False - False
Chronique
False False
Difficile d'aborder un groupe que vous suivez depuis ses débuts et qui a su vous séduire dès leur premier EP, difficile aussi de poser des mots sur une musique et un univers très singuliers. Pourtant si leurs premières réalisations sont volontairement passées à la trappe – le court format ainsi que le split avec Barghest – impossible de se dédouaner une nouvelle fois pour la sortie de ce premier album sans titre. Car, grâce à ce dernier, False passe incontestablement un palier, délaissant son statut de formation de black metal à suivre pour celui d'une des formations les plus novatrices de sa génération. Sans avoir à forcer le trait ou dévier de leur route, les Américains délivrent la même recette atypique qui a fait leur succès, tout en développant leur concept et s'affranchissant des limites posées.
Le fait que cette nébuleuse entité ait gardé un line-up stable et travaille aux côtés de Gilead Media depuis ses débuts a certainement joué un rôle dans leur montée en puissance. Car si False avait pris tout le monde à contre-pied par une attitude plutôt discrète, loin des stéréotypes du genre, ainsi qu'un black metal hybride mélangeant l'atmosphérique, avec synthétiseur fleurant bon le symphonique, à la crasse et l'urgence du punk, aujourd'hui elle enfonce clairement le clou. Certes l'artwork réalisé par Nicole Sara Simpkins m'a quelque peu inquiétée, que ce soit par ses couleurs fauves ou bien son aspect brut et brouillon, mais il prend sens à l'écoute du premier longue durée du groupe, encore plus osé, abouti et... apocalyptique. En effet, la troupe originaire du Minnesota ajoute d'autres teintes à sa musique plus sombres et rugueuses. Les sonorités se font plus noires, furieuses, schizophrènes même – sur « Saturnalia » notamment – côtoyant allègrement des parties plus éthérées et épiques.
Un aspect maladif et incontrôlé qui prend de l'ampleur ici – risquant d'en rebuter certain(e)s – avec des lignes de guitares tant nerveuses que discordantes, renvoyant à Krallice, couplées à un chant très arraché et traînant. Chaque mot, chaque phrase semblent être sortis dans la douleur, comme si Rachel vous crachait du verre pilé en pleine face. « Saturnalia » et « Hedgecraft » sont un parfait exemple de ce black metal désincarné vous invitant à quitter vos faux prophètes, votre ignorance et toutes les choses viles afin de renaître dans l'ombre. Une mort programmée dont la cadence est menée par un batteur en mode automatique, mitraillant à tout-va. False durcit le ton sur son premier album éponyme, sans pour autant changer de thème, avec un côté cru plus tranché – proche des formations telles que Yellow Eyes ou encore Barghest – ainsi qu'une volonté de fondre sur vous dès les premières minutes pour ne plus vous lâcher au fil des titres. De longues plages éprouvantes, dépassant toutes les neuf minutes, durant lesquelles les Américains souhaitent déstabiliser, provoquer même, par les différentes cassures et cette rugosité aussi froide que moderne.
Pourtant le groupe cherche avant tout à fédérer, vous entraîner sur le chemin de la Vérité, dans le néant. Une grande traversée du désert semée d'embûches mais parsemée de quelques fulgurances, la finalité vous tenant en haleine. D'où l'omniprésence du synthétiseur qui vient se marier à une batterie ainsi que certains riffs très punk, le tout agrémenté d'une production organique – Adam Tucker étant derrière les manettes. Et malgré la pointe d'appréhension, la symbiose fonctionne à merveille. Que le rôle du synthétiseur, magnifiquement tenu par Kishel, soit placé au premier plan ou seulement comme soutien, il apporte indéniablement de la profondeur et de la force aux compositions du groupe. Tantôt complètement hallucinés à la Manes sur « Saturnalia », tantôt puissants – en particulier « Enthropy » – et influencés par la scène norvégienne, les passages atmosphériques aèrent indéniablement l'ensemble. Souvent secondés par des riffs plus éthérés, le travail de séduction qui a été mis en place dès le titre d'ouverture prend toujours plus d'ampleur au gré des minutes, vous transcendant sur « Enthropy » avec son introduction kitschouille ou arrivant à vous toucher par des notes plus sombres et mélancoliques – le morceau sans titre.
Car en dépit du côté décousu que vous pouvez ressentir à la première écoute, False développe son univers musical et son histoire en suivant une logique implacable, les pistes semblant être des chapitres. Certes les Américains délivrent ici des sonorités plus difficiles d'accès que sur leurs précédentes réalisations, néanmoins les mélodies sont toujours au centre de leurs compositions avec de nombreuses envolées des plus jouissives. Un premier album fourmillant d'idées, voire éreintant, qui s'apprécie avec le temps, vous délectant de chaque petit arrangement décelé. Il est d'ailleurs difficile de trouver des bémols, mis à part une batterie et un synthétiseur un cran en avant dans le mix. Et encore ! Cela paraît même voulu par le groupe tant sa volonté de tout annihiler est grande, Rachel en tête. Personnellement je ne suis en rien déçue par ce longue-durée d'une noirceur insondable, un subtil mélange de majesté, rugosité et fureur.
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