Pratiquement 10 ans après avoir parlé pour la première fois de Morgoth pour son album
Cursed (1991), je reprends mon clavier pour évoquer ce vieux groupe allemand de death metal. Car depuis, les choses ont changé. Si je notais à l'époque l'anonymat dans lequel les Teutons étaient tombés, Morgoth vit désormais une seconde jeunesse, sans doute bien aidé par la vague revival qui sévit depuis plusieurs années et remet sur le devant de la scène certains vieux briscards oubliés. La formation renaît ainsi de ses cendres en 2010. S'ensuit une signature chez le label d'antan Century Media puis la sortie en 2012 d'un live,
Cursed To Live. Nouveau single ensuite en 2014,
God Is Evil. Et enfin, en mars 2015, un nouvel album, ce
Ungod. Morgoth a entre-temps perdu son chanteur emblématique Marc Grewe, remplacé par le frontman de Disbelief, l'imposant Karsten Jäger. Le line-up du groupe avait déjà pas mal bougé depuis la reformation, avec le bassiste Sotirios Kelekidis (Force Trankill, Tharn, ex-Mind-Ashes) à la place de Sebastian Swart qui prend lui la guitare à la place de Carsten Otterbach qui n'a pas fait long feu. À la batterie, au revoir Rüdiger Hennecke bonjour Marc Reign (ex-Destruction). Le guitariste Harald Busse restant donc le seul vestige de l'esprit originel de Morgoth.
La question était donc de savoir si ce nouveau Morgoth largement remanié allait faire honneur au passé du groupe. En ce qui concerne la pochette, c'est déjà raté. Rien d'étonnant puisque c'est Seth de Septicflesh qui s'en est chargé, dans son style habituel, moderne, plastique et sans âme. Mais bon, il a déjà fait bien pire! Concernant la musique, la maison de disque nous annonçait en grande pompe l'album qui aurait dû sortir entre
Cursed et
Odium. Pas de rock industriel à la
Feel Sorry For The Fanatic mais ça on s'en serait douté. Juste du bon vieux death metal de la première moitié des années 1990. Eh bien pour une fois, le label n'a pas exagéré.
Ungod nous renvoie plus de vingt ans en arrière quand Morgoth faisait encore du pur death metal, le chaînon manquant entre ses deux premiers albums sans les quelques expérimentations du second. Là-dessus, le groupe ne s'est pas planté en ayant su retrouver son style caractéristique très proche de Death et Obituary, bien mis en valeur par une production plus moderne que par le passé mais pas trop clean non plus. On retrouve ainsi ces riffs mid-tempos sombres et ces mélodies légèrement mélancoliques, le tout porté par un Karsten Jäger qui remplace à merveille Marc Grewe grâce à un growl arraché qu'on croirait sorti de la gorge de son prédécesseur, entre John Tardy, Martin van Drunen et le Chuck Schuldiner des débuts.
Dit comme ça, ça a l'air bien. Mais en fait, non. Enfin si mais pas vraiment. Désolé je me contredis mais ça illustre mon sentiment très partagé à l'écoute de
Ungod. Oui, Morgoth a réussi à ranimer le feeling d'époque. Mais la qualité d'ensemble reste loin de
Cursed ou même des meilleurs moments de
Odium, album que j'affectionne moins que le premier car il expérimente déjà trop pour moi. Pas d'expérimentation hasardeuse ici mais beaucoup d'autres défauts qui me font grincer des dents. À commencer par le rythme global. Putain, qu'est-ce que c'est mollasson! Quasiment que du mid-tempo pépère et peu ou prou d'accélérations thrashy comme le groupe en avait le secret sur ses deux EPs
Resurrection Absurd et
The Eternal Fall, mes productions préférées du combo d'outre-Rhin. Ce côté tranquille trop prononcé se trouve en plus accentué par le surplus de mélodie (la vraie évolution musicale du combo avec l'ajout de quelques dissonances dans l'air du temps par-ci par-là) incarné dans le nombre foisonnant de solos et autres leads. On y retrouve l'aspect mélancolique des mélodies de
Cursed et
Odium donc l'essence du groupe n'est pas dénaturé et c'est même plutôt bien fait mais là aussi c'est trop posé, trop gentil, trop propret. Pas vraiment ma vision du death metal. Autre grief, la monotonie. Si on reconnait la patte Harald Busse, on note surtout que c'est à peu de chose près toujours le même riff sombre et lourd typique qui tourne sur tous les morceaux. Non seulement c'est trop lisse mais c'est donc aussi répétitif et lassant. Décidément, ce
Ungod se révèle bien plat et sans surprise, manquant d'envergure et de passage marquant.
C'est dommage parce qu'il y a quand même de bonnes choses. Outre le feeling d'époque que l'on retrouve avec plaisir même si la qualité n'est plus la même, certains morceaux sortent du lot. Ça commençait d'ailleurs plutôt bien avec l'enchaînement "House Of Blood", "Voice Of Slumber" et "Snakestate" qui augurait d'un album solide grâce à de bons riffs et une bonne ambiance, avant de tourner en rond. Les deux instrumentaux se démarquent aussi sans peine. "Ungod" propose un enchaînement intéressant de riffs inspirés avec une belle montée en puissance, une vraie tension et une atmosphère prenante (et une lead hantée à la scandinave!). "The Dark Sleep" qui clôt l'album se fait moins varié, plus logiquement dans un esprit d'outro (non je ne parle pas de pédophilie), mais réussit à retenir l'attention de l'auditeur par son côté hypnotique. "Prison In Flesh" juste avant avait aussi su tirer son épingle du jeu en bourrant plus que ses collègues pantouflards. Rien que ça, ça m'a fait plaisir! On pourra citer également le break dissonant de "Nemesis" vers 2'30 sur des patterns de batterie un peu plus techniques qui rend pas mal dans un morceau sinon assez banal voire désagréable sur sa fin interminable en spoken words.
Voyez donc que malgré mes critiques virulentes,
Ungod n'est pas non plus dénué d'intérêt. Il n'est même pas du tout déplaisant. Mais est-ce que j'ai envie d'un album de death metal, qui plus est de Morgoth, agréable et qui passe facile? Pas vraiment. J'attendais en effet plus d'agressivité de la part du quintette. Je me doutais bien que les Allemands n'allaient pas revenir au son abrasif de
Resurrection Absurd ou
The Eternal Fall mais tout de même, davantage de testostérone n'aurait pas été du luxe. Je sais cependant voir le côté positif des choses. On a connu ainsi bien pire comme comeback et ça fait plaisir de revoir un groupe qui a pondu quelques perles revenir sur le devant de la scène, même dans une configuration différente. À mon avis, ceux qui préfèrent
Odium devraient apprécier sans forcer. Certains partisans de
Cursed également puisque
Ungod s'inscrit entre les deux. Moi, je ne peux m'empêcher d'être déçu par un album juste sympathique que je trouve trop mou, gentillet et monotone.
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