L’année 2016 a été marquée par le retour gagnant des Québécois de Forteresse. Après cinq ans d’absence, le groupe originaire de Montréal est en effet revenu aux affaires avec l’un des albums de Black Metal les plus plébiscités de ces douze derniers mois. Devant cet enthousiasme quasi-unanime et après une chronique dithyrambique de
Thèmes Pour La Rébellion, il était temps que nous nous penchions également sur leurs précédents albums.
Commençons ainsi notre plongée dans la discographie de Forteresse avec
Crépuscule d’Octobre, disque sorti en novembre 2011 sur Sepulchral Productions, label emblématique de la scène québécoise (Borgne, Délétère, Gris, Monarque, Sombre Forêt...). Bien qu’il puisse sembler relativement récent, les titres qui le composent ne date pas d’hier ni même de 2011 (date à laquelle il a été - partiellement - enregistré). En effet, l’écriture de ce quatrième album remonte à 2006, probablement avant même la sortie de l’excellent et bien nommé
Métal Noir Québécois. Un disque gardé secret durant plusieurs années pendant lesquelles Forteresse aura préféré explorer d’autres contrées plus atmosphériques (
Les Hivers De Notre Époque - 2008 et
Par Hauts Bois Et Vastes Plaines - 2010).
Par conséquent, après deux albums placés sous le signe d’un Black Metal froid et contemplatif, rien ne laissait présager un tel retour aux sources. Il faut dire qu’avec un artwork aussi romantique où ces épis de blés roussis par un soleil d’été déclinant vacillent au gré du vent, on était bêtement en droit de penser que
Crépuscule d’Octobre suivrait les traces de ses deux prédécesseurs. Un joli pied de nez de la part des Canadiens qui créeront alors la surprise parmi tous les aficionados de ces fiers patriotes.
Une surprise réelle mais mesurée puisque ce troisième album ne fait que reprendre la formule déjà consacrée sur l’excellent
Métal Noir Québécois, soit un Black Metal entêtant mené tambours battants à grand renfort de mélodies épiques et mélancoliques. En le comparant à
Thèmes Pour La Rébellion, on peut d’emblée constater que la production était à l’époque beaucoup moins percutante. Plus crue, moins puissante mais également moins bien équilibrée, elle met l’accent sur les leads mélodiques (véritable colonne vertébrale de la musique de Forteresse) et la batterie de Fiel au détriment de ces riffs certes plus "secondaires" mais que l’on peine malgré tout à discerner distinctement et de ce chant qui entonne des hymnes à ses héros oubliés.
En dépit de ces petits défauts de production,
Crépuscule d’Octobre reste néanmoins un très bon album de Forteresse grâce, une fois de plus, à un travail mélodique tout en finesse évoquant à l’infini ces paysages d’hiver immaculés et mélancoliques ainsi que ces batailles sanglantes pour un Québec libre. Des mélodies toujours aussi somptueuses, à la fois épiques et amères qui portent en elles les espoirs meurtris de toute une nation. Une immersion dans cette époque de conquêtes et de découvertes rendue encore un peu plus saisissante grâce à l’utilisation de nombreux samples tels que ces ritournelles de violon ("La Lame Du Passée" et "Spectre Du Solstice"), ce feu qui crépite (la conclusion de "Mon Esprit Rôde Toujours"), ce vent dans les plaines ("La Lame Du Passée" à 9:03), cette atmosphère de place de village (les toutes dernières secondes de "Le Triomphe Des Douze"), cette pluie, ce vent, ce tonnerre et ces cloches funèbres en guise de conclusion au titre "Spectre Du Solstice" ou encore cette rivière qui coule sur "Enfant Du Lys".
Oscillant à peu de choses près entre sept et neuf minutes (à l’exception de cette introduction qu’est "Silence d’Octobre"), chaque titre se plaît à faire tourner inlassablement le même riff et les mêmes patterns de batterie. Les variations étant relativement peu nombreuses, les Canadiens misent ainsi sur la nature quelque peu aliénante de leur Black Metal pour créer une sorte d’atmosphère spectrale et toujours un petit peu contemplative tout en se montrant malgré tout très agressif. Une ambiance d’ailleurs renforcée ici par la voix arrachée et lointaine d’Athros et ses quelques spoken word ("Silence d’Octobre" ou "Le Triomphe Des Douze"). De la même manière, les mélodies épiques et désabusées décrites un peu plus haut sont elles aussi répétées par Forteresse ad-nauseam. Par ce travail mélodique tout à fait primordial, les Canadiens viennent renforcer et paradoxalement contrebalancer l’aspect répétitif de leurs compositions. Comment ? Et bien difficile à expliquer, c’est davantage une question de ressentie. Disons que la force et la puissance évocatrice de ces mélodies font qu’elles deviennent très vite l’élément principal de chacune de ces cinq compositions, faisant ainsi passer le reste de l’instrumentation au second plan. A l’inverse, ces mêmes mélodies qui se répètent sans cesse ne font que multiplier l’aspect déjà particulièrement redondant de ces mêmes compositions. Un parti pris qui depuis 2006 et la sortie de
Métal Noir Québécois n’a pas été sans laisser son lot d’auditeurs sur le bas-côté mais qui, c’est un fait, donne une saveur bien particulière au Black Metal de Forteresse.
S’il ne tient pas aujourd’hui la comparaison face à son successeur bénéficiant d’une bien meilleure production,
Crépuscule d’Octobre n’en reste pas moins un album chargé en émotions dont la capacité à faire voyager dans d’autres contrées, dans d’autres temps, ceux qui n’ont pas peur des riffs et des mélodies qui se répètent à outrance, reste intacte. Avec ce disque composé en grande partie à l’époque de la sortie de
Métal Noir Québécois, Forteresse renoue ainsi avec ce Black Metal épique et agressif qui lui avait alors permis de se faire un nom dans l’underground. Un retour inattendu qui aura su raviver la flamme d’un public passablement échaudé après deux albums que beaucoup jugent trop portés sur les atmosphères.
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