Vale Of Pnath - The Prodigal Empire
Chronique
Vale Of Pnath The Prodigal Empire
Cet été morose (météo et sorties Cds) peut désormais prendre fin. Trois années que l’on attendait l’album de Vale Of Pnath (référence à Lovecraft) ! Enregistrer un premier EP autoproduit (distribué par le label Tribunal Records plus tard) de cette qualité après le lycée laissait présager d’un futur prometteur. Une baffe sonore mélangeant le plus habilement possible metal mélodique et technique scandinave avec celui d’Amérique du Nord. L’écurie « deluxe » Willowtip Records ne s’y est pas trompée en les signant début 2010. Pourtant face à certaines obligations extra-musicales, le groupe prendra du temps à composer et subira quelques chamboulements de line-up (les départs du frontman ainsi que du batteur). Mais les compositions sont désormais fin prêtes. Comme pour l'EP, les Américains enregistreront leur galette au studio « Flatine Audio » de Dave Otero (Cephalic Carnage, Cobalt, Demonica).
A premier abord, si l’on suit la description du groupe et la liste des influences « références du genre » (Anata, Arsis, Neuraxis, Necrophagist, Decrepit Birth, Spawn Of Possession…) alliée à un côté « moderne », Vale Of Pnath pourrait figurer dans ce tas de groupes pré pubères surfant sur la vague « death technique » à la mode. Néanmoins il arrive parfois que la surprise soit de taille (Son Of Aurelius l’année dernière). Et si vous aviez écouté leur EP, comme moi, vous vous seriez jetés sur cette offrande. Je pensais d’ailleurs que les Américains allaient reprendre des titres de ce premier enregistrement (ce qui est souvent le cas pour les débuts d’un groupe), la chronique me semblait donc dispensable. Que nenni, Vale Of Pnath propose ici 9 morceaux totalement inédits. Autant vous dire de suite que les premières écoutes seront assez déroutantes voire décevantes… Le groupe de Denver monte un bon cran au dessus en termes de complexité, pondant des titres alambiqués au possible loin du côté primitif de l’EP. Le rouleau compresseur auditif que l’on retrouvait sur l’ouverture « A Witness To... » et « ...A Disoriented Blur » demeure différent cette fois (je vous rassure, l’introduction death/black velu de « Legacy Of Loss » saura vous coller au siège). Ne comptez pas vous familiariser avec les morceaux sur quelques écoutes désintéressées. Quant à pouvoir décortiquer et maîtriser chaque titre, cela devrait nécessiter quelques torsions de neurones... Les structures « barrées », une musique majoritairement « up tempo » ainsi que la pléthore de riffs techniques et d’arrangements donneront la tasse pour sûr, l’étiquette « technique » n’a pas été volée, vous en aurez pour votre argent. Les heures défilent et sans être rassasier, un certain plaisir exhale enfin, votre nuque se dénouera même (le titre éponyme ou le combo fatal « Time Of Reckoning » / « Sightless » picotent). Vous commencerez alors à retrouver la patte des guitaristes et peu à peu à dompter la bête, aidés de passages plus « aérés » (« simplistes » ?) voire progressifs et de mélodies entêtantes (l’épique et « basique » « Mental Crucifixion », le tube « Time Of Reckoning », les tremoli typiquement suédois de « Cerulean Eclipse »). Chose qui permettra de refroidir les oreilles en surchauffe et d’éviter le suppositoire de Doliprane.
Malgré une production relativement synthétique de Dave Otero (défaut qui avait suivi Martriden), la musique ne demeure pas fade pour autant, quelque chose s’y dégage. Vale Of Pnath use d’une atmosphère sombre et froide calquée sur leurs influences black metal d’Europe du Nord, confirmé sur des titres comme « Borne Extinction » (en demi-teinte) et l’interlude « Poisoned By Prosperity » (les riffs acoustiques typiquement black/death suédois) ainsi que de nombreux passages disséminés. Il reste cela dit encore pas mal de progrès à faire pour ressentir l’émotion de leurs références. Le groupe maîtrise difficilement cet aspect là, « Borne Extinction » ne fonctionne pas du tout sur moi… A affiner. En continuant dans les remarques qui fâchent, impossible pour eux de ne pas se faire attaquer par les « anti-core ». Un chant modulé, de rares passages saccadés, une production moderne (guitares midi « 8 bits » et batterie peu naturelle), ils sont jeunes… Bref le raccourci « deathcore » devrait encore jaser à tort, nous sommes ici à des années lumières de ce style. Le nouveau grogneur alterne effectivement comme son prédécesseur chant criard et guttural avec une balance penchant clairement pour ce dernier (quelques effets vocaux sont à noter). On se plaindra peut-être d’un léger manque de puissance dans les hurlements par rapport à l’EP (malgré un très bon débit). Rien d’alarmant.
L’excellence a été frôlée de peu. Pourquoi ? Un ou deux titres supplémentaires aurait été fort appréciable (un album légèrement trop court), la touche « black » gagnerait à être affûtée et puis on regrettera cette furie antérieure. Le groupe propose quelques poussées sur le point d’exploser mais reste malheureusement au final toujours sur la retenue. Vale Of Pnath joue en effet un peu trop la carte de la sécurité et du coup ne marquera peut-être pas autant qu’il le pourrait. Mais le plaisir d’écoute demeure, les compositions sont d’une richesse et d’une qualité exemplaire. Vous écouterez en boucle ce The Prodigal Empire pendant pas mal de semaines (d’ailleurs j’y retourne). Tout adepte de musique mélodique technique devrait approuver ce premier effort. Un des albums majeurs de cette année 2011.
| Mitch 10 Août 2011 - 4883 lectures |
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