Entre les incessants changements de line-up, les guéguerres concernant la propriété du nom et les diverses incarnations sous d'autres appellations, difficile de faire plus chaotique que la carrière de Diabolic. Sans doute une des raisons, avec leur entrée en jeu, certes fracassante sur l'énormissime démo
City of the Dead mais tardive (1997), pour lesquelles le groupe se trouve rarement cité dans les premiers noms quand l'on évoque la scène death metal floridienne. Pourtant, à l'instar de Brutality, ce n'est pas faute d'avoir sorti des albums remarquables. Mais le combo n'y met vraiment pas du sien. Encore une fois avec ce nouvel opus
Mausoleum of the Unholy Ghost, le premier depuis
Excisions of Exorcisms en ... 2010 ! Les Américains avaient déjà mis un moment entre ce dernier et le précédent
Infinity Through Purification qui n'était en plus pas vraiment un disque de Diabolic. Ils ont réussi à se surpasser ici, d'autant qu'ils avaient eu au moins la bonté de proposer deux EP entre
Infinity Through Purification et
Excisions of Exorcisms. Là, que dalle si ce n'est les versions démos des nouveaux morceaux sur un split obscur avec les Philippins de Comatose sorti l'année dernière sur un label de la même origine. À croire qu'ils le font vraiment exprès !
Il a de plus fallu un moment pour connaître le nom des musiciens participant. Diabolic revient autour du seul membre originel Aantar Lee Coates qui a écrit tous les morceaux, épaulé par le bassiste/chanteur Paul Ouellette qui fait aussi partie du line-up classique. Deux nouveaux membres ont ensuite été introduits pour compléter l'équipe. Les guitaristes Matt Roberts, inconnu, et surtout Matt Barnes de Monstrosity, Chaos Inception, Quinta Essentia et accessoirement ex-Fleshtized, qui a fait quelques modifications aux versions démos. De quoi faire d'autant plus saliver les fans de death metal. On aurait donc pu croire que tout ce beau monde signerait sur un label américain réputé pour la sortie de ce
Mausoleum of the Unholy Ghost. Pas du tout puisque le combo se retrouve à la surprise générale sur Tentacles Industries, tout jeune label créé par l'ancien boss de Several Bleeds Records et Trendkill Recordings. Alors autant cela me fait plaisir de retrouver un tel groupe sur un label français pour lequel il s'agit d'un sacré trophée, autant cela en dit long sur l'intérêt pour les Floridiens des structures plus importantes qui préfèrent sans doute signer un énième clone d'Incantation ou d'Entombed.
Tant pis pour elles ! Le plus important est d'enfin retrouver Diabolic sur de nouveaux morceaux, illustrés non pas par le légendaire Joe Petagno comme à l'accoutumée mais par un talent plus récent, le Polonais Zbigniew Bielak, que l'on a connu toutefois plus inspiré (j'ai un peu de mal avec le Pazuzu) même si son œuvre colle bien à l'aspect satanique beauf de la formation et que l'on y retrouve un côté années 1990 qui a son charme. Le quatuor a par contre poursuivi l'aventure avec le fameux Juan "Punchy" Gonzalez, pour le meilleur et surtout pour le pire. On connaît son goût pour les grosses productions synthétiques qui en mettent plein les oreilles, on ne sera donc pas surpris de la façon dont sonne
Mausoleum of the Unholy Ghost. Pas au niveau des guitares, sur lesquelles il n'y a pas grand chose à redire, plutôt concernant la batterie d'Aantar qui partage la même vision que Punchy. Mixée très en avant (même devant les grattes) de sorte qu'elle occupe tout l'espace sonore et affublée d'un son pas vraiment authentique, il est clair qu'il pourra s'agir d'un des points de discorde de l'opus. C'est franchement abusé sur certaines parties de double à fond les ballons, donnant l'impression d'un robot derrière le kit. D'autant que l'on sait qu'Aantar n'a pas le jeu le plus varié qui soit. Il ne s'est même pas trop emmerdé car si l'on reconnaît sans peine sa façon de faire à base de rafales rapides et brèves de blast-beats furieux et de double pédale avec un peu de tchouka-tchouka thrashy entre deux salves, le bonhomme se limite à faire du stop and go, sans roulement ou descente de toms entre deux séquences de blasts.
Puisque l'on en est à critiquer, je dois dire que ce nouvel opus me laisse aussi une impression de bâclage. Il n'offre en effet que huit courts morceaux vite expédiés pour une durée de vingt-huit minutes. Soit l'album le plus court de la carrière de Diabolic qui, s'il n'a jamais fait preuve d'une grande générosité quant à la longueur de ses œuvres, préférant à juste titre l'efficacité et la radicalité qui siéent à son style bouillonnant, n'avait jamais fait moins qu'une demi-heure. Ajouté à cela des morceaux peu développés plutôt avares en riffs et un titre d'album à l'odeur désagréable de recyclage (Unholy Ghost est le nom du groupe formé en 2003 par trois ex-Diabolic dont Aantar et Paul après leur éviction), vous comprendrez que les gars n'ont pas l'air de s'être trop foulés. Par ailleurs, le chant de Paul Ouellette manque de puissance, son growl plutôt arraché montrant quelques signes de fatigue.
