Gryftigæn - Graven Til Måneåpenbaringer
Chronique
Gryftigæn Graven Til Måneåpenbaringer
Membre du Pure Raw Underground Black Metal Plague aux côtés d’autres formations telles que 13th Temple, Funeral Fullmoon, Pyreficativm ou Wampyric Rites, Gryftigæn est un jeune duo chilien formé en 2020 dans lequel on retrouve un certain Melek Rsh Nvth, musicien stakhanoviste qui occupe déjà une bonne partie de son temps libre dans tout un tas d’autres projets comme 13th Temple, Mantiel, Old Castles, Pyreficativm… Pour l’accompagner ici à la batterie, on trouve également Lord Mbl Dmn III (ex-13th Temple). Ensemble, les deux hommes on sorti en septembre dernier (Bandcamp) puis plus récemment via Inferna Profundus Records (LP) et Mahamvantara Arts (K7) un premier album intitulé Graven Til Måneåpenbaringer.
Si le pédigrée des deux garçons est déjà suffisamment éloquent pour se faire une idée plutôt précise de quoi il retourne ici, l’artwork ne laisse quant à lui planer aucun doute sur le sujet. Gryftigæn s’adonne en effet à la pratique d’un Metal Noir tout ce qu’il y a de plus rudimentaire et mal produit. Un parti pris tranché qui, comme toujours avec ce genre de groupe, ne manquera pas de diviser. D’un côté ceux qui ne peuvent passer outre ce type de production bancale, crachotante et famélique. De l’autre, ceux qui au contraire y trouve une aura encore plus sombre et malfaisante. Un côté cru qui exprime finalement quelque chose de beaucoup plus tangible que bon nombre d’albums parfois sur-produits…
Du coup, si vous en êtes toujours à lire ces lignes c’est donc qu’a priori vous êtes capables de percevoir les qualités de ce genre d’album, et cela en dépit d’un son effectivement approximatif et lointain où chaque instrument semble avoir été enregistré avec les pieds, depuis la pièce d’à côté... Un son qui, encore une fois, participe à l’appréciation que l’on peut avoir d’une telle sortie, notamment grâce à sa capacité à accompagner l’auditeur dans ces univers froids, obscurs et torturés dépeint par les Chiliens.
Mais cette production n’est bien évidemment pas le seul élément clef puisque les cinq compositions de Graven Til Måneåpenbaringer sont avant tout portées par ces riffs froids et décharnés aux mélodies aussi étranges que captivantes (on a souvent le sentiment que la bande sur laquelle ont été enregistrées les parties de guitares s’accélère puis ralentie puis s’accélère à nouveau...), cette rythmique haletante et hypnotique à peine audible ainsi que ce chant abrasif et possédé perdu au loin dans les brumes mais capables d’énoncés plus solennels comme sur "Crossing The Venomous Ritual" à 5:26 ou sur "Nightside Of The Eye Of Seth", titre mid-tempo qui clôture l’album et vient rompre avec la dynamique enlevée des titres précédents. Une formule tout ce qu’il y a de plus classique, qui encore une fois répond à un certain cahier des charges et à un esthétisme typique du Black Metal des années 90 dans ce qu’il a de plus pur et authentique.
Aussi, malgré la simplicité et le caractère peu novateur de cette recette vue et revue, Gryftigæn tire son épingle du jeu grâce, justement, à ce riffing particulièrement hypnotique déroulé sur de longues compositions (entre sept et neuf minutes) derrière lequel se cache des mélodies à vous glacer le sang. Forcément, on pense beaucoup à Burzum tout au long de l’album, à cause de cette approche lo-fi décharnée et fantomatique évoquant les errances et la solitude de ce spectre ornant la pochette du premier album de Varg Vikernes. Néanmoins, pour compenser la nature extrêmement répétitive de ses compostions, le duo ne manque jamais d’apporter ce qu’il faut de nuances à travers des changements de patterns plus ou moins subtils ainsi que des baisses de régimes significatives se traduisant ainsi par des séquences plus atmosphériques (les deux premières minutes de "Crossing The Venomous Ritual", la seconde partie de "Sarcophagical Black Sorcery" entamée dès 4:39, "Circle Of Twofold Attraction" à 4:09, "Nightside Of The Eye Of Seth"). De quoi donner du relief à ce Graven Til Måneåpenbaringer qui entretien par la répétition des allures processionnaires.
Après une première démo sortie en début d’année et sur laquelle on trouvait déjà le titre "Crossing The Venomous Ritual", le duo chilien derrière Gryftigæn signe ici un album franchement réussi dans un genre qui n’en fini plus de faire des petits. Et si parfois, certaines de ces formations frisent effectivement la supercherie, je trouve que Graven Til Måneåpenbaringer évite tous les pièges du genre grâce à un riffing extrêmement bien ficelé et des mélodies effrayantes. Bien sûr cette fichue batterie aurait pu nous être servi un peu plus proprement puisqu’à quelques passages et cymbales près, celle-ci est quasiment inaudible tout au long de l’album (bien que l’on discerne ces cavalcades menées tout au long de ces quarante et une minutes) mais pour autant cela ne gâche jamais l’écoute, bien au contraire. En effet, ce premier album est l’expression d’un voyage torturé et solitaire au fin fond de contrées désolées et inquiétantes capables de rendre fou le plus sain d’esprit. Graven Til Måneåpenbaringer est un album qui ne plaira pas à tous le monde, mais dans le genre Black Metal lo-fi de fonds de caves humides et obscures il est probablement l’une des plus intéressantes sorties de l’année.
| AxGxB 4 Décembre 2020 - 1506 lectures |
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