Portal - Swarth
Chronique
Portal Swarth
Portal ? Le jeu vidéo ou le groupe ? En fait, il s'agirait d'allier les deux en écoutant « Swarth ». Il faut créer des portails pour sortir de cet album qui piège l'auditeur de toute part. Situation : Une pièce dévorée par la pénombre est en train de se remplir d'eau. Elle devient rouge, puis verte. Quelque chose grouille dans les profondeurs et fait ressortir des bulles gigantesques à la surface de l'eau. Puis, un grondement immonde rugit dans cette pièce de plus en plus étroite. Vous n'avez qu'une arme et elle sert à faire des portails et rien d'autre.
Les australiens font naître Cthulhu une nouvelle fois dans une atmosphère monolithique et écrasante. Dans les abysses, le quatuor fait parler le monstre marin dans une langue incompréhensible. The Curator, l'intermédiaire, converse avec une voix si grave qu'elle paraît presque monstrueuse. Les profondeurs assiègent l'auditeur, il se désintègre sous le poids de l'eau. Ses poumons se remplissent, il ne respire plus et il rencontre la bête légendaire. L'humanité n'existe plus. A l'entrée dans ce monde parallèle l'auditeur se sent mal à l'aise, il est submergé par l'angoisse. Les guitares ne font qu'accentuer sa syncope. Elle semblent presque désaccordées et s'arrêtent brusquement, notamment sur « The Swayy » en donnant des coups aigus si bien que l'auditeur est poussé encore plus dans les tréfonds.
Je ne vous cache pas que Portal n'est pas un groupe de Death Metal comme les autres. Je trouve que cet album est loin d'être accessible. On ne peut se rattacher à rien, on tombe juste avec eux dans un chaos insurmontable. Ils nous ont projeté là et c'est à nous de remonter à la surface. Mais comment pourrait-on faire ? La confusion musicale métaphorise vos pensées, elles sont désordonnées elles aussi. Les rythmiques sont tout à fait particulières : un courant violent accoure et s'arrête pour laisser place à une rythmique plus calme et de ce fait, plus pesante. Le dernier morceau « Marithyme » oppressent en enlaçant des guitares malsaines et monolithiques où la batterie alterne différents tempi et sans oublier cette basse...Portal adopte un son de basse puissant, elle frémit dans vos oreilles comme quand vous écoutez un album de Stoner. Cependant, elle s’émissent comme des bourdonnements incessants si bien que votre verre d'eau posé sur votre table frisonne. Mais vous ne rêvez pas.
Le noir total. Le vide. Horreur sous vos yeux quand vous apercevez les tentacules immenses de ce monstre marin. On ne peut qu'à peine l'entrevoir puisque l'obscurité environnante englouti l'espace.
Il essaye de vous séduire en modérant la célérité des guitares sur « Lavae ». Il parle lentement tout en vociférant des choses que vous ne comprenez pas. Vous vous approchez de plus en plus de cette créature parce que vous sentez quelque chose qui vous plaît. Et tout s'accélère à nouveau puis elle vous prend avec ses tentacules. Vous voyez sa bouche ! Il est impossible de crier sous l'eau, mais lui, il peut. Et des hurlements redoutables y sortent sans peine d'une cruauté inégalable. Vous vous débattez mais ça ne sert à rien, vous y entrez dans une ambiance presque rituelle. Il faut vous souvenir de votre arme à portail, il serait judicieux de l'utiliser maintenant !
Paradoxalement, on peut trouver que « Swarth » est brutal et fulgurant mais personnellement je trouve que leurs compositions sont inertes et figées. Certes, toutes les rythmiques et les riffs alternent les tempi mais tout le déroulement de l'album est l'anéantissement le plus total. Et comment être brutal dans le chaos ? Portal réussi à faire une musique dans le vide, dans le noir, dans les profondeurs. Ce n'est pas de l'ennui, c'est une fascination qui se propage dans votre tête, une expérimentation. Tout est une sorte de films aux images ternes et saccadées. Écouter « Swarth » est un peu comme faire un cauchemar où vous courrez et vous ne pouvez pas vous échapper : vous faites du sur-place.
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