Peut-être me faut-il voir This Gift Is A Curse pour ce qu’il paraît de plus en plus être : un groupe qui a capté, un peu par hasard et un peu par talent, une certaine époque.
Un état de grâce qui aura duré le temps d’un EP annonciateur et un album et demi, le génial
I, Guilt Bearer et le moins définitif mais beau dans les flammes
All Hail the Swinelord, la magie des aléas dans des mains d’orfèvre. L’expertise, elle, est d’ailleurs toujours de mise sur
Heir. Six ans séparent ce nouvel album de son prédécesseur, le décevant
A Throne of Ash ; cette pause semble avoir été bénéfique à la bande pour retrouver une boussole que l’on sentait perdue – courant dans tous les sens au point de quitter l’auditeur de vue.
Heirs renoue donc avec ce goût pour la lourdeur, les climats savamment posés, le travail finement ciselé, qui avaient permis à
All Hail the Swinelord de se démarquer de son illustre aîné. La durée de l’ensemble ne laisse aucun doute à ce sujet : bien que toujours pourvoyeur d’instants raides, typiquement black metal (« No Sun, Nor Moon » ; « Death Maker » ; « Vow Sayer »), le projet se laisse plus aller à la contemplation du paysage. Effectuant un saut dans le passé, les Suédois donnent l’impression de vouloir nous faire oublier
A Throne of Ash tant ils composent ici une suite logique à leurs deux premiers longue-durées.
Sauf que ce vide de dix ans ne se vit pas sans laisser de traces. Autrefois nouveau venu rapidement (trop ?) porté aux nues comme maître de ce syncrétisme (post) hardcore / black metal alors encore en vogue, il laisse aujourd’hui un goût étrange en bouche. Tout est en place, divertissant à défaut d’être prenant, les bonnes idées s’accumulant même dans des parties ambient qui ne font pas que de la figuration (le début de « Void Bringer » ; « Passing » ; « Cosmic Voice »). On retrouve cette atmosphère occulte caractéristique, brûlante et possédée, mais dont on se tient désormais un peu extérieur, étrangement calme malgré les instruments se matraquant et Jonas A. Holmberg s’égosillant. Une distance que je ne parviens pas à réduire, en dépit de la joie de départ de retrouver This Gift Is A Curse tel qu’il nous avait quittés avec
All Hail the Swinelord.
Peut-être est-ce dû à ces particularités, peu présentes sur la forme mais notables dans l’appréciation générale, que contient
Heir. S’assumant comme descendant, il prend des traits de ses ancêtres tout en les mimant avec un peu trop de d’application. Frôlant le machinal, il sonne plus d’une fois convenu dans ses sauts d’un style à un autre (les changements de vitesse se devinent rapidement), l’accroche des mélodies ou coups de sang rattrapant de justesse cette routine trop marquée. Le sentiment en naissant est celui d’un satanisme enfiévré mais aussi étrangement tranquille malgré la violence de surface – qu’il ne s’agit pas de minimiser, cf. « Kingdom » ; « Seers of No Light » ou même l’immolation finale « Ascension ». La sincérité n’est pas remise en cause ; elle se vit comme une présentation d’une foi plus que son application, le petit frisson faisant la différence étant malheureusement absent de cette grosse heure.
Entre maîtrise et conformité, originalité de forme et classicisme de fond, authenticité et manque d’implication, il y a de quoi voir le verre à moitié plein ou à moitié vide selon la sensibilité de chacun. Ce qui est sûr, c’est qu’il n’y a pas assez à boire sur ce nouvel album de This Gift Is A Curse, certainement pas honteux mais clairement pas à la hauteur des débuts des Suédois. Au point de penser que
Heir appartient à hier.
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