I Don't Care Where I Go When I Die nous avait laissé les genoux sur le sol et cul nu, sévère déculottée arrivée sans prévenir. La suite était attendue fébrilement, Gaza ayant cette rage que l'on n'avait plus entendue depuis les grands moments du hardcore chaotique des années 90, cette force destructrice ne ménageant pas ses coups, balançant sa haine telle quelle et tant pis pour le reste, il y aura droit aussi ! Donner un second souffle à cette baston ne semblait pas chose aisée et c'est avec surprise que l'après… déçoit.
Pas parce qu'ils ont dégraissé le mammouth, loin de là. Il a été gonflé aux stéroïdes d'une production enfin à la hauteur des aspirations poisseuses et puissantes du groupe. Boursouflé à outrance, le pauvre ne peut que ratiboiser en trainant ses couilles sur le gazon. Plus bas que ça, y a la Chine ! Les titres « How It Is. How It's Going To Be. » et « Bishop » sont terrifiants de lourdeur, Gaza choisissant de réduire les plans mathcore et grind, utilisés désormais avec parcimonie (apparitions fugaces sur « Windowless House », « Tombless » ou « The Meat Of A Leg Joint »), pour offrir de la hargne rampante concentrée. Il s'étale moins sur la durée, plus dans les riffs, l'album pouvant être vu comme un monolithe avec quelques incursions ambiant ou clins d'œil entre les morceaux s'occupant de donner du liant à l'ensemble (« The Historian » et sa partie renvoyant à « How It Is. How It's Going To Be. » ou la pause « The Anthropologist »). Le chant de Jon Parkin en est la preuve : les couinements hystériques et autres beuglantes lâchées jusqu'à l'essoufflement ont laissé place à un grognement monocorde renforçant la gravité des compositions. Moins fou-fou, plus réfléchis, le déglingué étant remplacé par la frontale batte cloutée, les américains sortent les poings avec l'ambition de marquer au fer-rouge l'auditeur et la scène (pari réussi, cet album ayant été globalement bien accueilli).
Parcimonie, moins fou-fou, réfléchis… Tu vois le problème. Gaza baignant dans le cholestérol, l'idée a de la gueule, seulement du coup ça brûle moins de calories. Les Ricains en veulent toujours mais la passion qui les animait semble un peu fatiguée, contrôlée, au risque de se répéter, voire carrément d'ennuyer (le dernier morceau, se voulant la lueur blafarde au bout du tunnel et virant vite au sous-Isis). C'est bien ce qu'il manque ici : là où le combo se donnait auparavant en entier, la colère faisant accepter sans problèmes quelques possibles baisses de régime, ces dernières apparaissent trop à la lumière de ces guitares linéaires, timides comparées à un « Sire » par exemple. Le batteur déstructure encore le propos mais l'impression générale est que le savoir-faire est plus sûr de lui et la folie s'est faite la malle. On avait misé gros sur eux,
He Is Never Coming Back donne la gueule de bois avec son côté gras bien que finalement trop léger, accessible d'emblée, vite consommé, pas inoubliable et un sentiment tenace d'inachevé parcoure sa traversée (le revers de la médaille : à trop appuyer, ils finissent par rabâcher). Gaza est juste un bon groupe parmi d'autres.
Facile et difficile de dire ce qu'il manque à cette œuvre par rapport à son illustre prédécesseur. Si l'on peut regretter la schizophrénie du premier album, critiquer l'absence de spontanéité, il faut avouer que
He Is Never Coming Back offre son lot de passages impressionnants, tant l'on est soufflé par la violence des premières écoutes. Sur la longueur, la galette ne tient pas toutes ses promesses et l'on a envie de retirer ses billes, un peu à la hâte même si le départ d'un des membres (Luke Sorenson, qui composait les parties mathématiques des morceaux et s'occupe désormais à rendre viable la dream team Feminist) ne donne pas beaucoup d'espoir. Un album dont le plus gros défaut est d'être sorti après
I Don't Care Where I Go When I Die.
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