Vous avez beau vivre en ermite, impossible d'être passé à côté de
Phobos Monolith ˗ déjà troisième opus de ce one-man band US ˗ et de son merveilleux artwork, réalisé par l'artiste Luciana Nedelea, vous donnant un ticket pour un long voyage dans l'espace. Car c'est bien cela que vous offre Jacob Buczarski, un magnifique périple qui ne laisse personne indifférent, au vu des chroniques élogieuses affluant sans cesse ainsi que des apparitions dans les nombreux top ou bilans de fin d'année. Il est d'ailleurs étrange que beaucoup ne se réveille que cette année, car Mare Cognitum n'a cessé d’enchaîner les sorties depuis sa création en 2011 avec deux albums parus à un an d'intervalle
The Sea Which Has Become Known ˗ en 2011 toujours ˗ et le très prometteur
An Extraconscious Lucidity en 2012. Alors certes, à votre décharge, le premier n'est disponible qu'en digital via bandcamp et le second a été réalisé par Jacob himself ˗ par l'intermédiaire de son label Lunar Meadow Records ˗ formaté en CD-R ultra limité, d'où le manque de couverture.
Cette envoûtante entité a véritablement pris son envol grâce à sa signature sur l'excellent label italien I, Voidhanger Records (Cf.
De Masticatione Mortuorum in Tumulis d'Ævangelist, Tongues ou encore Midnight Odyssey) ainsi que la sortie consécutive en 2013 d'un split avec les Grecs de Spectral Lore (faisant parti de la même écurie), intitulé
Sol ˗ qui est d'ailleurs chroniqué dans nos pages. Notre homme évolue au fil des sorties développant son univers par des atmosphères toujours plus planantes et personnelles, gravissant ainsi les échelons tout en gardant sa part de mystère et son intégrité (l'édition vinyle va paraître sur le label underground US Fallen Empire). En effet si
An Extraconscious Lucidity souffre de quelques défauts, à savoir de nombreuses longueurs couplées à des riffs trop basiques et linéaires nuisant à l'ensemble, le tir a été rectifié de la plus belle des manières sur
Phobos Monolith grâce à une plus grande maîtrise des instruments, avec notamment des lignes de guitare plus riches.
Dans la continuité de « Sol Outoboros », titre fleuve présent sur le split
Sol, Mare Cognitum délivre ici des morceaux plus longs mais aussi plus aboutis que d'accoutumée. L'Odyssée de l'Espace prend une nouvelle tournure, moins sombre et torturée, délivrant par la même tout un spectre de couleurs plus chatoyantes les une que les autres. Une mise en lumière magnifiée par une production puissante et propre qui ne dénature en rien la personnalité de la formation, avec un côté primitif toujours présent ainsi que la voix très éraillée de Jacob semblant sortir des tréfonds du cosmos. L'auditorat est envoûté par les mélodies imparables ainsi que les riffs très prenants et épiques ˗ comme sur le titre d'introduction « Weaving the Thread of Transcendence » ˗ qui mêlés aux nappes sonores gagnent en majestuosité. Une musique à la fois harmonieuse et onirique qui renvoie à la scène black metal US avec ces ambiances portées par les guitares comme Wolves in the Throne Room sur
Celestial Lineage ou ces moult riffs dignes d'Agalloch (une pensée pour « Noumenon »).
Phobos Monolith est une invitation au rêve, une plongée dans un monde parallèle, vous ouvrant grand les portes de la Vérité. Un voyage long et éprouvant dont vous ne vous détournerez point grâce aux nombreuses variations de rythmes, des ambiances spatiales enchanteresses ainsi que les alternances entre chant black d'écorché vif et chant à la fois caverneux et inhumain (« Ephemeral Eternities »). A la manière de Paysage D'Hiver ˗ avec
Das Tor notamment ˗ ce Monolithe Lunaire attire autant qu'il inquiète de part son côté à la fois fabuleux et mystérieux. En effet cette œuvre recèle une facette beaucoup plus sombre et terrifiante qui est parfaitement illustrée par « Entropic Hallucinations », titre le plus court mais aussi le plus frontal, aux relents Darkspaciens. Malgré ce danger qui guette, portant son lot de terreurs innommables, Mare Cognitum va rapidement tempérer le propos et vous détourner de ce trou noir par des lumières encore plus éclatantes et irréelles via « Noumenon », le plus féerique des morceaux. Certes un éclat noir brillera ici et là, vous faisant plisser les yeux et frissonner de froid, mais celui-ci disparaîtra bien vite au profit de merveilles cosmiques.
Cependant les influences post-metal ˗ impossible de ne pas penser à Isis,
Panopticon en tête ˗ dont découle le côté mélodieux et fragile de
Phobos Monolith, risque de faire fuir bon nombre d'entre vous, considérant cet objet comme trop joliet et lisse. Dommage, car c'est passé à côté d'un petit bijou, une bande son parfaite pour film de science-fiction.
Fans de black metal atmosphérique interstellaire, cet album vous est chaudement recommandé !
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