Blitzkrieg - Judge Not!
Chronique
Blitzkrieg Judge Not!
Les mauvaises langues disent que le peu de notoriété qu'ait jamais obtenu Blitzkrieg vient de la reprise de leur morceau éponyme par Metallica. Et elles n'ont pas tout à fait tort. Les Anglais font partie de ces innombrables groupes de la fin des seventies et du début des eighties regroupés dans ce que l'on appelle la New Wave of British Heavy Metal, vague qui a eu un rôle important dans l'évolution de notre musique préférée. Peu sont cependant devenus des stars malgré des albums de grande qualité à foison pendant ces quelques années. Iron Maiden bien sûr, Judas Priest aussi même s'ils étaient déjà là bien avant et qu'ils ne sont pas tout à fait rattachés à la NWOBHM, ou encore Saxon, dans une moindre mesure. Les autres ont soit connu des carrières éclair soit continué à jouer, cantonnés à un rôle de second couteau et suivis aujourd'hui que par quelques irréductibles. C'est le cas de Blitzkrieg qui a connu son "heure de gloire" sur ses deux démos de 1980 et 1981 puis, après une séparation de trois ans pendant laquelle le chanteur Brian Ross a rejoint Satan, son premier full-length A Time Of Changes (1985). L'une des toute meilleures œuvres de cette scène malgré sa sortie tardive par rapport aux autres classiques de l'époque. La suite de la carrière de Blitzkrieg sera faite de splits et de reformations avec des changements de personnel à la pelle et une poignée d'albums que je n'ai jamais écoutés jusqu'à Back From Hell en 2013. Un disque moyen, surtout en comparaison du Life Sentence de Satan sorti la même année, meilleur comeback de tous les temps. Depuis, Blitzkrieg a changé de batteur et de bassiste, a signé chez Mighty Music et vient de livrer son neuvième album studio, Judge Not!, arborant toujours sur sa pochette résolument old-school la fameuse mascotte dragon-mouche humanoïde.
Tout en sachant pertinemment que le groupe n'évoluerait pas d'un iota et ne sortirait pas non plus l'album heavy metal de l'année, la question était au moins de savoir si les Britanniques feraient mieux que Back From Hell, pas complètement dégueulasse mais loin d'être inoubliable. La réponse s'avère positive, ce Judge Not! montrant plus d'inspiration. Il ne s'agit cependant pas d'un oui franc et massif car l'opus connait des hauts et des bas. L'expression à boire et à manger prend ici tout son sens. Comme prévu pas de surprise, Blitzkrieg ne se réinvente pas et nous propose un heavy metal sombre mid-tempo très calibré qui alterne entre le bon, le pas trop mal et le pas terrible sur onze morceaux pour plus de cinquante minutes un peu trop longues vu la qualité pas toujours au rendez-vous. Ça commence d'ailleurs plutôt mal sur "Who Is Blind", après la courte intro "Heretic" à l'ambiance menaçante. Alors qu'un titre d'ouverture se doit de prendre l'auditeur à la gorge, celui-ci n'a que du riffing générique et plan-plan à nous proposer, sauvé par les passages plus lents et mélodiques avant les refrains. Le son de batterie s'avère en plus trop synthétique. Pire, le chant de Brian Ross, dont j'aime d'habitude beaucoup le timbre chaud à l'ancienne caractéristique, se fait carrément monotone et plat. Bref, on s'ennuie quelque peu sur ce premier morceau! Là, on se dit que ça ne va pas trop le faire. "Forever Is A Long Time", malgré son titre assez con ("l'éternité c'est long", tu m'étonnes!) et son histoire de vampire présentée par des spoken words kitschouilles, redonne un peu d'espoir. Riffing plus intéressant quoique toujours ultra classique, leads mélodiques pas dégueux, twin guitars affriolantes, chant plus attrayant, ça va mieux. Le refrain ne restera par contre pas gravé en mémoire et pas d'amélioration en vue dans les solos. "Reign Of Fire" continue de redonner le sourire grâce à un riff principal mid-tempo très conventionnel mais qui passe très bien, ainsi que des vocaux inspirés même si ça pêche encore sur le refrain pas vraiment catchy. Les leads s'améliorent, notamment la brève séquence en twin guitars avec un vrai bon feeling mélodique. Les solos restent par contre sans grand intérêt. Je ne le sentais pas ce "All Hell Is Breaking Loose" vu le titre vu et revu et j'avais raison de me méfier. Si on valide le démarrage cool à la basse, on déchante vite à cause du riff et du chant trop mollassons. On ne s'arrêtera pas de bailler même quand le batteur appuiera davantage le mid-tempo. Seule satisfaction au changement de riff après la deuxième minute quand le motif