Il va bien falloir parler de ce disque. Ce disque qu'on n'attendait pas et à juste titre, l'EP
Doubt ne nous ayant pas particulièrement convaincu. Mais aussi, pour être honnête, car les premiers retours et leurs émois parlant, les lèvres tremblantes, de « shoegaze dans le doom », de « beauté pure », nous avaient dégoûté d'avance. Du doom moderne à chanteuse moderne qui enveloppe de sucreries modernes ? On vaut mieux que ça !
Il va bien falloir dire qu'on s'est trompé. Que ce disque est bien tel qu'il a été présenté un peu partout : une beauté, où se marie doom metal et... plein de choses, atmosphériques assurément, donnant naissance dans leurs unions répétées à ce don du ciel qu'est Kristina Esfandiari. Car King Woman, plus qu'un mélange entre deux-trois-quatre genres, est avant tout une rencontre avec cette femme, qui convoque Hazard County Girls, L7,
Fvnerals,
SubRosa évidemment mais également Acid King et ses plus grandes heures d'amour (
III, c'est-à-dire) dans son église, où elle déclame de son pupitre une oraison lascive et grave pour chacune d'entre elles. Hantée, semblant surplombée chaque moment de
Created in the Image of Suffering, sa voix déroute par son mixage puis enchante en partie pour cette raison, lui donnant des allures de voûte sacrée offrant un peu de sa supériorité à chaque chose qu'elle englobe, protectrice bien que triste.
Il va bien falloir, une nouvelle fois, évoquer quelques sentiments, avouer que l'on a également eu les lèvres tremblantes. Tremblantes d'amour, de communion partagée avec un album qui ouvre ses bras avec largesse, dans son son, lourd, chaud, palpable pour peu que l'on soit capable de synesthésie, mais aussi pâle, virevoltant au ras du sol, lumière grise réconfortant les êtres gris. La différence avec le fameux album d'Acid King déjà évoqué, le rouge se faisant cendre et or, le sang bouillant devenant statique, laissant le cœur et ses pulsations en suspension trente-huit minutes durant. La souffrance et son image, celle où elle se reflète et s'extériorise, celle où elle se montre et s'approche, où on peut se laisser envoûter par elle, souffrance sublimée pour être oubliée.
Created in the Image of Suffering fait du bien, un bien tel qu'il s'accroche à nous comme une prescription que l'on garde en poche pour ne pas omettre sa prise journalière, un bien que seul le doom peut donner, ce rock fatigué, lavé, délavé, rincé, mais vital en dessous de tout cela.
Il va bien falloir applaudir les autres instruments, appuyer que King Woman ne compte pas qu'une femme mais aussi quelques rois. Ces rois qui en rappellent
d'autres blessés, en ce qu'ils déroulent également leur doom comme une autorité assise à sa juste place. Parfois, disons-le, un peu routinière, on le sent bien dans une fin de disque revenant à des hauteurs plus humaines après un pic où le paradis est à portée de main (inutile de citer le morceau en question : vous l'écouterez et vous saurez), mais n'oubliant jamais sa noblesse derrière la tradition, que ce soit dans ses guitares au groove tranquille et intense à la fois ou sa batterie tambourinant ce qu'il faut, transformant ce conte en ordre de rassemblement.
Il va bien falloir conclure, arrêter de discourir car l'on risque de décortiquer ce qui ne doit pas s'analyser, tant il relève d'une certaine magie. Malgré tout, on se sent obligé de rappeler que ce début en reste un, qu'il semble encore un peu timide derrière son absence de pudeur, qu'il lève le voile dès le départ mais laisse quelques vides à combler, où l'on pense à de belles choses à venir. Ce qui reste une réussite pour King Woman, ce groupe jeune au style dans l'air du temps, mais parvenant à atteindre de sa manière personnelle une certaine essence du doom metal faisant que, dans la foule des formations à femme fatale, il est un des rares noms à mettre au-dessus des autres. Excusez du peu.
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