Acherontas - Theosis
Chronique
Acherontas Theosis
ACHERONTAS est un groupe qui a fait son petit bonhomme de chemin dans la scène grecque. D'abord connu sous le nom STUTTHOF dès 1996, les héllènes versaient dans un Black Metal atmosphérique et déjà occulte, toujours très travaillé et bien souvent très bon. Leur son bien sale reflétait à merveille leur musique, qui appartenait alors au penchant « traditionaliste » du Black Metal. Puis ils ont évolué, à plusieurs titres, en devenant ACHERONTAS : moins « provocateurs » et par la même plus concentrés sur l'essence même du Black Metal : le Démon. Un bon premier jet confortait leur choix en 2007, avec Tat Tvam Asi (Universal Omniscience).
Il y a des groupes comme ça qui en changeant de nom du jour au lendemain, changent aussi d'orientation musicale, ce qui leur vaut souvent l'éternelle étiquette de « c'était mieux avant » : on peut d'ores et déjà dire qu'ACHERONTAS s'arrache violemment cette étiquette du front et lève son majeur bien haut à ceux qui voudraient les amener à ce raisonnement avec ce Theosis de 2010 tout bonnement dévastateur.
Tout d'abord, ACHERONTAS a fouillé dans ses vieux grimoires occultes pour nous livrer un concept qui se marie excellemment bien avec leur Black Metal « religieux » : ici la notion de péché et l'occultisme satanique sont alliés à une glorification de la mythologie grecque et de ses propres démons. De plus, nombreuses sont les références à la philosophie, avec à la louche Socrate, Platon et Aristote. Le patrimoine grec antique, exploité mainte fois dans la sphère métal, est ici parfaitement assimilé. Cette osmose, notamment illustrée par quelques passages déclamés en grec ancien, fonctionne à merveille tout le long de ce Theosis. Quant à leur musique, d'aucun la qualifieraient de Black Metal orthodoxe et il y a certes de cela, à l'image de cette noirceur bien palpable associée à une aura mélodique toujours sous-jacente. Oui, évidemment, le vieux WATAIN est présent ici sans pour autant être envahissant. Comment ne pas y penser dès le premier titre de l'album « Pestilence Of Mortality » ? Une première salve de brutalité véhémente dans laquelle le blast vigoureux valorise un trémolo très inspiré puis se dirige de manière très habile un passage contemplatif d'une grande classe qui annonce la fulgurante inspiration d'ACHERONTAS durant tout l'album.
Les instruments sont parfaitement maîtrisés et idéalement mis en valeur par une production limpide. Et quelle basse, mes aïeux ! Cet instrument ressort vraiment bien du mix. D'une part elle se distingue parfaitement des guitares en créant véritablement quelque-chose de son côté et en étayant la lourdeur jouissive du son des héllènes. Par moments, Akhkhar va même jusqu'à utiliser la technique du slap (on a un bon exemple avec l'excellent « The Oath Of The Fealty », ou elle pulse étonnamment bien dans le paysage général), véritablement rare dans le Black Metal, et le résultat n'en est que meilleur, puisque cette innovation (on peut le dire) amène un effet « tribal » au rendu général, renforçant le concept mythologique que les grecs s'approprient à merveille. C'est une des rares fois ou je m'attarderai dessus, mais ici, le concept et la musique réalisent un mariage parfait, et pour cette raison je tire mon chapeau aux grecs qui réalisent à ce niveau un coup de force proche des célébrissimes français de DEATHSPELL OMEGA.
Pour ce qui est du contenu de leur opus, ACHERONTAS déploie les grands moyens : tantôt dissonante, tantôt mélodique, leur musique est toujours très prenante. Une volée de passages très poignants et classieux sont apposés à une brutalité jamais sacrifiée et ainsi façonne un ensemble varié, solide et quasiment inattaquable. Seules quelques longueurs sont à déclarer : par moments les grecs sont prisonniers de structures obsédantes et efficaces qu'ils emploient à outrance, mais toutefois rien qui ne gêne la perception globale de l'album. Mais attention, taxer ces héllènes de répétitifs seraient une erreur grossière, leurs compositions ne s'essoufflent que très rarement et surtout, abolissent toute répétition envahissante en changeant régulièrement de tempo, à l'image du break aux guitares acoustiques sur la piste éponyme, très convaincant car totalement inattendu !
A l'image de quelques morceaux anthologiques, comme le monumental « Legacy Of Tiamat », véritable apogée de cet œuvre, les méditerranéens laissent s'exprimer pleinement leur talent sur des passages vraiment poignants, avec des soli très bien exécutés ou des « invocations » en grec ancien… « Invocations » que l'on retrouve sur des interludes très bien réussies. Là ou d'autres groupes seraient taxés de « remplissage », ACHERONTAS renforce avec force son ambiance pesante et lourde. Anthologique, le passage contemplatif sur « The Wing Skull Rising » l'est aussi, en venant insérer une certaine nostalgie à l'ensemble, les soli de ce morceau transpirant la mélancolie sans pour autant tomber dans le pathos. Et le groupe, à peine ce type d'accalmie achevé, repart de plus belle et nous démontre à chaque morceau que leur musique est intense en émotions et surtout en travail. Ce disque transpire une telle dévotion par chacun de ses pores que sur chaque note de l'album, on sent une authentique religiosité… et par la même le combo instaure une ambiance de folie quasiment permanente, occasionnant une bonne transe des familles à l'écoute de cet album, ravageur de bout en bout par sa classe et son panache.
ACHERONTAS vient donc, malgré quelques défauts bénins, botter vigoureusement le cul de tous ces vieux barons du Black Metal –orthodoxe et autres- qui vivent sur leurs acquis et foutre un véritable coup de pied dans la fourmilière, sans innover, non, mais en exposant à la face de la scène son Black Metal des plus racé. Si on pouvait légitimement s'attendre à un tel album de la part des héllènes, tant le précédent et les choses accomplies sous leur précédent nom promettaient, l'effet boeuf produit par la tuerie Theosis reste intact. En définitive, on tient là une grande sortie en cette faste année 2010 et sans doute le meilleur album de ce combo toutes périodes confondues.
Un 8,5 qui lorgne dangereusement du côté du 9.
| Voay 13 Décembre 2010 - 3357 lectures |
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