Zhrine - Unortheta
Chronique
Zhrine Unortheta
Cela fait un petit moment que nous ne vous avions pas parlé de la scène islandaise. Celle qui a été au centre de toutes les attentions ces deux dernières années a fini par attirer dans son giron quelques « gros » labels probablement intéressés par l’idée altruiste de participer au développement culturel de ce pays magnifique (on appelle ça aussi prendre le train en marche - ou l’idée d’un certain opportunisme). C’est le cas de Season Of Mist qui a récemment mis la main sur l’une de ces nombreuses formations à s’être récemment dévoilée au grand jour. Mais Zhrine n’est pas né d’hier. Officiant au préalable sous le nom de Gone Postal puis très brièvement de Shrine, ces jeunes islandais - parmi lesquels on retrouve des membres et ex-membres de Svartidaudi et Ophidian I - s’adonnaient à la pratique d’un Death Metal relativement efficace dans son genre même si on ne peut pas dire qu’In The Depths Of Despair, seul album qu’ai pondu la formation, soit aujourd’hui inscrit dans la mémoire collective.
Rebaptisé Zhrine courant 2015, le groupe en a profité pour revoir son orientation musicale. Opportunisme Acte II ? Pas si sûr puisque déjà fin 2012, Gone Postal sortait une démo intitulée Unortheta sur laquelle on pouvait trouver trois des sept titres ("The Syringe Dance", "Spewing Gloom" et "Unortheta") figurant aujourd’hui au tracklisting de ce premier album intitulé... Unortheta. En ce qui concerne l’illustration, le groupe a fait appel aux services du Polonais Zbigniew Bielak (Ghost, Paradise Lost, Vader, Watain, Zom...). Un travail réussi, sobre et irréel qui correspond bien à la musique de Zhrine.
Originaire comme la majorité de ses compatriotes de la ville de Reykjavík, la formule développée par Zhrine cherche à se distinguer quelque peu de celle de ses homologues dont on a ici beaucoup parlé (Sinmara, Wormlust, Svartidaudi, Misþyrming, Naðra, Almyrkvi et consorts...). En effet, de par ses débuts placés sous le signe d’un Death Metal moderne et agressif, Zhrine conserve quelques vestiges de ce passé auxquels viennent néanmoins se mêler aujourd’hui de nombreux éléments propres à cette scène Black islandaise tant plébiscitée.
De ses premières années, Zhrine a donc conservé ce chant typique du Death Metal. Un growl puissant et abrasif qui apporte une certaine lourdeur à des compositions qui n’ont plus rien à voir avec ce que proposait le groupe à l’époque du seul et unique album de Gone Postal paru en 2008. Fait de riffs lumineux et dissonants, de structures complexes et tordues, de changements de rythmes importants, la musique de Zhrine rappelle davantage celle de groupes tels que Deathspell Omega ou Svartidaudi (dont on trouve ici un des deux guitaristes).
Ainsi, dans un perpétuel jeu de lumière, entre moments éblouissants et contemplatifs (les trois premières minutes d’"Utopian Warfare" qui ne sont pas sans rappeler un certain Isis, les quasi-instrumentaux "World" et "Unortheta"...) et séquences beaucoup plus sombres et menaçantes (notamment lorsque le rythme s’accélère sur la base de blasts incessants), Zhrine se plaît à jouer avec les émotions de l’auditeur, provoquant ainsi chez lui le doute ainsi qu’une certaine appréhension face à des passages jamais très rassurants (les samples n’aident pas) en dépit d’une luminosité passagère. Bref, un univers très gris fait de paradoxes à l’image de l’artwork de Zbigniew Bielak. Les paroles, si elles ne sont pas reléguées au second plan, tiennent quant à elles une place bien plus restreinte que chez la majorité des autres groupes. Une façon pour Zhrine de cultiver cette ambivalence évoquée un peu plus haut en donnant autant d’importance si ce n’est davantage à sa musique via des séquences instrumentales fortes et hypnotiques. A l’inverse, lorsque le chant fait son entrée, celui-ci s’impose comme une force colossale, impressionnante de puissance et de profondeur. Par sa simple présence, cette voix massive vient instantanément assombrir l’atmosphère. Mais ce growl posé n’est pas le seul qui participe à la mise en place de cette ambiance clair/obscur parfois apaisante, souvent plombée. Derrière le micro, Þorbjörn Steingrímsson est épaulé de temps à autre par le guitariste Nökkvi G. Gylfason. Ce dernier vient ainsi poser à quelques reprises une voix Black beaucoup plus criarde et arrachée. Un contraste saisissant qui amène avec lui un côté organique ainsi qu’une certaine urgence.
Ce premier album signe pour les Islandais de Zhrine une reconversion réussie. Car si le groupe marche effectivement sur les traces de certains de ses compatriotes à un moment qui n’aurait pas pu être mieux choisi, il a su s’en démarquer dans le but de proposer quelque chose de plus personnel. Ainsi, son Black/Death dissonant teinté tantôt de moments aériens et contemplatifs, tantôt de passages beaucoup plus agressifs et bas du front devrait, à l’image de ses confrères, trouver aisément un public. Certes le résultat est peut-être un peu trop « propre sur lui » mais dans l’ensemble Unortheta n’en demeure pas moins un très bon album dans son genre.
| AxGxB 3 Novembre 2016 - 1664 lectures |
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