Fichtre, ça fait déjà un an que je dois faire la chronique du dernier Canvas Solaris ! Après un excellent
Cortical Tectonics paru en 2007, les américains sont revenus seulement un an plus tard avec ce
The Atomized Dream, qui comme son prédécesseur fait dans le metal fusion, avec une forte influence Cynic. C'est un style encore assez neuf dans l'univers du metal, mais il ne faut pas oublier que Exivious a depuis sorti un album dans un style similaire, qui a lui aussi une forte influence Cynic, assez logiquement vu que la moitié du line-up joue dans les deux groupes ! Mais revenons à Canvas Solaris : formé en 2000, le groupe n'a pas tout de suite été instrumental, bien que ce fût le cas dès son premier album,
Sublimation, sorti en 2004. Après la sortie de
Penumbra Diffuse, le groupe vit le départ du bassiste d'origine, Jimmy McCall. Hunter Ginn et Nathan Sapp se sont alors entourés de nouveaux musiciens, dont Donnie Smith au synthétiseur analogique et Chris Rushing à la basse. Ce tournant dans l'histoire de Canvas Solaris allait marquer à jamais la musique du groupe, qui prit un virage plus fusion, laissant de plus en plus de place aux passages fusions, et atténuant d'autant le côté metal.
En cela,
The Atomized Dream est la suite logique de
Cortical Tectonics : moins direct, moins rapide, laissant une place bien plus grande aux passages extrêmement calmes faisant penser aux « Tubular Bells » de Mike Oldfield ou au Mahavishnu Orchestra de John McLaughlin. On retrouve sur cet album beaucoup moins de passages comme le début de « Berserker Hypothesis » ou la quasi-intégralité de « Gamma Knife » qui faisaient clairement penser à un Sapstic Ink moins fou que celui sorti de l'esprit dément de Ron Jarzombek.
Évidemment le maître mot de Canvas Solaris reste mélodie, vous ne trouvez ici pas plus que sur les précédentes réalisations du groupe des passages épurés en couches instrumentales diverses : les tempos restent changeants, les cassures nombreuses, et les mélodies encore plus étoffées que le que le tableau de chasse de Carla Bruni. L'évolution n'est pas gigantesque mais les surprises comme la rythmique à la fin de « Photovoltaic » qui me fait énormément penser à du Nirvana (au détail près du contretemps pernicieux qui intervient régulièrement) suffisent à ce que l'on ait pas l'impression d'écouter une vulgaire resucée de
Cortical Tectonics.
Pour peu donc que vous ayez aimé le précédent album, vous devriez aussi apprécier
The Atomized Dream, qui fait plus que jamais penser à « Textures » de Cynic (et non pas à ce groupe hollandais de seconde zone). Il n'y a qu'à écouter le début de « The Binaural Beat » pour comprendre que l'écoute de cette œuvre est semblable à un voyage dans une dimension de paix et d'apaisement sur un matelas de plumes légères. Canvas Solaris propose une musique plus aérienne que jamais, jouant vingt fois plus sur le ressenti et l'émotion que sur l'efficacité. Preuve en est que la première apparition d'un passage un peu metal (et de la première distorsion des guitares du même coup) n'intervient que quelques secondes vers 3:30, et laisse le morceau se finir comme il a commencé. Il ne faut toutefois pas négliger la qualité de ces riffs plus véloces et complexes, qui laissent pantois d'admiration non seulement par la technique qu'il faut pour les jouer mais aussi par le fait qu'ils soient étonnamment efficaces alors que l'on peut aussi les qualifier de « beaux ». C'est bien en effet la beauté des mélodies, la légèreté des ambiances, la profondeur de l'univers du groupe et la sensation de dépaysement ressentie à chaque écoute qui sont les intérêts de
The Atomized Dream, loin devant la technique pourtant omniprésente et nécessaire à l'établissement d'une telle entreprise. Difficile de faire ressortir un morceau au détriment des autres, tous sont d'une égale qualité et possèdent leurs charmes, depuis les riffs bondissants de « Heat Distorsion Manifest » ou les ambiances feutrées de « The Binaural Beat » jusqu'aux contretemps totalement assassins de « Solar Droid » qui laissent place à une cacophonie de guitares et de basse. L'apport conséquent du clavier et de divers samples imprègnent l'album d'une personnalité totalement unique, qui laisse présager un magnifique futur pour le groupe.
Même si j'adore
The Atomized Dream qui me transporte à chaque écoute, je lui préfère le contraste de
Cortical Tectonics qui proposait aussi bien des morceaux montés sur ressorts comme « Berserker Hypothesis » que de superbes moments de répit comme le début de « Sinusoid Mirage ». Mais ce n'est pas là une raison pour pénaliser l'opus en terme de notation : il est d'une qualité et d'une durée similaires à celles de son prédécesseur, et explore une voie certes un poil différente, sans que jamais le groupe ne se perde en chemin ou ne trahisse son esprit. Il m'est impossible de départager les deux albums, qui possèdent leurs personnalités et leurs qualités propres, et si le groupe continue sur sa lancée, je crois bien que ce sera encore le cas pour le prochain album qui devrait arriver dans les mois qui viennent. En attendant écoutez
The Atomized Dream, c'est un voyage autrement plus intéressant et prenant qu'un week-end en Picardie.
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