La preuve, s’il en fallait une, que les étiquettes ont leur importance : Primitive Man, formation née de Clinging To The Trees Of A Forest Fire dont j’attendais le premier album avec l’espoir d’y trouver un blackened sludge vraiment blackened et vraiment sludge (ce qui n’est pas chose courante). En effet, les premiers morceaux laissés au public présageaient un grand disque pour le genre dévoilant pleinement ce que CTTTOAFF avait de maladivement embourbé dans ses parties lentes.
Pourtant, sur le terrain du terrorisme slo-mo,
Scorn déçoit rapidement : ses riffs ne tapent pas où il faut mais prolongent continuellement leurs descentes, passant d’une rythmique industrialo-tribale à une accélération grind sans que le sentiment d’être malmené n’apparaisse un instant ; la voix barbouillée paraît loin de toute oppression, meuglant ses mornes lignes par tartines ne prêtant pas attention à si quelqu’un les subit ou non ; la batterie clapote mais ne corrompt en rien de pensée négative… En résumé, si on considère que le sludge se doit de réussir à être acide derrière ce qu’il présente d’horizontal et éclopé, alors le premier album des Ricains est un échec pur et simple.
Mais
comme l’a souligné une personne me donnant trop souvent l’impression d’être son commentateur plutôt que chroniqueur à part entière, peut-être n’est-ce pas dans la case du sludge viral qu’il faille classer ce premier album de Primitive Man. Malgré une lourdeur entrecoupée de frénésie grind, rien ne torture ici… et pourtant rien n’ennuie. Son autisme répétant à n’en plus vouloir des parties tombant à plat, butées à en devenir abstraites ; son chant monocorde égalisant les battements cardiaques ; sa production si brouillonne qu’elle transforme chaque accord en vague dronisante, éteignant tout reste de vitalité comme si le Elitist de
Fear In A Handful Of Dust cherchait à jouer du Evoken :
Scorn finit par se placer naturellement dans la catégorie rare des disques de funeral post hardcore sous l’égide du maître Abandon auquel il emprunte cette paix dans la saleté naissant de la boue d’
In Reality We Suffer (difficile de ne pas voir l’ombre des Suédois planer sur « Antietiam » par exemple). Une boue que les Ricains contemplent, fascinés, plus qu’ils retournent à coup de pelle, une boue rêvée et révérée dans une volonté de n’être qu’elle et vers laquelle le primitif glisse tranquillement par une chute amorcée dès la fin du morceau-titre.
De quoi se dire que le « All Funeral » porté par le groupe en étendard ainsi que le brun de la pochette de
Scorn sont les seules choses à retenir en guise d’indices, les envies de meurtres suggérées par la vignette attachée à ce texte n’apparaissant jamais, même lors d’accélérations grind aux gargouillis semblables aux remous de flaques fangeuses battues par la pluie (« Stretched Thin », intrus sauvé par ce son s’enlisant perpétuellement). Il est cependant dommage que la pélothérapie soit entrecoupée de pistes dark ambiant pas assez dark et bien trop ambiant, « I Can’t Forget » et « Black Smoke » faisant davantage patienter que lier entre elles des compositions n’ayant pas besoin d’interludes pour se succéder, l’apaisement qu’elles offrent étant déjà suffisamment rectiligne pour ne pas s’encombrer de bruits de fond.
Avec
Scorn, tout est question de perception : les sludgeux attendant leur nouvelle idole des musiques sick seront probablement déçus par un disque à l’agression à côté de la plaque tandis que ceux sachant goûter ce que la crasse peut induire de ravissement, ceux ne s’arrêtant pas à « grosse voix = terreur » ou « production crue = violence », trouveront ici un agréable repos des sens partagé entre adultes consentants malgré quelques maladresses. Si en plus vous vous sentez l’âme à accepter de nouvelles dénominations, considérez qu’on tient ici un fier représentant du genre plein d’avenir qu’est le mudgaze. Uhuh.
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