Infernal Execrator - Obsolete Ordinance
Chronique
Infernal Execrator Obsolete Ordinance
S’il y’a des formations qui cultivent le silence pour mieux se faire oublier ça n’est pas le cas du quatuor de Singapour qui après un début de carrière un peu poussif nous gratifie depuis 2008 de quasiment une sortie par an (voire même plus). Si le Split est son format favori en revanche pour les albums c’est autre chose car celui-ci n’est seulement que le deuxième de sa carrière (après le très bon « Ad Infinitum Satanic Adherent » de 2014), mais qui à l’instar de son prédécesseur est une vraie réussite et se digère tout aussi facilement malgré un style difficile d’accès. En effet musicalement la bande nous gratifie d’un mélange entre un ANGELCORPSE plus Black-Metal (via notamment une voix très similaire à celle de Pete Helmkamp) et les premiers INFERNAL WAR (pour la force de frappe), du coup il est logique que ça tabasse, mais ça ne fait heureusement pas que cela non plus. Car si le War Metal privilégie forcément la férocité et la brutalité il a aussi tendance à vite tomber dans un schéma caricatural et répétitif, pièges qu’évitent justement les asiatiques grâce à une dose de subtilité qui ne vient pas gâcher l’envie d’en découdre.
Cependant de prime abord cette dernière n’est pourtant pas flagrante sur la classique et réussie doublette « Infernal Execrator (True Blasphemous Conqueror) » - « Incinerate Halakhah Theorem », tant ici les blasts sont omniprésents et majoritaires donnant une sensation d’imperméabilité musicale. Pourtant quand on y prête une oreille attentive on s’aperçoit qu’ils contiennent chacun quelques cassures de rythme, ainsi que des parties en mid-tempo histoire d’aérer tout ça et de permettre de ne pas déjà être lassé au bout de peu de temps. Si les titres sont pour la plupart relativement courts c’est une très bonne chose vu leur écriture primitive, et cela va d’ailleurs se confirmer avec le surpuissant « Scions Of Irreverent Bloodshed », où après une introduction lente et étouffante le reste va s’emballer afin de n’être qu’un déluge de haine où la batterie se lâche au niveau de la vitesse qui ne ralentit pratiquement jamais. Après cette tempête rageuse (probablement la plus radicale de cette galette) les mecs vont proposer une facette différente de leur œuvre qui commence sur le diversifié et très bon « Northern Superiority » où quelques hammerblast font leur apparition, ainsi qu’un riffing et un jeu de batterie inspirés du Thrash et vraiment réussis. Du coup entre les palettes de matraquage en règle ces moments différents sont vraiment bienvenus, d’autant plus quand ils s’intègrent parfaitement avec le reste, comme cela sera aussi le cas sur « Quintessence Of Timeless Void », où là ce sont carrément des parties remuantes à mort qui se font entendre (après un démarrage qui est monté lentement mais sûrement en pression). Au milieu des longues explosions ces passages là-aussi amènent autre chose que ce qu’on a pu écouter jusqu’à présent, et même si elle se termine de manière un peu brusque cette compo passe comme une lettre à la poste tant elle est entraînante.
Après cela retour à une forme plus directe et sans concessions, avec d’abord « Supreme Barbarous Ordo » à la violence exacerbée et que rien n’arrête, hormis quelques coupures et cassures ici et là, dont aucune forme de lassitude ne semble émerger à l’instar du morceau-titre. En effet ici aussi l’ordre est de ne pas faire de quartier et ça va fracasser quasiment sans discontinuer, sauf pendant un court moment tribal qui semble dire aux ennemis qu’il est encore temps de renoncer à la bataille imminente. Celle-ci arrive avec « Absolute Celestial Condemnation » au début lent et entrainant qui fait office d’introduction, avant l’arrivée du combat envoyé par une longue série de parties blastées avant de nouveau retrouver ce rythme plus posé, comme pour signifier que tout est fini et que les meilleurs ont gagné. Sans être d’une complexité folle cette ultime plage se montre plus ambitieuse que les autres, déjà par sa durée (presque huit minutes) comme par son découpage et prouve s’il le fallait encore que les gars savent assurer quand ils sortent un peu de le terrain de chasse favori.
Et même si la production globale aurait pu gagner en puissance (les guitares sont plutôt en retrait par rapport à la batterie très en avant) INFERNAL EXECRATOR fait mouche avec sa technique simple et son écriture sobre et ciselée, confirmant ainsi qu’il mérite mieux que son statut d’éternel outsider local derrière les intouchables IMPIETY. S’il est évident que ces derniers sont encore aujourd’hui la tête de gondole du Metal singapourien ils ne sont heureusement pas tout seuls et démontrent une fois encore que leur pays dans bien des domaines est vraiment une exception, au sein d’une région où l’instabilité politique et religieuse est source de nombreux conflits. Signés désormais sur le prestigieux label national (Pulverised Records) Lord Ashir et ses acolytes ne réinventent rien mais maintiennent une qualité constante dans leurs sorties, même quand il s’agit d’allonger son propos. Avec son concept, ses paroles virulentes et sa qualité intrinsèque ce second long-format n’a aucune prétention particulière, hormis celle de ne laisser aucun survivant après son passage. Il réussit en tout cas à conserver ce qui fait la force et la bestialité de ce genre guerrier, tout en évitant ses défauts récurrents et rédhibitoires trop souvent présents actuellement. Ceci est désormais suffisamment rare pour être signalé et mérite bien un coup de chapeau à ses créateurs dont l'intégrité n’est plus à démontrer tout comme leur motivation toujours intacte.
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