Graveland - Thousand Swords
Chronique
Graveland Thousand Swords
Le deuxième album de GRAVELAND, sorti en 1995, s'intitule Thousand Swords et a pu inspirer nombre de combos pratiquant aujourd'hui ce qu'on appelle couramment « Black Metal Païen ». Cette étiquette revient à tout bout de champ quand il s'agit de groupes comme GRAVELAND en premier lieu, groupe qui est lui-même inspiré par le compositeur Quorthon de l'entité BATHORY. Thousand Swords, album mythique s'il en est, est une bonne illustration de ce que l'on désigne couramment par « Paganisme », notion qui prend ici un double sens : musical, d'une part, avec le développement d'une musique aux relents « folkloriques » exprimés par des claviers habilement parsemés, jouant des airs inspirés par le panthéon mythologique nordique, notamment, et idéologique, d'autre part : le visuel, les paroles tournent autour du thème de la « vengeance », de la « revanche » : la restauration des polythéismes anciens ravagés par le christianisme, un des chevaux de bataille du compositeur de la musique et des paroles de ce groupe mythique, Rob Darken. Associé au batteur Capricornus (INFERNUM, THOR'S HAMMER) depuis 1993 et ce jusqu'à Immortal Pride en 1998, l'homme derrière GRAVELAND développe avec son groupe une idéologie empreinte d'occultisme « völkisch » et de nationalisme, exploitant un artwork sulfureux très guerrier, avec une référence au visuel viking, et produit une musique retranscrivant cette ambiance guerrière et épique exprimée par un Black Metal des plus haineux, comme sur ce Thousand Swords dans lequel l'idéologie prend une grande place.
Et cette idéologie sert d'une façon très appréciable la musique : catalysée par la haine viscérale que veut exprimer Darken à travers ses paroles primitives ("Blood Of Christians On My Sword", "Black Metal War"), véritables « harangues » aux guerriers anciens invoqués ici par le compositeur, elle se veut violente, épique, et représente à merveille une atmosphère de batailles légendaires face au « christianisme » contre lequel s'élèvent les 9 morceaux de cet album. Un album plein de spontanéité et de fougue, sa production restant plutôt précaire, à l'image du son assez grésillant des guitares de Darken ou du son assez peu travaillé de la batterie de Capricornus.
Un son assez « true » en somme, pouvant faire reculer l'auditeur non habitué ; mais ce son « précaire » a un réel charme à mes yeux et restaure dignement une ambiance « jouissive » en matière de Black Metal, celle des années 1990 et des productions « petits bras ». De plus, ce son donne à l'album un aspect « naturel », faisant ressortir toute la mélodie très pregnante de ses compositions ; en effet, pas besoin de grands moyens pour aller à l'essentiel, avec cet album dans lequel une ambiance « païenne » judicieusement exprimée par des claviers habiles pénètre nos cages à miel, qui en redemandent. Dans ce Thousand Swords le multi instrumentiste qu'est Darken n'abuse jamais de cet instrument qu'il use avec parcimonie et raison : comme exemple révélateur, les quelques touches de cuivres au début de « The Time Of Revenge » associées à une certaine mélancolie jouée à la guitare viennent réellement séduire l'auditeur, qui ressent avec la présence du cor une ambiance ressemblant à un véritable « appel » guerrier de la part du groupe. La guitare a elle aussi un côté séduisant, recherchant toujours une osmose entre mélodie et primitivité, privilégiant un côté Black Metal primitif inspiré par les premiers BATHORY mais cherchant aussi, et c'était relativement novateur à l'époque, une mélodie sonnant « folklorique », comme sur « The Dark Battlefield » où le charme « païen » de cet album est poussé à son paroxysme avec sa mélodie transcendante, qui ne s'essouffle pas une seule seconde. Les plans de guitare de Darken s'aventurent aussi vers une forme de mélancolie lorsque débute le premier arpège de l'album, celui de « Blood Of Christians On My Swords», après une intro par ailleurs bien travaillée sans égaler pour autant la magnifique intro de l'album précédent, Carpathian Wolves. La voix de Darken est quant à elle assez caverneuse, assez étouffée et grave pour une voix Black, mais ayant toujours en travers de la gorge un cri de haine à pousser, comme dans le morceau « The Time of Revenge » ou des cris aigus remplis d'une haine viscérale, revenants à plusieurs reprises, apportent une ambiance malsaine fort appréciable là encore.
Cette fougue toujours perceptible a néanmoins quelques défauts, que l'on peut bien sûr voir comme des défauts de jeunesse : la batterie de Capricornus, notamment, a un aspect très « amateur », se perdant parfois dans des breaks hasardeux et pas vraiment calés. Les compositions, s'ils elles ont chacune une réelle puissance émotionnelle et s'ils elles ont, prises individuellement, un attrait qui les différencient les unes des autres, ne sont pas forcément très variées. Mais la musique de GRAVELAND n'est pas forcément très variée de toute façon, même si cet aspect a pour énorme avantage de ne jamais décevoir le fan. Et cet album se situe, en prenant en compte cette perspective, en haut du panier dans tous les cas.
En outre, certains clichés ne sont pas évités : un clavier aux airs certes « païens », entrainants, mais ayant, je pense, pour d'autres oreilles que les miennes, un aspect emphatique et clichesque : je pense aux airs épiques qui ne feront sans doute pas taper du pied tout le monde, même si cet instrument est encore une fois réduit à un aspect minimaliste. En définitive, GRAVELAND sera toujours un groupe qui plaira aux fans tout en laissant les autres de côté, sceptiques, voire même moqueurs. Et cet album, s'il fait largement partie des meilleurs du groupe, n'échappe pas à cette règle tyrannique. Un album à posséder pour les fans, à découvrir pour ceux qui ne sont pas encore conquis par le groupe et méprisé par les incultes.
| Voay 22 Mars 2010 - 4461 lectures |
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