Jex Thoth - Jex Thoth
Chronique
Jex Thoth Jex Thoth
Si tu as bon goût en matière de cinéma, tu as vu The Wicker Man, ce film de 1973 – le remake n’existe pas, on est d’accord – racontant l’histoire d’un policier puritain, Neil Howie, se retrouvant emprisonné sur une île où se déroulent de nombreux rites païens. Si en plus tu as bonne mémoire, félicitations, tu es quelqu’un d’épatant et tu te rappelles de cette scène où le héros lutte contre les avances d’une séductrice par chambres interposées, celle-ci usant de chants et gestuels pour faire craquer sa victime.
Hé bien, ce premier album de Jex Thoth n’est rien de moins que ce passage mis en musique. Plus, il réussit là où l’enchanteresse du film de Robin Hardy a échoué. Essaye de fuir si tu le souhaites, impossible de résister à Jex, chanteuse de la formation, et sa voix rauque, solaire, à la fois caresse chaleureuse et innocence, fièvre naissant de l’occulte et appel au vice. Le « female fronted doom » a fait son trou depuis, des Blood Ceremony aux Windhand et autres High Priest Of Saturn : ce premier album reste cinq ans après sa sortie son meilleur canevas, dessinant le long de ses cinquante-et-une minutes ce que la conjugaison du doom au féminin peut apporter de plus-value.
Il est compliqué de ne pas tomber dans le ridicule en transcrivant les effets procurés par Jex Thoth, de même que d’expliquer comment ce qui est devenu le lieu commun d’une niche se dote ici d’un pouvoir d’envoutement particulier. A l’inverse de beaucoup d’autres, les Ricains jouent judicieusement leur va-tout avec leur chanteuse (au point d’abandonner leur premier nom officiel, Totem, pour celui de leur leadeuse), celle-ci assumant pleinement son rôle de la manière la plus juste qui soit. Tour à tour guerrière, prêtresse, aguicheuse et d’une retenue trompeuse car chargée en œstrogène (ça y est, le ridicule est atteint !), sa voix omniprésente est si prenante qu’elle place le reste des instruments au second plan lors des premières écoutes.
Seulement, il ne faudrait pas oublier qu’il y a tout un orchestre derrière Jex et celui-ci, malgré son application à tenir un rôle de soutien aux vocalises de qui-vous-savez, mérite d’être cité et acclamé dans sa majorité, son mélange de doom et rock psychédélique étant à lui seul pourvoyeur de sensations fortes entre réappropriation des codes et évitement des clichés desdits styles. Le doom pratiqué sur ce longue-durée est léger, enivrant, étonnamment rafraichissant bien que désuet, une sorte d’exhumation du cadavre des sixties n’ayant rien perdu de ses arrangements soyeux aux parfums multiples.
La langueur de l’ensemble se perd toutefois dans quelques longueurs lors des passages les plus étalés du disque, sauvés de justesse par un doux psychédélisme sortant des guitares et claviers ainsi qu’une production délicieusement surannée même si trop étouffée lors des moments les plus chargés en lourdeur. Certaines compositions paraissent aussi parfois mal assurées, trop timides. Mais cette impression de retrait face à une chanteuse prenant la majorité de l’espace n’est pas assez gênante pour faire oublier le caractère inespéré de ce groupe restituant au rock des sixties son rôle de « sexe pour les oreilles » avec une ferveur faisant de ce rappel-ci une incroyable surprise, encore aujourd’hui.
« You think you know me but you won’t believe your eyes. »
| lkea 29 Juin 2013 - 2646 lectures |
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