Et là, après quatre paragraphes peu enthousiastes, vous vous dîtes certainement que ce retour de Diabolic relève de l'arnaque. Vous auriez tort ! Malgré les critiques énoncées bien réelles qui ont quelque peu terni mes premières écoutes de
Mausoleum of the Unholy Ghost, celui-ci ne tombe pas dans la catégorie des déceptions. En fait, je l'aime bien ce sixième album. C'est du Diabolic 100% pur jus, c'est à dire une version plus brutale de Morbid Angel avec du Deicide coincé entre les dents. Oui, Aantar sonne comme une batterie programmée mais il sait blaster lui au moins, et le rendu reste bien brutal, à la différence de certains batteurs triggés jusqu'à la moelle mais d'où aucune véritable violence ne ressort. On pardonnera donc rapidement à ce bon vieux Aantar et on finit par s'habituer au son et à l'omniprésence de son instrument. Oui, Paul a perdu du coffre, cela dit il arrive tout de même à faire le boulot et a le mérite d'être intelligible. Le refrain de "Insanity Mastered" est tout con mais diablement entêtant, les paroles et la rythmique vocale de "Passageway to Enchantment" percutantes et ces invectives sur le titre final "Spoken Spite" des plus prenantes et pleines de venin. Oui, le disque ne dure pas longtemps et les morceaux ne vont pas chercher loin. Pas grave, cela confère à l'œuvre une efficacité maximale (ça passe tout seul !), un aspect radical jouissif. Ça joue vite, ça blaste à mort et ça thrashouille un peu, avec quelques mid-tempos placés de-ci de-là. Bref, ça ne tergiverse pas, rien d'étonnant de toute façon de la part d'un groupe peu enclin à disserter. Et ça me va très bien même si la première réaction après dix ans de silence s'est voulue hésitante. Surtout, le riffing, s'il reste dans la grande tradition diabolique du tremolo sombre et evil sans atteindre la majestuosité de l'inégalable
Supreme Evil, s'avère convaincant (rha le ciel qui s'obscurcit subitement sur le riff de "Raped of All Sacred" à 0'46, entre autres !). C'est rapide, c'est bête et méchant, ça sent le death metal classique virulent comme on l'aime. Deux-trois riffs revêtent même de discrets atours blackened qui pourront rappeler
Vengeance Ascending ("Raped of All Sacred" à 1'55, "Useless Saviour" à 2'05). L'autre satisfaction guitaristique, ce sont les leads. Un gros travail a été réalisé sur les solos, toujours plus ou moins chaotiques pour le côté evil mais aussi souvent mélodieux avec notamment du sweep presque cosmique, ce qui peut évoquer Mithras, en moins planant. Toutes ces leads subliment clairement des morceaux qui autrement auraient peut-être été un peu justes. Grâce au riffing, aux leads et à une exécution dans l'urgence,
Mausoleum of the Unholy Ghost arrive à instaurer une atmosphère sombre et vindicative dont l'excellente outro "Spoken Spite", avec ce discret clavier horrifique angoissant, ce faux rythme hypnotique et ce ton haineux de Ouellette, en est l'apogée. Une belle manière de clore l'opus !
Si
Mausoleum of the Unholy Ghost peut paraître décevant lors des premières rencontres en raison de sa durée éphémère, de ce côté un peu vite expédié ainsi que d'une batterie répétitive et envahissante, j'avoue malgré tout resté plutôt satisfait de ce retour que l'on n'espérait plus de la part de Diabolic.
Mausoleum of the Unholy Ghost n'est certainement pas le meilleur album des Floridiens, il s'agit sans doute même du moins bon, mais il convainc tout de même le fan que je suis. Seul "Useless Saviour" s'avère assez anecdotique. J'ai découvert le combo sur le tard à la sortie de l'opus précédent et ce fut un coup de foudre pour la formation qui a vite fini dans mes groupes de death metal préférés. J'ai passé la suite à me plonger dans sa discographie ainsi que sur les albums de Unholy Ghost et Blastmasters, remontant aussi le temps par les anciennes formations d'Aantar, Horror of Horrors, Necrosis, Exmortis, jusqu'à Impiety avec Gene Palubicki. Ne vous attendez pas à quelque chose du niveau de l'excellentissime
Supreme Evil (sans doute le meilleur album Morbid Angel-worship aux côtés de
Here Among Thorns) ni du très bon
Subterraneal Magnitude. Ce serait illusoire. Pourtant, vous auriez tort de bouder ce
Mausoleum of the Unholy Ghost qui offre tout un tas de bons riffs ramenant à la belle époque, de belles leads chaotico-mélodiques et une orgie jubilatoire de blast-beats. Dans le même genre, Ad Vitam Infernal a certes fait bien mieux cette année mais ce nouveau Diabolic reste toujours bien au-dessus du dernier Morbid Angel qui n'est plus que l'ombre de lui-même. Non franchement, je suis bien content de les retrouver à ce niveau loin d'être ridicule. Cela suffit à mon bonheur sans qu'il y ait besoin de fournir un candidat à la meilleure sortie death metal de l'année, ce dont de toute façon je doutais. Welcome back, guys !
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