Barbarian - To No God Shall I Kneel
Chronique
Barbarian To No God Shall I Kneel
On le sait tous et toutes, le revival à le vent en poupe. Dans une époque troublée qu'est la nôtre, les repères sont flous et l'avenir, incertain. Alors au lieu de s'engager dans les tourments de lendemains inquiétants, certains préfèrent revenir à l'insouciance, l'innocence et la pureté de plaisirs d'enfance. La nostalgie devient un antre, un cocon dans lequel revenir, afin de garder un peu de sa santé mentale.
Dans les années 80, en terme de musique et de création metalistique (si, si, ça existe, cherchez pas), tout était à faire car des chemins étaient tout juste ouverts, et il fallait défricher tout ça. Le Thrash ouvrait une voie Punk extrême au Heavy, donnant à plusieurs formations le goût de la colère, de la revendication et d'une attitude plus rock 'n roll que jamais – auto-destruction et bras levés contre le système, s'opposer à la masse...
Mais que reste-t-il, désormais, quand les chemins de l'extrême ont été balisés, voire galvaudés par des groupes qui voulaient rendre toujours plus accessible leur musique, ou quand la répétitivité de postures ont rendu les ficelles même pas visibles, mais criardes, voire ridicules ?
Eh bien il reste la nostalgie, seul rempart qui semble encore possible contre la fuite en avant et l'inquiétude que j'ai citées plus tôt.
Le Metal semble stagner, et nombreuses sont les formations à proposer du revival. En France, on a notamment eu HEXECUTOR, qui faisait la part belle au Heavy à la fois Thrash et Black, dans des entre-deux qui font revivre les balbutiements de la scène extrême des 80's.
BARBARIAN, de son côté, s'inscrit dans cette même voie et, depuis leur premier album en 2011, ils se sont lancés dans un mix de Thrash très orientée Heavy, épicé à la sauce Black bien rythmée de la première vague. Ils viennent ainsi avec un quatrième opus, intitulé « To No God Shall I Kneel », et on ne va pas se la cacher : si tu aimes l'entre-deux que proposaient les années 80 en terme de tâtonnements Thrash, Black et Heavy, tu trouveras ton compte là-dedans !
Entre CELTIC FROST, et ses « OUH ! » caractéristiques repris dans « Obtuse Metal » (lequel fait la part belle aux rythmiques Punk), le riffing Hard Rock à la MOTÖRHEAD sur « Birth and Death of Rish'ah » à 1:36 qui conduit à un final où le rythme, via une gradation résolument Heavy-Power aux mélodies surprenantes, saillantes et agréables, m'évoque énormément une efficacité d'un certain Bitter Loss du non moins certain ENTOMBED – parce que faut être hard rock jusqu'au bout –, t'es parti pour un grand-huit des saveurs d'antan ! Le tout se fait sous une production à la fois propre qui rend chaque piste bien lisible, mais avec ce grain assez particulier, où la basse s’immisce dans des interstices malins et où la gratte racle l'ensemble de ton oreille interne. Typiquement, si tu te lances dans « The Beast is Unleashed », tu vas plonger la tête la première dans un morceau Thrash à mort, avec ce riffing répétitif qui m'évoque des moments du Power and Pain de WHIPLASH, et cette rythmique à nouveau clairement Punk. Ce cinquième titre fait clairement dire que Barbarian use judicieusement de ses influences, nombreuses et variées et ciblées sur les années 80, créant inévitablement une grande palette de mélodies et de phases superbement articulées – quitte à aller dans le Heavy Power type « sword and sorcery » dans l'intro solennelle de « Hope Annihilator », qui met en avant des phases juteuses dans leur bouillon extrême.
Ce côté extrême, distillé dans l'ensemble, se permettra toutefois de ressurgir aux moments opportuns, comme avec « Sheep Shall Obey » qui débute sur le schéma du morceau précédent, jusqu'à une rupture à 2:50 virant vers un riff qui t'impose un poigne plus hargneuse. En gros, jusque là c'était à la cool, mais là on est sur quelque chose de plus énervé et puissant dans une forme de Thrash-Black en entre-deux qui monte comme il se doit !
Punk, Black, Thrash, Heavy, mélodique... Pas mal fourre-tout ce skeud ! Mais si le tout s'enchaîne sans souci sur des morceaux allant de 3 minutes 46 à 5 minutes 40, la machine s'enraye et montre des signes de faiblesses lorsqu'on dépasse les six minutes, hélas, lors des deux derniers morceaux. Si auparavant, tout était d'une efficacité redoutable, enchaînant des plans variés sans le moindre souci, on arrive ici à quelques limites, que ce soient les parties mid-tempo de « The Old Worship of Pain » sans un riff traînant qui impose une mouvement assez redondant (on pourra dire que c'est une phase de répit, sauf que le morceau a du mal à décoller passées les 3 minutes), ou les transitions plus laborieuses de l'ultime titre, comme si la machine n'avait plus de jus et commençait à craquer. En fait, j'ai le sentiment que ces derniers morceaux sont le pas de trop dans l'exploration de ce bouillon extrême : un registre de trop, et on sort de ce sur quoi le groupe est compétent. Lorsqu'il riffe sur un rythme engageant et groovy, il n'y a aucun problème, t'es carrément dedans ! Lorsque le rythme s'adoucit et qu'on lève un peu le pied, le tout s'embourbe et peine à se sortir de là.
Le groupe, sur cet album, apparaît comme parfaitement taillé pour des formats de 4 à 5 minutes, qui permettent d'aller à l'essentiel tout en mettant en avant deux ou trois riffs et phases rythmiques sous plusieurs aspects. Au-delà de cette longueur, j'ai la sensation qu'on se perd dans des transitions qui butent, alors que, jusque là, on avait une fluidité sans faille et des idées employées ni trop longtemps (ce qui évite la lassitude), ni de façon trop courte (ce qui fait qu'on n'est pas frustré).
Les deux derniers titres sont, pour moi, un peu longuet et en dessous du reste qui fonctionne plutôt bien !
Ainsi, Barbarian, sans être un grand nécromancien qui va redonner un éclat à un genre oublié, propose un taff d'une grande efficacité. Fait avec honnêteté et sincérité, cet album enchaîne les idées bien fichues. Il ne révolutionne rien mais, en tant que revival, apporte tout à fait ce sentiment de cocon, ce confort « à l'ancienne » qui fait headbang comme s'il n'y avait pas de lendemain puisque, de toute façon, il n'y en aura jamais.
Alors ramène tes potes, blaste ce skeud à fond, buvez des coups, et délirez comme si votre vie en dépendait : c'est de cette façon que l'album s'appréciera au mieux, car il est simple mais généreux, sans immense surprise mais également sans détour. Direct et pur, comme le plaisir que le groupe semble vouloir transmettre.
| MoM 13 Juin 2019 - 1119 lectures |
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