Abysmal Torment - The Misanthrope
Chronique
Abysmal Torment The Misanthrope
En près de vingt ans d’existence le tentaculaire combo de Malte n’a jamais été d’une grande productivité préférant la qualité à la quantité, tout en n’étant pas épargné par les changements de personnel et les aléas de la vie (avec notamment le décès tragique de son premier batteur Wayne Vella victime d’un accident du travail en 2010). Si on lui a régulièrement reproché de n’être qu’une copie en plus extrême de ses compatriotes de BEHEADED, celui-ci a continué contre vents et marées à balancer son Death brutal typiquement américain et ambitieux via des morceaux particulièrement longs et travaillés, qui détonnaient dans un style où les albums ne dépassent que rarement la demi-heure. Cependant ce schéma avait atteint ses limites sur le pourtant réussi « Cultivate The Apostate » mais qui finissait malheureusement par ronronner à force d’avoir été poussé à son maximum, du coup terminé les rallonges inutiles et place maintenant à quelquechose de plus direct. Car bien que conservant sa force et son schéma général l’ensemble se fait plus désormais condensé et expéditif via des morceaux qui ne dépassent jamais la barre fatidique des quatre minutes. Mais désormais plus calibrée que par le passé la musique du combo conserve néanmoins toute sa subtilité et se montre plus à son avantage qu’auparavant, car en étant moins diluée elle se révèle encore mieux et confirme l’indéniable qualité technique et d’écriture de ses créateurs.
Car le démarrage va confirmer cela avec le très bon et classique morceau-titre qui reprend tous les éléments connus des méditerranéens joués avec sérieux et application, mais sans jamais tomber dans la démonstration stérile et ennuyeuse. Dans la foulée « Second Death » continue sur la même base tout en densifiant encore son propos, et maintient la montée en puissance progressive de cette galette qui n’a pas fini d’être addictive. Car avec « Squalid Thoughts » et « Dread » on entre dans des passages plus massifs et pénétrants, voire presque suffocants tant on est pris dans un étau de lourdeur, et si la première partie de la doublette garde encore de la place pour les blasts et le mid-tempo la seconde les relègue totalement au second plan, leur laissant juste un peu de place à la fin pour s’exprimer. Même si la vitesse est peu présente la noirceur et le côté rampant proposés font mouche et compensent largement le manque de tabassage, prouvant encore une fois que les gars conservent leur sauvagerie même quand elle est plus maîtrisée.
Et puis doucement l’équilibre va s’opérer histoire de prouver qu’ils n’ont pas totalement levé le pied et conservent une rudesse à toute épreuve, tel qu’on peut l’entendre sur le terrible « Path Of Impiety » aux deux parties distinctes. Ici le grand-écart est de mise et voit aussi l’apparition d’un break tribal du meilleur cru et aussi d’un solo (une vraie rareté pour le groupe), pour affirmer encore un peu plus ce mélange entre l’ancien et le nouveau ABYSMAL TORMENT. Après le dispensable voire inutile interlude « The Pessimist » retour aux choses sérieuses avec le monstrueux « Strains Of Brutality » qui montre la facette la plus extrême et radicale de la bande, tant ici c’est une succession d’excès de vitesse tous plus grands les uns que les autres. Avec en prime des ralentissements massifs qui apparaissent de manière éparse, histoire de permettre de souffler un peu, et surtout d’éviter la linéarité présente de manière trop récurrente chez une grande partie de la scène Brutal-Death actuelle. « Worship None » sort également des sentiers battus car son démarrage remuant est mis en valeur par une grosse vitesse portée par un tapis de double et des gros riffs qui se mettent au diapason et font mal à la nuque, tant ça donne envie de se bouger dans tous les sens et pour headbanguer comme un malade, avant que « Iconoclast » ne clôt les débats de façon plus traditionnelle et tout aussi agréable.
Bien qu’osé et ambitieux le pari est largement réussi et l’ensemble s’écoute sans coup férir et ne possède pas de faiblesses majeures, grâce à ce mélange entre classicisme efficace et nouveauté agréable. Si auparavant la discographie des îliens avait tendance à s’essouffler avant sa conclusion il n’en est rien ici, car outre cette écriture qui va à l’essentiel cette nouvelle galette est aussi portée par une production impeccable et précise, où l’on se rend compte du jeu impressionnant de Max Vassallo derrière son kit et de Karl Romano à la basse (celle-ci étant très présente dans le mixage final). Et même si comme d’habitude les deux voix n’apportent pas énormément à l’ensemble, tant elles sont finalement assez similaires, elles sont suffisamment convaincantes pour qu’on se laisse happer par elles, à l’instar de cet album qui risque de diviser auprès des fans de la première heure mais qui a une foule d’arguments à faire valoir, si on se laisse le temps de bien l’appréhender et de passer outre certains préjugés.
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