Trepalium - Alchemik Clockwork Of Disorder
Chronique
Trepalium Alchemik Clockwork Of Disorder
Trepalium - voilà bien un groupe dont je n'attendais rien de spécial. Les chroniques mitigées de leur premier album chez Holy Records m'avaient conduit un peu vite à ignorer ce groupe, et là … BAM, prends toi un « Alchemik Clockwork of Disorder » dans la face Cyril, ça t'apprendra à ne pas avoir essayé de te faire une opinion par toi-même !! Mea culpa, mea culpa maxima : Trepalium, c'est l'une de ces jeunes pousses du metal couillu hexagonal qui participent ces dernières années à sortir la France du Tiers-Monde metallique où elle croupissait, et qui montrent que les froggies en ont aussi sous l'ampli !
Alors Trepalium, quoi donc que c'est ? Vu le nom (et le genre indiqué en haut à droite de la chro), les plus fins auront compris qu'on est loin de Bon Jovi : c'est du bon death metal du terroir qui nous est servi ici. Pas de la galette hamburger-esque importée de Tampa, pas de la rondelle Ikea de Göteborg, non, un metal groovy qui sent bon l'indépendance, qui fait claquer des doigts autant que craquer la nuque, une zique qu'on sent un peu à l'étroit dans ses baskets death et les règles figées du genre et qui balance un bon coup de latte dans le conformisme d'une scène qui a un peu trop la tête dans le "kvlte" et qui se regarde un peu trop le "trve" ... Hum, on me fait signe à la régie que je n'ai pas le droit d'aller plus loin. Ne nous égarons pas trop loin dans ces contrées obscures et malodorantes … et recentrons-nous un peu sur le propos tenu par le quintette poitevin : c'est donc un death original qui sort des enceintes quand nos gaillards s'emparent des instruments. Les bases du genre sont respectées à travers un chant guttural de rigueur, un mur de grattes qui alignent régulièrement les plans rythmiques dits du hachoir (découpage en fines tranches garanti dans « Modus Operandi », « Vesania », la fin de « Ritual » …), des blasts et de la double aux moments opportuns … Oui mais ce n'est pas tout. Le chant suit en effet une dynamique propre, souvent décalée, légèrement théâtrale. Les grattes marient mélodies torturées et rythmiques à la Meshuggah avec une grosse dose de groove, voire de feeling jazz. Ce mélange juteux est enrichi d'un orgue Hammond discret mais qui laisse sa patte (« Decease my life », « One breath of Peace » ), d'une batterie zébulonesque toujours en train de sautiller ou de blaster dans tous les sens, d'une basse tout le temps présente … et surtout d'une personnalité forte, d'où ressort une impression de folie douce et de joyeux bordel.
Il semblerait que par le passé, on ait reproché à Trepalium d'avoir trop singé ses compatriotes de Gojira : s'il faut aujourd'hui encore trouver un point commun avec les Landais, on ne pourra guère que citer la personnalité musicale forte du groupe, et une tendance à repousser les frontières classiques du death. Du nom de Meshuggah cité plus haut, il ne faut retenir qu'une certaine volonté de ne pas chercher la facilité en matière de composition, de mélodies et de rythmiques. Le groupe ne prend pas à rebrousse-poil l'auditeur - comme aiment à le faire beaucoup des groupes qui dissonent à tout va. Non, les cassures rythmiques sont astucieuses, les mélodies sont … mélodieuses. Et ce qui est fantastique au final, c'est que Trepalium écrit de véritables chansons : appelez-moi le Michel Drucker du death, mais j'aime quand un album propose un ensemble de titres distincts, mémorisables, entraînants, avec des ambiances et des personnalités propres … et c'est bel et bien le cas ici. Je ne parle pas du truc bateau avec couplet, pont, refrain, couplet, blablabla … non, je parle d'entités musicales cohérentes et fortes.
Pour moi, la marque de fabrique de Trepalium, ce sont des morceaux comme « Modus Operandi » - un bon gros hit bien rentre dedans représentatif de ce que le groupe fait de mieux - , « Decease My Life » - plus vicieux mais tout aussi efficace -, « Vesania » - avec son côté Rock'n'Roll qui allie dynamique fonceuse à sautillements guitaristiques et bassesques -, ou encore « Who's fucked up ? » - monstre de mid-tempo groovy qui lâche des salves jouissives de guitares de bûcherons vers le milieu du morceau.
A côté de ce matos calibré, le groupe a pondu un (autre) hit – d'ailleurs distingué par un clip de toute beauté – avec « Sick Boogie Murder » : le groupe arrive en l'espace d'un titre à placer une ambiance cabaret d'entre deux guerres, une rythmique death/thrash franche du collier, une dynamique jumpisante, un passage de scat délirant soutenu par un saxo psychotique … le tout de manière merveilleusement cohérente et jouissive. A noter encore l'excellente fin de « Ritual », tuerie de puissance rampante semblant mettre en musique l'avancée d'une coulée de lave réduisant en cendres un paysage apocalyptique … nom de Dieu que c'est bon !!!
Bref, « Alchemik Clockwork of Disorder », pour moi, ça a été un uppercut en pleine poire qui sera arrivé sans crier gare. S'il fallait une dernière fois décrire la musique de Trepalium via une comparaison lapidaire qui tiendrait sur un sticker, j'oserais un «croisement jazzy de Illdisposed et Meshuggah à forte personnalité» forcément réducteur, mais qui finira – je l'espère - de convaincre les derniers indécis. Trepalium, c'est de la bomb(-hard … jeu de mot) bébé !!
| cglaume 19 Mars 2007 - 3259 lectures |
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