Travailleur forcené que rien n’arrête, même pas une pandémie mondiale, Nightwolf continuait en 2020 sont petit bout de chemin avec Runespell, ce one-man band particulièrement productif qui depuis 2017 et ses premiers balbutiements n’a encore jamais tiré à blanc (à chaque année sa sortie). Pour l’occasion, celui-ci est revenu accompagné du groupe Forest Mysticism, autre formation australienne menée là aussi en solo par un certain D. (Woods Of Desolation, Remete...). Intitulée
Wandering Forlorn, cette collaboration qui n’en est pas vraiment une puisque chacun y joue ses titres de son côté, a vu le jour encore une fois sous l’étendard du label Iron Bonehead Productions. Une sortie qui pourrait sembler modeste mais qui du haut de ses six titres culmine tout de même a plus de trente-sept minutes.
Arborant un artwork lumineux qui semble vouloir s’éloigner des thématiques médiévales et viking chères à Nightwolf,
Wandering Forlorn voit chaque entité nous offrir trois nouveaux morceaux parmi lesquels deux interludes instrumentaux intitulés "Streams Of Sorrow" (Runespell) et "Rivers Of Silver (II)" (Forest Mysticism).
Habitué jusque-là à revoir et à modifier légèrement sa copie à l’occasion de chaque nouvelle sortie, Nightwolf va se contenter pour une fois de reprendre les choses là où il les avait laissé précédemment sur le très bon
Voice Of Opprobrium. Malgré cela, on pourra tout de même remarquer que la production, si elle conserve son aspect dépouillé et parfaitement lisible, diffère quelque peu de ce qui était proposé sur le troisième album du groupe en optant ici pour une approche plus feutrée et moins aérienne.
C’est avec "Wolfwoods", titre fleuve de plus de dix minutes que l’Australien lance les hostilités. Sur ce format particulièrement étiré, Nightwolf va faire la démonstration de tout son talent, alternant séquences instrumentales aux atmosphères nocturnes envoutantes (de la première seconde jusqu’à 0:48 puis de 6:50 jusqu’à 7:27), passages relativement rapides relevés par de superbes mélodies à la fois épiques et poignantes (à partir de 1:11 et ce pendant plus de trois minutes), moments plus en retenu qui à leur manière vont apporter un peu de contraste, autant d’un point de vue dynamique que d’un point de vue mélodique (de 4:53 à 5:26 puis de 5:45 jusqu’à 6:20) auxquels vont venir s’opposer quelques brèves accélérations particulièrement franches (de 5:26 à 5:45 puis de 6:20 jusqu’à 6:38). Cette formule, Nightwolf va l’appliquer ensuite plus ou moins partiellement sur les deux autres morceaux offerts ici. Ainsi avec "Streams Of Sorrow", l’Australien fait le choix d’un titre instrumental et acoustique qui va permettre naturellement de mettre l’accent sur ces atmosphères contemplatives, nocturnes et boisées évoquées un peu plus haut avant de reprendre finalement du poil de la bête le temps d’un "Fated In Blood" entêtant et épique à souhait avec notamment ses superbes mélodies aux forts accents Heavy Metal et cette dernière partie plus dynamique.
La suite, c’est Forest Mysticism qui s’en charge avec un Black Metal assez peu éloigné de celui proposé par Runespell. En effet, l’Australien originaire de la région de New South Wales verse également dans un Black Metal atmosphérique ayant quant à lui pour principaux thèmes la nature et la forêt dans ce qu’elle a d’apaisant, de mystérieux et de spirituel. Cependant, à la différence du projet mené par Nightwolf, la musique du one man band se caractérise par un degré d’agressivité un poil plus élevé. Un constat facile à dresser face à la proportion tout simplement plus importante de séquences menées pied au plancher et à des vocalises hargneuses dont émanent une âpreté ainsi qu’un certain sentiment de haine. Pour le reste, la formule demeure peu ou prou la même avec là encore un chouette travail mélodique effectué tout au long de ces trois compositions et qui permet notamment de faire planer sur ces dernières des atmosphères tour à tour épiques, contemplatives, mystérieuses et touchantes. Alors non, tout ça n’a rien de très original (surtout en passant après un Runespell qui évolue avec brio dans le même registre) mais ce n’est pas pour autant qu’il faut bouder ces morceaux de Forest Mysticism, groupe qui fait ici de l’excellent boulot et n’a surtout aucun mal à nous embarquer avec lui à travers ces paysages sylvestres et mystérieux qu’il dépeint en musiques et en paroles.
Si Runespell et Forest Mysticism, deux groupes pour le moins prolifiques (le premier a depuis sorti un nouvel album ainsi qu’un EP fraichement débarqué), continuent ici leur petit bout de chemin sans rien changer à leur formule et encore moins au genre qu’il pratique, force est de constater qu’ils le font avec toujours autant de talent et d'efficacité. Comme énoncé plus haut, tout cela ne bouleversera en rien le petit monde des musiques extrêmes et du Black Metal en particulier mais il faudrait vraiment faire la fine bouche (ou bien preuve de mauvais goût éhonté) pour ne pas tomber sous l’emprise de ces quelques morceaux dynamiques, variés, épiques et habités. Bref, c’est encore un sans faute pour Runespell qui n’en fini plus de convaincre et au passage une découverte intéressante avec un Forest Mysticism qui pourrait bien tirer son épingle du jeu s’il se décidait à passer un jour à la vitesse supérieure en sortant autre chose que des démos, des EPs ou des splits...
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