Equipoise - Demiurgus
Chronique
Equipoise Demiurgus
Mettez de côté le nom de groupe prêtant à sourire (« équilibre » en français mais aussi marque de stéroïde pour bodybuilder) et la pochette pastel « too much » entre hommage à Nocturnus et jaquette rétro de shoot’em up des années 90 (R-Type mon amour), Equipoise pourrait certainement vous plaire. Jugez plutôt de son line-up. Formé en 2015 à Pittsburgh par Nick Padovani et Zach Hohn, les deux jeunots recrutent le hurleur Stevie Boiser (Inferi, ex-Vale Of Pnath) et le bassiste Hugo Doyon-Karout (Beyond Creation) pour enregistrer un EP Birthing Homunculi sur une thématique du manga Full Metal Alchemist. Morceaux que l’on retrouve sur ce premier album Demiurgus (démiurge : « intelligence / entité supérieure / divinité création du monde ») sous le modeste label « tech » qui tire la bourre à l’historique Unique Leader, The Artisan Era (Augury, Inanimate Existence, Inferi, A Loathing Requiem). Le groupe américain se voit désormais épaulé du guitariste surdoué stakhanoviste Phil Tougas (First Fragment, Chthe'ilist, Zealotry, Funebrarum…), Sanjay Kumar (ex-Vale Of Pnath) et du frappeur Chason Westmoreland (ex-Hate Eternal, ex-The Faceless).
Echauffement des tympans, une grosse heure de tsunamis de notes pleine face vous attend. En manque de solo ? Tu en auras clairement pour ton argent. Trois guitaristes alternant leur parties dantesques et parfois accompagnés de guests (jusqu’à 5 solistes sur le pavé de 8 minutes « Dualis Flamel » !) dont Monsieur Christian Münzner (Alkaloid, ex-Defeated Sanity, ex-Obscura, ex-Spawn Of Possession) sur « Sigil Insidious » (hommage à Cosmogenis). Cela sans compter évidemment les soli à la basse fretless, le piano, les quelques effets orchestraux… Oui la digestion ne sera pas aisée. Je peux comprendre l’avis de certains face à cette overdose de notes mais une fois appréhendées, les compos de ce Demiurgus arrivent à rester cohérentes et d’une fluidité exemplaire sans tomber dans l’astiquage outrancier imbuvable (Rings Of Saturn). Idem pour les aspects orchestraux abusifs au son plastique (syndrome Fleshgod Apocalypse), ils restent au final assez discrets dans le mixage laissant la part belle aux cordes. Bien heureusement pour laisser reposer les neurones, le groupe a prévu de brefs interludes instrumentaux flamenco entre chaque morceau mais aussi quelques breaks. Mention particulière au groovy (rare pour le style pratiqué) « A Suit Of My Flesh » (2:53) ou l’éthéré et expérimental « Squall Of Souls (avec carrément une cithare à 2:06).
Chapeauté par son fondateur Nick Padovani, la patte des deux autres guitaristes arrivent malgré tout à se faire ressentir. Ceux vénérant le jeu de Phil Tougas seront comblés, le gaillard propose ses leads sur tous les morceaux (en regardant les crédits) et sa guitare classique (qui se passe encore en boucle « L’entité » ? Bibi) pour des passages flamenco superbement exécutés avec le son bien connu d’Hugues Deslauriers (responsable des galettes de First Fragment). Une musique méchamment « catchy » fortement imprégnée (trop ?) des Necrophagist (la base), Obscura, Gorod et Beyond Creation. Impact de « Alchemic Web of Deceit », les mélodies chaudes de l’imparable « Waking Divinity » (comme un doux rappel de Son Of Aurelius) ou le final démentiel « Ouroboric ». Dans les doléances, certainement que la galette (plus d’une heure au compteur) aurait pu être raccourcie (les 8 minutes trop copieuses de « Cast Into Exile ») et des compositions plus affutées (certains passages ont comme une saveur déjà vécue). Bémol sur le son de batterie (caisses et cymbales) bien trop compressé et noyé dans l’amas de piste de guitares alors que le bonhomme propose quelques subtilités de jeu en adéquation avec le reste des instruments (défaut majeur de Dasein à mon sens). Niveau vélocité rien à redire, ça envoie. Le chant criard un peu poussif en lassera lui peut-être quelques-uns mais le débit et le guttural rattraperont, à noter la présence de Julien Deyres (Gorod) sur « A Suit Of My Flesh ». Et tout cela sans « vocoder », ouf.
Après Archspire, un autre groupe « tech » qui devrait faire débat chez les puristes. Clairement que Equipoise aurait pu rogner certains passages et limiter son instrumentation. Pour autant après mal d’écoutes pour assimiler le bestiau (bien moins difficile qu’un Dasein), l’accroche de ce Demiurgus fait indéniablement son effet sur moi, même ses soli à outrance. Plus mélo « direct » que prog et loin du death moderne plastique et/ou pompeux habituel, ce premier album pourra certainement redonner le sourire aux anciens adeptes d’Obscura ou Beyond Creation. Rien de bien révolutionnaire certes mais une efficience et exécution redoutables (avec le tampon Phil Tougas) qui présagent d’un avenir des plus prometteurs.
| Mitch 4 Mars 2019 - 3242 lectures |
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