State Faults - Desolate Peaks
Chronique
State Faults Desolate Peaks
Autant dire que la chers amis, on tient quelque chose de peu courant. On va commencer par un postulat simple : sur la totalité des albums que vous avez écoutés, combien ont une introduction intéressante ? Probablement entre cinq et dix, tout au plus. Maintenant, dans ces dix, combien ont une introduction qui fait jeu égal ou surpasse les titres de l'album ? Il y a fort à parier que ce chiffre se situe entre zéro et un. « Desolate Peaks » de State Faults est un disque qui possède ce privilège, celui d'avoir une intro qui touche le ciel du doigt. Et le pire la dedans, c'est que ce qui suit derrière ne démérite pas et s'impose petit à petit comme un des meilleurs disques que j'ai écouté ces dernières années. Mais d'abord, petit point historique : State Faults c'est Californien, c'est quatre types et c'est signé sur No Sleep Records (label qui a signé entre autres La Dispute, La Dispute mais aussi La Dispute, ou encore La Dispute, vous voyez un peu la qualité du label...). Enfin, je blague mais en réalité, No Sleep a signé quantité d'albums de qualité et de plus, ce « Desolate Peaks » est sorti juste avant le deal de State Faults avec No Sleep. Ce premier long-format est donc disponible dans une splendide version vinyle chez Tiny Engines. Et quand je dis « splendide », je ne déconne pas puisque l'objet est un des plus beaux de ma collection : une pochette absolument magnifique, les titres sont écrits en relief sur le carton, le vinyle est un Splatter Orange et Vert et on a droit à une petite carte avec une gravure qui contient toutes les paroles. Du très très grand travail de la part de Tiny Engines et le tout à un prix plus qu'honnête.
Mais ça, vous allez me dire, ça ne compense rien du tout si ce qui est gravé dans cette œuvre d'art visuelle ne vaut pas tripette. Et rassurez-vous, amateurs de La Dispute, de Daïtro, de Pianos Become The Teeth ou autres Suis La Lune, « Desolate Peaks » est monumental. De la piste 1 à la piste 11, de A à Z. Ce qui est fort sur ces onze morceaux tous plus immenses les uns que les autres, c'est qu'ils vous toucheront tellement qu'ils se rendront indispensables à vos écoutes régulières. Et ils sauront vous émouvoir avec une précision diabolique. Votre passé, vos blessures, vos amours, vos sentiments, vos rencontres : tout ça n'importe pas, comme si State Faults savait ce qui vous fait mal ou ce qui vous fait du bien. Derrière cette capacité de divination absolue visiblement hors-du-commun, il y donc des notes, des cris. « Sleepwalker » est donc l'entrée en matière : monstrueuse, unique, absolue avec ces paroles déchirantes et hurlées par le vocaliste qui est... Enfin, je ne sais même pas comment il est tant sa performance sur ce disque est intrigante et captivante à la fois. Je conçois qu'on peut ne pas croire à ce que je que je raconte quand on le lit comme ça sur un Webzine avec son café posé à côté du bureau en attendant le chargement d'un épisode de True Detective, mais je vous jure que quand il balance le « That I must walk alone, that I am all alone. That my heart's a haunted home, And it's all I've ever known. » , on y croit avec une force qui semble envoyée d'ailleurs tant elle nous prend par les tripes. A partir de ce point départ ô combien supersonique, c'est l'autoroute de la dépression sous le soleil couchant.
« Cities » embraye juste derrière et envoie pour la première fois une tarte dans la tronche de l'auditeur : une production franchement dégueulasse, une batterie qui castagne et toujours cette tristesse qui dégouline en toile de fond. On en vient à se demander pour on en prend autant plein la gueule, aurait-on fait quelque chose de mal à ce point là ? C'est la grande valse des regrets, des pensées, des fantômes du passé qui reviennent. Et « Arrowhead » n'arrange clairement pas les choses puisque le guitariste prend un malin plaisir à balancer des trémolos Post-je-ne-sais-pas-quoi à tire-larigot. Dans le genre tire-larmes, il faut bien avouer que ça fait carrément son effet. L'émotion est de mise à chaque seconde, même quand le tempo ralentit comme sur l'incroyable « Teeth And Bones », aux paysages musicaux trop grands, trop beaux, trop irréels pour nous. Les morceaux finissent par offrir toujours plus de grandeur, jusqu'à prendre des allures de cathédrales gothiques, de sommets abrupts, de mers déchaînées. Quelque chose de bien trop imposant pour que nous n'en soyons pas impressionnés, en d'autres termes. Il suffit de se mettre à écouter ce riff de départ qui saigne vos oreilles sur « Shiver », qui déchire le cœur, le cerveau et les cordes vocales pour que l'impression se confirme immédiatement.
« Desolate Peaks » est ce qu'on appelle dans le jargon un « sophomore album ». Impossible d'en douter, ce disque est à classer dans les cinq meilleures sorties du genre depuis les cinq dernières années. Déjà un classique, seulement trois ans après sa sortie. Et après tout, quelle meilleure saison pour écouter cet album, puisque la première phrase du disque elle-même en fait l'éloge : « We say goodbye to golden summers ».
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