Mavorim - Heimkehr
Chronique
Mavorim Heimkehr (Démo)
Combien d’histoires comme celles-ci avons-nous déjà entendu auparavant ? Celles d’artistes ayant eu à un moment de leur carrière le besoin de se retrancher dans une espèce de solitude salvatrice, de fuir le marasme urbain dans lequel beaucoup d’entre nous choisissons de nous enfermer bien souvent pour des raisons d’ordres professionnelles et/ou financières afin de renouer avec ses racines, son histoire, cette Nature aussi belle qu'envoûtante... Evidemment, je ne sais pas ce qui a poussé P. à quitter Hanovre pour la Bavière mais une chose est sûre, il me semble beaucoup plus facile de trouver l’inspiration une fois perdue dans ces montagnes verdoyantes où trônent quelques-uns des plus beaux châteaux allemands lorsque l’on a, entre autres, pour thèmes de prédilection le folklore national et le paganisme.
Formé en 2014 par un seul et même homme dont le CV n’a absolument rien de ronflant, Mavorim a depuis 2015 enchaîné les sorties à un rythme relativement soutenu. Quatre ans après sa formation, le one-man band fini par taper dans l’œil de ses compatriotes de Purity Through Fire qui lui offre un deal pour la sortie de son premier album paru en décembre dernier et lui proposent en parallèle de rééditer quelques-unes de ses précédentes productions. C’est ainsi qu’est ressorti en janvier dernier cette première démo intitulée Heimkehr (ou "retour aux sources" en allemand) parue initialement en mars 2016.
Pour cette réédition, les deux parties ont fait le choix de proposer un nouvel artwork. Si ce château délabré qui trône vaille que vaille sur sa colline semble être celui déjà présent sur l’édition 2017 proposée par le label russe Cold Breath Of Silence, cela ne doit pas vous empêcher pour autant d’apprécier tout ce qui se cache derrière cette photographie qui malgré une rigueur et une sobriété implacable possède, en tout cas chez moi, un pouvoir attractif particulièrement fort. Ce genre de cliché a beau être d’une simplicité confondante, il s’en dégage pourtant toujours quelque chose de terriblement attirant. Une menace glaciale et pourtant séduisante, la promesse de choses cachées et interdites... Bref, une évocation purement visuelle mais néanmoins puissante de ce que l’on peut trouver à l’écoute d’un album de Black Metal de ce genre, ni plus ni moins.
À l’image de cet artwork, la musique de Mavorim n’a rien de très originale elle non plus. D’influence teutonique évidente, elle puisse l’essentiel de son inspiration du côté de ses sulfureux compatriotes d’Absurd. Un Black Metal plutôt orienté mid-tempo (mais pas que) qui a fait de ses mélodies épiques et touchantes son cheval de bataille. Et c’est en effet grâce à ce dernier point que P. et Mavorim tirent leur épingle du jeu. Il faut dire que l’Allemand semble savoir comment s’y prendre pour attraper l’auditeur par les sentiments et l’embarquer avec lui dans ces paysages bucoliques de Bavière. L’illustration la plus parfaite ici est sûrement le titre "Im Sterben Vereint" dont la mélodie entêtante et va-t’en-guerre dégage quelque chose de noble et d’assez grandiose. Une fierté toute germanique à la fois raffinée et en même temps implacable devant laquelle on ne peut que finalement déposer les armes en signe d’abdication. Evidemment ce n’est pas le seul exemple sur lequel on retrouve ce sens particulièrement aiguisé de la mélodie infaillible. Outre ces trois titres instrumentaux faisant office d’introduction ("Heimkehr (Intro)"), d’interlude ("Rast") et de conclusion ("Aufbruch (Outro)"), d’autres titres comme "Was Auf Erden Wandelt", "Entgleise Aller Menschlichkeit" ou "Träume", recèlent eux aussi de quelques moments de grâce (parfois soulignés par l’utilisation d’un clavier comme sur "Träume") évoquant tour à tour la nature, la mort ou bien encore ce folklore d’antan si cher à Mavorim.
D’un point de vue rythmique, comme je l’ai déjà évoqué plus haut, la musique du one-man band allemand ne figure clairement pas parmi les plus démonstratives qu’aient porté le Black Metal. Si "Was Auf Erden Wandelt" semble vouloir faire illusion avec son côté résolument Punk dans les riffs ainsi que dans certaines de ses accélérations, le naturel reprend très vite sa place avec "Entgleise Aller Menschlichkeit" à la dynamique bien plus entêtante. Même constat sur "Kein Licht" malgré un début sur les chapeaux de roues et un rythme général un peu plus soutenu et bien entendu sur l’excellent "Im Sterben Vereint" marqué lui aussi par quelques attaques furtives. "Träume" joue quant à lui la carte d’une certaine ambivalence avec des passages menés le couteau entre les dents et d’autres plus modérés et toujours aussi entêtants. Une diversité rythmique évidemment bienvenue qui permet à cette démo de ne pas souffrir d’un côté trop plan-plan souvent malvenue pour ne pas dire handicapant.
Dans le grand respect d’une tradition allemande qui n’offre naturellement que bien peu de libertés, Mavorim livre avec Heimkehr une première démo parfaitement maîtrisée qui, en dehors de ce lien de parenté avec Absurd que certains jugeront peut-être trop évident, ne souffre finalement d’aucun véritable défaut si tant est que l’on soit à l’écoute de ce genre de Black Metal ne cherchant ni à époustoufler par le nombre d’attaques éclairs dispensés ni à mettre à genoux par la puissance de ces dernières. Non, le credo de Mavorim est plutôt celui d’un Black Metal racé et épique évoquant une certaine noblesse toute germanique et en ce qui me concerne, je suis absolument sous le charme.
| AxGxB 19 Mars 2019 - 958 lectures |
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