Comment décrire «
The Contagion in Nine Steps » ? Toujours plus haut perché. De plus en plus progressif et expérimental. De moins en moins
black metal aussi, il faut l’admettre, aussi fumé soit-il. Ce troisième album vient achever le travail initié sur «
An Antidote for the Glass Pill » (2015) en proposant six longs titres (entre quatre et presque neuf minutes) qui accentuent ce qui ne se dessinait alors qu’à traits fins : encore moins de musique extrême au sens où l’entendait le premier éponyme, davantage de complexité dans les jeux de guitares qui se croisent, se cherchent, semblant vivre des existences dissociées, davantage d’orgue également, instrument central et moteur dans les compositions des Anglais. Plus que jamais
LYCHGATE m’apparaît comme une adaptation sérielle du long métrage que serait
ESOTERIC.
Je le pense, cet accroissement de la complexité des structures aux métriques étranges rend définitivement l’écoute de la formation anglaise peu évidente, surtout pour des oreilles débutantes. Nous aurons beau tenter de nous accrocher aux quelques voix claires donnant un semblant d’image de normalité, il faudra être bien malin pour pouvoir suivre à la trace un titre tel que « Unity of opposites » dont les circonvolutions t’entrainent sans torche au fond d’une grotte obscure et te laissent y crever sans remords. J’entends bien que ces musiciens n’ont jamais été particulièrement friands de la formule standardisée « couplet – refrain », ce n’est d’ailleurs absolument pas ce que l’on attend d’un disque de
black expérimental mais, à ce point de déconstruction que l’on pourrait comparer au
jazz (le jeu de basse n’a par exemple rien de
metal, ni de près ni de loin), couplé à des plongeons à répétition dans les marais saumâtres des tempos
doom, tout en ne dévoilant son humanité qu’à travers des chants en route vers la sainte canonisation (la beauté des voix claires…), il est plus que jamais une gageure d’adhérer à la vision musicale des Anglais, dont la bizarrerie ne cesse de croître au fil des ans.
Pourtant, écoute après écoute, le constat demeure le même : le sentiment supérieur d’écouter une musique unique où la place accordée au chant est désormais prépondérante. D’ailleurs, pour épauler
Greg Chandler, le groupe s’est adjoint les services de deux invités :
Chris Hawkins (
ENDEAVOUR,
ONE MACHINE) et
Alexandros Antoniou (
MACABRE OMEN,
NECROMANIAC,
THYRATEN). Cela transforme le LP en une sorte de polyphonie vocale mais il fallait bien cela pour coller un peu de chair autour du labyrinthe instrumental autrement proposé. Pour tenter de l’expliquer autrement, plus la discographie de la formation s’étoffe, plus celle-ci s’enfonce dans un élitisme dont le rejet serait compréhensible mais qui ne fera pas pour autant oublier à quel point ces instrumentistes géniaux s’efforcent de transcender le genre
black doom pour lui insuffler la richesse du
rock progressif, le goût de l’expérimentation sans le bourrage de mou nombriliste des groupes ultra techniques… Je m’y perds un peu, dans mes explications, comme je me perds dans cette accumulation de solos posés sur d’autres solos devenant finalement une rythmique, avec une section basse – batterie s’entraînant pour intégrer un concept
dark jazz, les vocaux animant nos funérailles, louant notre grandeur puis pleurant nos honteuses bassesses, tout étant uniquement redevable au guitariste
Vortigen, parolier et compositeur unique… Tant de talent, ça en devient écœurant, je jalouse sans amertume aucune une telle inspiration, j’admire le génie, je fonds face à l’angélisme de « Remembrance ».
Pour finir, il sera possible aux auditeurs d’aduler autant que de détester
LYCHGATE. Les fans de
black soigné pourront chérir le premier et conchier les suivants, les plus intellectuels se féliciteront de l’évolution quasi philosophique de la musique, qui a su transcender ses origines extrêmes pour aboutir à une fusion irréelle qui remet en perspective les concepts de qualité, d’innovation, de personnalité, tout en restant dans une clandestinité ahurissante. Je ne parviendrai pas à écrire quoi que ce soit d’intelligent sur ce groupe si ce n’est que son positionnement est nécessaire, exigeant, que l’on sort de l’écoute de «
The Contagion in Nine Steps » avec l’illusion d’avoir regagné les points de QI perdus au bar la veille et qu’au moment où je termine ces lignes il me reste encore à traiter «
Also Sprach Futura », un EP qui ne m’avait pas marqué lors de sa sortie mais que j’ai sans doute écouté à la va-vite, comme un pauvre con.
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