Un an à peine après la sortie de la table de loi
« The Legacy », Testament s'en revient prêcher la bonne parole du thrash metal. Armés d'une inspiration galopante et d'une envie d'en découdre à toute épreuve, nos cinq jeunes américains (moins de 25 ans de moyenne d'âge) semblent bien décidés à enfoncer le clou et à se tirer la bourre avec ceux que l'on qualifiera un peu plus tard de
big four. « The New Order » voit donc le jour en cette année 1988 qui a également enfanté d'autres références en la matière (à commencer par « ...And Justice For All » ou encore « South Of Heaven »). Sans vouloir comparer le deuxième effort des californiens à ces pierres angulaires dont il ne possède peut-être pas l'aura, il n'en reste pas moins que « The New Order » confirme aisément les espoirs suscités par
« The Legacy » et place Testament comme outsider direct au carré magique. Au programme ici un thrash toujours aussi véloce et fougueux bien qu'un peu plus fignolé aux entournures, un bon nombre de classiques (« Trial by fire », « Into the pit », « Disciples of the watch », « The preacher »), une reprise étonnante (« Nobody's fault ») et un Skolnick qui pourrait presque faire pâlir son maître; le tout baigné d'une production encore une fois signée Alex Perialas qui, dans un élan de bonne volonté, a tourné un potard; c'était celui de la caisse claire.
La production, talon d'achille de l'album précédent, est donc bien meilleure (mis à part une caisse claire un poil trop gourmande) et ce n'est pas Greg Christian, dont les parties de basse sont particulièrement à l'honneur sur « Eerie Inhabitants » qui viendra s'en plaindre ! Un démarrage en douceur sur fond d'arpèges classieux qui tranche avec le démarrage pied au plancher de « Over The Wall » et confortera leurs détracteurs dans l'idée que Testament n'est guère qu'un piètre disciple de Metallica, piétinant sans vergogne les plates bandes du maître. Car restons lucide, malgré toute l'affection qu'on porte au groupe d'Eric Peterson, les similitudes parfois grossières avec l'arsenal rythmique des Four Horsemen peut parfois prêter à sourire – une orientation plus mid tempo, des refrains plus facilement mémorisables et profusion d'intro mélodiques typiquement heavy thrash 80's – mais pour ce qui est du manque de personnalité, la seule présence du virtuose Skolnick suffit à doter ce Testament là d'une aura toute particulière. Les américains l'ont bien compris et se reposent bien volontiers sur son seul talent, le peu de temps alloué entre la sortie de leur premier full length et l'enregistrement du toujours piégeux deuxième album les incitant à jouer la carte de l'instrumental – « Hypnosis » et « Musical Death (A Dirge) », de facture correcte sans plus – et de la cover (ici Aerosmith) pour combler le vide entre les indispensables « The Preacher », « Into The Pit » et « Disciples Of The Watch ».
Car s'il est vrai que « The New Order » se veut au final moins percutant que son prédécesseur, il n'en regorge pas moins de classiques absolus du groupe qui sont encore, 22 ans après sa sortie, régulièrement ressortis en live. Parmi ces classiques, j'avoue avoir un léger faible pour la tuerie « Trial by fire », son début tout en finesse, arpèges et solo mélodique, avant de retrouver un riff mid-tempo bien tranchant comme les californiens savent en faire et surtout ces refrains fédérateurs qui ont fait la marque de fabrique du groupe (
« Hey! This is what the people say, a new way, a trial by fire! »). Dans le genre classique absolu « Into the pit » se pose également là: 2'46 de touka touka pied au plancher (excepté ce plan mid-tempo de 1'53 à 2'08), riff de boucher et ce refrain scandé qui enflamme encore aujourd'hui les foules. « Disciples of the watch » tire aussi son épingle du jeu essentiellement par son chorus mémorable:
« Disciples of the watch, obey! Or I'll burn you to that cross! », mais aussi les lignes de basse de Greg Christian bien heureux de se rappeler au bon souvenir de l'auditeur. « The preacher » (titre d'ouverture du monstrueux live à Londres de 2005), ses hurlements de Chuck et son célèbre gimmick clôture cette série de classiques de Testament auxquels je pourrais facilement ajouter le titre éponyme, mid-tempo ravageur qui vaut lui aussi son pesant de cacahuètes, et même « Eerie inhabitants » qui ouvre « The New Order » de fort belle manière. Inutile de préciser que chacun d'entre eux se voit marqué du sceau Skolnick qui démontre sur cet album une maîtrise hallucinante (et que l'on faisait déjà plus que présager dès
« The Legacy ») dans un style que je rapprocherais volontiers de Marty Friedman par certains aspects. Peu de déchets donc sur cet album qui offre à Testament une bonne réserve afin de piocher les titres qui composent leur setlist.
Une setlist qui fait la part belle aux standards mais passe régulièrement sous silence la pourtant très sympathique « A Day Of Reckoning », qui assure l'essentiel avant la conclusion instrumentale de rigueur. Oh bien sûr, ce titre mid tempo bonifié par une gentillette accélération finale n'émarge pas au rang d'indispensable mais rien que pour le refrain impeccable du grand Chuck (qui délaissera plus tard les cris suraigus pour un registre plus caverneux) et ses backing vocals appuyées – Day ! By Day ! – ce morceau vaut un peu plus que l'oubli dans lequel il a sombré ! Pour finir sur une note plus générale, tout juste reprochera-t-on à cet album sa production datée (mais
« First Strike Still Deadly » est là pour y remédier) un certain manque d'intensité et quelques chutes de tension au regard d'un
« The Legacy » bien plus porté sur la vitesse d'exécution, mais au fond, « The New Order » amorçait déjà le virage heavy thrash pris par Testament dès
« Practice What You Preach », troisième full length du combo de la Bay Area qui voit la quasi disparition des passages rapides au profit d'une approche plus mainstream, plus rock qui ne sera pas du goût de tout le monde.
3 COMMENTAIRE(S)
16/09/2016 14:51
25/08/2011 14:16
15/02/2010 15:20
S'il ne devait, cependant, y avoir qu'un titre à retenir je dirais sans hésitation The PreeaaacheeeeeeEEEeer. A la fois l'un des titres les plus directs et subtils du groupe. Quelle merveille que cette intro suivie de ce rythme véloce mené par Peterson et bien aidé par la basse de Christian. Le solo de Skolnick est un fois de plus imparable avant la mise à mort finale sur la géniale rythmique.
Bref vive Testament !