Dans toute discographie relativement fournie de tout groupe qui se respecte, on peut trouver un point culminant, un sommet de qualité que l'on pense absolu, sans commune mesure. Un indice de comparaison véritable avec le reste des productions d'une formation. Le genre de disques qui fait craindre l'auditeur quant à l'avenir de son groupe fétiche.
"Comment prendre la relève après une galette pareille ?". Cette question, nous nous la sommes tous posés après l'écoute de
">"Dark Space III", le bien-nommé troisième opus du trio de cosmonautes Suisses. Rien à faire, en retournant la situation dans tous les sens, en se perdant en suppositions, personne ne pensait le groupe capable de dépasser une telle qualité d'exécution, de production, un tel voyage dans les étoiles. Darkspace aura réussi son coup en égalant, mais également en dépassant ce coup de maître, avec la sortie de
"Dark Space III I", cette année. Mais ce n'est pas notre sujet, ayant déjà eu l'occasion d'encenser la dernière réalisation des cosmonautes helvètes.
">"Dark Space III" relève des aspects très symboliques, tant pour moi que pour le public. Il est l'album par lequel j'ai découvert, ébahi, Darkspace, et il est le fruit de trois longues années d'attente pour ceux qui étaient déjà amateurs de l'univers du combo. Un disque qui s'est fait désirer, présenté au public lors d'un concert, public chauffé à blanc par un énigmatique medley posté sur la page web du groupe et relayé aussi bien par la presse papier que les webzines. L'astéroïde a percuté la surface terrestre, mais également établi un nouvel indice de qualité dans la discographie du trio Suisse.
On pourrait débattre longtemps de ce qu'est la
perfection musicale. Pour moi,
">"Dark Space III" est ce qui l'incarne le plus, en ce sens qu'il est la synthèse impeccable de tout ce qui faisait, sur les albums précédents, l'originalité et l'efficacité du combo. On y retrouve aussi bien le côté cosmique poussé à l'extrême du premier volet, mais aussi les embrasements sonores, les parties chaotiques du second. Darkspace ajoute à sa formule déjà testé et approuvée une teinte encore plus progressive, dont "Dark 3.16", véritable crescendo, se fait l'écho. Encore une fois, il explose littéralement les codes trop rigides du Black Metal traditionnel comme moderne : qui pourrait prétendre soumettre un trou noir à des règles établies ? Voyage à part entière, qui, sans surprise, aura fait la quasi-unanimité auprès de ses auditeurs, représentant un défi pour tout chroniqueur qui se respecte : transmettre un vécu, une sensation reste une tâche fort difficile à accomplir quand on ne peut pas la décrire, la minuter, la diviser en parties distinctes.
Car Darkspace forme un tout, dont chaque piste ne pourrait être prise séparément d'une autre au risque de faire perdre toute sa force, tout son sens à l'album entier. De la plage ambiante énigmatique de "Dark 3.15" jusqu'au synthétiseur ouvrant cette longue marche qu'est "Dark 3.14", Darkspace agrémente ses compositions d'explosions de voix incompréhensibles, mixées à peine en retrait pour un rendu "distant", des astres explosant dans le lointain, apparaissant finalement presque "anecdotiques" quand toute l'attention, la vigilance de l'auditeur est mise à contribution pour tenter de trouver une aspérité, une prise à laquelle s'accrocher au milieu du chaos. De turbulences en crashs, la navette accélère dans des montées en puissance d'une superbe inégalée ("Dark 3.16"), la carrosserie de l'engin enrobée des corps célestes qui chantent à l'unisson en des choeurs éthérés qui, immanquablement, provoquent frissons et chair de poule. Pour celui que le minimalisme parfois excessif et la production "brute de forge" ne rebutera pas, bien entendu.
">"Dark Space III", album de chevet et sommet d'une aventure qui ne demande qu'à être poursuivie, a véritablement assis la popularité et l'aura de Darkspace dans la durée. Ainsi, tout comme je dois ma découverte de ce groupe hors-norme à Metallian, j'aimerais lui rendre un petit hommage en citant Laurent Michelland, dont le départ de l'équipe de rédaction signa le déclin du magazine. Je vous parlais du défi que constitue la chronique d'un album du combo Suisse ? Lui aura réussi la prouesse d'en réaliser la meilleure synthèse qui soit, et ce, en une seule phrase :
"Darkspace, c'est la construction d'un monde sans parois, d'ou, paradoxalement, on ne s'évade pas."
(Promis, après celle-ci, j'arrête les chros dithyrambiques)
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