se pare d'une bonne mélodie en fin de bouche, là on a enfin envie de lever le poing! Les cris aigus finals permettent aussi de clore le morceau sur une bonne note. Il restera néanmoins parmi les titres dispensables de l'opus. Pas du tout le cas de "Angels Or Demons" qui fait partie des meilleurs grâce à un riff pêchu, toujours mid-tempo mais très efficace, et des lignes de chant dynamiques. Les montées aiguës sur la dernière syllabe du titre du morceau qui constitue une partie du refrain percent bien les tympans, jouissif! Certains grinceront peut-être des dents. Moi ça m'éclate! Les deux morceaux suivants vont changer un peu de registre en simplifiant encore davantage l'écriture. "Loud And Proud" est un peu le hit hard and heavy de l'album. Du bon gros mid-tempo basique tout con et un refrain à chœurs fédérateur, ce titre efficace en diable à défaut d'être vraiment génial est taillé pour le live. On y trouve du Judas Priest, du AC/DC, du Accept et du Saxon, pas étonnant de la part de Blitzkrieg qui a toujours su rendre hommage à ses influences. On trouvera d'ailleurs en bonus track une reprise du "School's Out" d'Alice Cooper que je n'ai pas eu dans ma version promo. "Without You" va encore plus loin dans le mainstream puisqu'on nage carrément dans le hard FM. Et j'avoue plutôt apprécier cette power ballade malgré le côté facile et niais des paroles ainsi que le chant parfois limite (mais touchant) du guitariste Alan Ross qui prend ici la place de son vénérable père. On a même enfin le droit à un solo correct, même s'il ne fait que reprendre la mélodie principale. Blitzkrieg retombe ensuite dans ses travers sur un "Judge Not, Lest You Yourself Be Judged" à l'ambiance sombre mais générique à mort et qui ne décolle jamais. Ce sera la dernière fausse note importante de Judge Not! qui finit plutôt bien sur ses deux derniers morceaux. Le macabre "Wide Legged And Headless", qui se montre très efficace avec son riff un peu speed, sa lead simple et entêtante et ses lignes de chant plus variées qu'à l'accoutumée pour donner vie au personnage troublé de l'histoire. Puis "Falling Into Darkness" vient clôturer l'opus pendant plus de sept minutes sur un rythme plombé et une atmosphère noire, comme l'indique le titre. Quelques défauts viennent quelque peu entacher le morceau comme ce riff saccadé enfantin sur les couplets mais l'intro en arpèges, l'ambiance lourde, le refrain qui fait mouche et les paroles reprenant l'histoire de Dorian Gray en font tout de même une réussite.
Judge Not!. Bah si un peu quand même, il faut bien les gars! Ce petit résumé des onze pistes montrent bien le caractère en dent de scie, de l'opus qui égratigne sa qualité globale, même si les pics restent plus nombreux que les creux. Le bon voire très bon côtoie le banal sans grand intérêt. Des lignes de chant bien pensées qui restent en tête font place à des rythmiques et mélodies vocales poussives et monotones, quelques leads agréables se démarquent des solos qui sont plus basés sur des effets de distorsion ou sur une ou deux notes tenues longtemps que sur un travail mélodique réfléchi, des riffs efficaces qui donnent la patate se mêlent à d'autres riffs génériques ennuyeux. On le sait, Blitzkrieg n'a jamais eu le talent de Satan et ce n'est pas avec ce Judge Not! que les rôles s'inverseront. Niveau riffing, technique, vitesse de jeu et feeling mélodique, l'autre groupe de Brian Ross évolue dans un autre monde. En évitant de comparer Blitzkrieg et Satan toutefois (les deux groupes sonnent différemment et c'est très bien comme ça), et malgré un Brian Ross pas toujours inspiré que ce soit sur ses refrains ou ses couplets, ainsi que des guitaristes qui ne forcent pas trop leur talent d'écriture, ce Judge Not! n'est pas du tout une sombre merde. Trois morceaux ("Who Is Blind", "All Hell Is Breaking Loose" et "Judge Not, Lest You Yourself Be Judged") pour un quart d'heure en moins et on aurait même eu un album vraiment pas mal malgré les limites de la formation. En l'état, Judge Not! ne fait tout de même pas tâche dans la longue discographie du gang d'outre-Manche qui arrive à faire mieux que son disque précédent, ce qui est déjà un bon point. Bref, ça s'écoute finalement pas trop mal et les fans nostalgiques de la NWOBHM seront contents de voir que le cœur de cette antique formation, certes fatiguée, continue de battre pour ce bon vieux heavy metal.
| Keyser 7 Juin 2018 - 708 lectures |
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