-delà de quelques convulsions faisant office de variations (le début de « Compulsion » ou les progressions de « Give In » par exemple). Sérieux prétendant à l’œuvre la plus noire de cette année, il laisse toujours le cerveau embrouillé, essoufflé et époustouflé par tant de limpidité dans son mélange.
Pourtant, il faut bien le dire : pour tout impressionnant qu’il soit, Shame transmet un sentiment ambivalent. S’il n’est pas une coquetterie de plus d’une tendance au noir et au syncrétisme – tout cela est bien trop réel, bien trop sincère, pour être uniquement un effet de mode –, son empreinte n’est pas aussi forte que ce que l’on peut imaginer durant son écoute. Ces quarante-quatre minutes marquent puis s’oublient, revenant de temps en temps en mémoire comme une pulsion, horreur dans laquelle plonger avant de la ranger dans un coin de son esprit « jusqu’à la prochaine fois ».
C’est ce qui fait que j’ai du mal à m’extasier outre-mesure pour Shame : il est un album qui ne s’adresse pas à tout le monde, tout le temps, et qui ne le cherche pas, un album qui semble avoir été fait avant tout pour ses créateurs, d’autres y trouvant accidentellement quelques-uns de leurs propres démons. Si ce genre de confrontation vous intéresse, Meth est tout indiqué.
| lkea 3 Novembre 2024 - 462 lectures |
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