Obed Marsh - Înnsmouth
Chronique
Obed Marsh Înnsmouth
Dans une soirée entre gens de bonne compagnie, de même(s) milieu(x), érudits et policés, aristocrates dans une juste mesure, femmes et hommes de goût, alors que tu seras parvenu à glisser une phrase dans laquelle tu auras au préalable intégré les mots doom et Australie, tes convives sauront. Ils sauront que tu es toi aussi, femme ou homme de goût. Femme ou homme justement et précisément instruit. Car, de fait, Australie et doom accouchent souvent du meilleur. De l’excellence. De Mournful Congregation et Disembowelment à Rote Mare et Murkrat, ce pays est béni des profondeurs. Alors quand tu vas dire que toi aussi, tu connais un groupe – inconnu – qui peut venir compléter ce panel, pour sûr mon ami, on devrait t’écouter. Et tu remercieras Thrasho de t’avoir mis la puce à l’oreille.
Obed Marsh est jeune. Innsmouth est son seul et unique album. Mais Obe Marsh est né sous une bonne étoile. A priori. Son doom très teinté de funeral et de black devrait te ravir. Son Prologue va te mettre de suite dans l’ambiance (aquatique ici) ; tu es un plongeur et tu viens de te faire happer dans une faille sous-marine qui t’emmène Dieu sait où. En revanche, il y fait nuit. Vraiment. Le gargouillis de l’eau va te rassurer un peu, au début. Mais très vite, dès Innsmouth Ritual, tu vas saisir. Tout va s’éclairer. Ou s’obscurcir plutôt. La voix, trempée et diluée dans les profondeurs des océans, revient en échos sourds réguliers alors que la rythmique martèle sans relâche, sans respiration et que les guitares tapissent l’espace sonore sans laisser aucun interstice. Basé sur la nouvelle d’H. P. Lovecraft, cet album relate les prémices d’une race sous-marine vouant un culte aux Grands Ancients. On ne saurait mieux retranscrire ce premier vrai morceau, tout de lourdeur et d’étouffement réunis dont bien des aspects se rapprochent du grand Esoteric (la façon de faire « tourner » la rythmique, les complaintes de la voix…, marquant sur Usurpers, Desquamate ou Seeping Wombs par exemple).
Obed Marsh (le nom du capitaine dans la nouvelle) appuie son propos sur un son très approprié, organique, un brin fouillis mais juste assez pour colorer les morceaux d’une trace de suie agréable (la profondeur du son sur Esoteric Order ou Desquamate ou encore sur Usurpers où l’on a l’impression que le son des tambours vient des entrailles de la Terre). La basse occupe parfaitement l’espace ; elle joue un rôle à part, qui ne se réduit pas à suivre les guitares mais appuie au contraire les changements de rythme ou les relances (Esoteric Order ; Desquamate). Quant aux lead, ils parsèment fréquemment les titres de petits arrangements aériens qui offrent, seuls, quelques respirations (sur Usurpers ou Desquamate par exemple où les guitares dressent de belles mélodies) ou apportent de la diversité par des attaques plus franchement black metal (le départ de Deficient par exemple).
Ce nouveau venu est séduisant. Obed Marsh développe un concept assez courant pour le genre mais le fait avec beaucoup de talent et d’authenticité. Son funeral doom ne démérite pas, dans un genre ultra exigeant. Les éléments sont réunis pour que l’amateur passe le moment sombre recherché ; il aurait tort de bouder son plaisir.
| Raziel 14 Janvier 2017 - 1020 lectures |
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