Avant
H.A.Q.Q., chaque album de Liturgy ressemblait à un miracle. En effet, chacune des œuvres du groupe mené par l’inénarrable Hunter Hunt-Hendrix avait, dès la première écoute, ce côté époustouflant, unique, qui aveuglait de sa superbe lumière en s’appropriant des éléments normalement situés du côté de la noirceur. Réussissant constamment à prendre une base black metal pour porter une musique mystique et abrasive empreinte de religiosité vécue à travers le cœur, les Ricains m’impressionnaient d’entrée dès les premières lancées, où il était alors impossible pour moi de discerner les qualités et les défauts, les hauteurs et les baisses. Acculé, emporté, je devais prendre le temps d’assimiler pour déconstruire, une fois que je m’étais habitué à la nouvelle direction que prenait la formation, celle-ci se renouvelant sans cesse.
H.A.Q.Q. peut se voir comme étant également miraculeux. Après un
The Ark Work posant, à sa façon, un point final à l’évolution de la formation, il paraît inattendu de voir sortir un nouveau disque de la part de Liturgy, d’autant plus après le départ du batteur Greg Fox – qui portait à lui seul une grande part du son particulier de la bande – ainsi que celui du bassiste Tyler Dusenbury, remplacés respectivement par Leo Didkovsky et Tia Vincent-Clark. Ce quatrième longue-durée tient en cela de l’inespéré. Pourtant, lors des premières écoutes, ce n’était pas cette sensation extraordinaire que j’ai rencontré, mais une impression étrange, celle d’entendre une musique revenant en arrière après avoir dépassé les frontières, recherchant son pouls – Leo se débrouille comme un chef à la batterie, il n’en reste pas moins que son jeu n’a ni la précision, ni l’intensité punk de celui de Greg Fox – après avoir vécu un peu trop fort.
Oui,
H.A.Q.Q. revient en surface à quelque chose de plus accessible, metal, se rapprochant d’autres œuvres avant-gardistes habitant le genre qu’on affectionne. De quoi se dire, à chaud, que Liturgy perd ici en spécificité, valorisant les mélodies black metal portées par une production cristalline, quelque part entre
Renihilation (ces grognements hystériques) et
Aesthethica (ces riffs épiques qui étalent leurs aventures). Par exemple, des titres comme « Virginity » ou « God of Love » n’auraient pas dépareillé sur l’essai de 2011. C’est donc en pleine « vallée dérangeante » que j’ai en premier lieu erré dans ces nouvelles quarante-cinq minutes, pris entre émotions connues et confort un peu trop important, espoir d’être une nouvelle fois ébahis et surprise de me sentir aussi à l’aise dans des compositions s’écoutant sans y prêter d’attention particulière. L’illusion d’être avec une version de Liturgy « light », toujours comme « Lumière » mais aussi comme « Léger », voire « Facile ».
Et malgré tout,
H.A.Q.Q. donne envie de sortir des gros mots de chroniqueur peu regardant sur les effets d’annonce. Il finit, après une multitude d’écoutes et de tergiversations, par s’imposer comme une nouvelle preuve de la radicalité de Liturgy, que ce soit dans ses compositions ou ses ambiances, ainsi qu’une nouvelle occasion d’admirer la ténacité de Triple H qui, en dépit d’une haine envers lui, continue à rester intègre à l’art qu’il développe depuis les débuts du groupe. Je me retrouve sur mes genoux une nouvelle fois donc, mais pas pour les mêmes raisons qu’auparavant : plutôt que d’emmener ailleurs, on voyage ici dans une totalité naissant des expériences antérieures, comme le résultat d’années à parcourir les diverses étendues ayant constitué la discographie des Ricains. En cela,
H.A.Q.Q. est un album-somme, contenant, reliant entre elles, les expérimentations faites avant lui, cela dans l’unique but de transmettre une nouvelle fois cette extase qui, toujours, habite ses créateurs.
Compréhensible donc qu’il n’y a aucune stupéfaction, aucun temps d’adaptation lors de sa rencontre. Que ce soit durant les « Exaco » et leurs influences provenant des musiques concrètes et minimalistes, les passages glitchés du morceau-titre, ou encore la dronisante conclusion « . . . . », tout est construit pour que l’on rentre ici comme dans un bain chaud, familier parmi les familiers. Sans esbroufe, sans besoin de se mettre en marche vers l’inconnu, Liturgy modèle ici ce qu’il a fait sien de la plus belle façon possible, mettant en première la majesté de ses mélodies avant le reste. Un coup de cœur qui se fait progressivement, mais finissant par rejoindre ceux déjà créés par la bande, où sa personnalité s’affiche sûre d’elle-même et constamment cohérente, l’oreille ne lâchant à aucun moment trois quart d’heure durant. Cependant,
H.A.Q.Q. n’est pas simplement un décalque ingénieux. Il a ses subtilités propres, comme ce jeu à la batterie plus massif et imposant ou encore les nombreux entremêlements des guitares et instruments à cordes entre eux. Il assoit l’extraterrestre qu’est le projet comme maître, au point de voir les différents avis à son sujet changer, se centrant davantage sur sa qualité que sur d’autres débats moins intéressants généralement attachés à sa tête pensante.
Moins audacieux, plus consensuel, mais aussi plus focalisé et moins dispersé,
H.A.Q.Q. a des allures de synthèse éclatante demandant à l’amateur de longue date d’oublier certaines attentes construites avec les précédents albums pour profiter pleinement de sa beauté. Bien sûr, tout n’est pas parfait ici, un morceau comme « Pasaqalia » n’ayant pas exactement la même splendeur que d’autres, tel que « God of Love » (qui est peut-être bien ce que la formation a sorti de plus typique et haut). Il n’empêche que si
H.A.Q.Q. aura finalement le destin d’être le dernier miracle de Liturgy, il pourra endosser ce rôle sans soucis. Car que sortir après ça ?
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