Vulgarite - Fear Not the Dark nor the Sun’s Return
Chronique
Vulgarite Fear Not the Dark nor the Sun’s Return (EP)
Parfois le hasard des pérégrinations sur les internets et surtout sur Bandcamp peuvent avoir du bon, notamment par le biais des hashtag. C’est ainsi que j’ai pu découvrir Vulgarite durant l’été dernier, comme quoi l’oisiveté n’est pas la mère de tous les vices. Même si au départ, j’ai été quelque peu méfiant en me lançant dans cette découverte. Je m’explique. Les projets individuels sont le plus souvent assez casse-gueules pour bien des raisons, et l’une des premières étant que malgré des facilités technologiques pour tout faire chez soi désormais, et parfois avec pas grand chose, il n’est pas facile d’éviter certains écueils comme des compositions mal travaillées ou une production qui pourrait sonner très cheap. C’est fort heureusement nullement le cas avec ce premier EP de Vulgarite, projet qui est né au début de l’année dernière et qui est porté par Margaret Killjoy, que l’on trouve également au sein de Feminazgûl et dans d’autres projets qui sont en dehors des sphères métalliques. Dans tous les cas la musicienne a l’air de vraiment toucher à tout, mais avec une certaine classe, et sait parfaitement nous emmener dans son petit monde.
Immersif est clairement le premier mot qui vient à l’esprit lorsque l’on écoute Fear Not the Dark nor the Sun’s Return. La production y joue pour beaucoup et l’écoute au casque va apporter grandement à cette impression, car elle va dévoiler tous ces détails et ce gros travail d’ensemble sur les textures. Si la batterie sonne très naturelle, avec d’ailleurs des patterns assez originaux, et que la basse ressort bien de l’ensemble, les autres instruments, c’est à dire les guitares et les claviers, sont plutôt traités comme autant de nappes et de différentes couches, donnant bien une grande emphase à l’ensemble. L’on se fait littéralement happer par l’ensemble et cela nous renvoie tout autant à une approche similaire au cascadian black metal, dans ce son de guitares un peu étouffé, qu’au drone pour cet aspect bourdonnant. C’est comme si l’on était enfoui dans un amas sonore dans lequel l’on parvient à distinguer tels ou tels éléments, mais en tout cas cela donne une réelle originalité à l’ensemble. Car d’un point de vue stylistique, la musique de Vulgarite fait la part belle à un black doom metal, black metal dans ce riffing caractéristique, doom metal dans sa lenteur et dans sa pesanteur. En effet, si les riffs sont le plus souvent en trémolo, avec une guitare gorgée de reverb’ et jouée en double croches, le rythme est assez lent. Il y a ainsi quelque chose d’assez accablant dans le propos de Vulgarite, comme une volonté d’être noyé dans le vide et qu’exprime bien la peinture de William Blake utilisée en pochette.
Est-ce la seule originalité de Vulgarite? Aucunement. La musique de ce projet regorge de détails qui lui donnent un côté assez solennel et même assez pessimiste, comme autant d’écorchures dans l’âme et comme autant de signes de résignation. Cela regorge d’instruments un peu idoine par rapport au genre pratiqué, entre ces sons de cloches, ces orgues et claviers, et dans la démarche de la richesse ça pourrait faire penser à The Ruins of the Beverast, à ceci prêt que le chant de Margaret Killjoy est plus écorché et moins râpeux que celui d’Alexander von Meilenwald, et, surtout, mais cela ne sera guère une surprise pour qui connait son autre projet, la manière dont il est placé et traité rappelle beaucoup Summoning. D’un autre côté ce côté immersif et un peu irréel nous fait parfois penser aux premiers Arcana Coelestia, mais sans la vénération pour Esoteric, tant les deux formations partagent la même coloration mélancolique. Mais encore une fois, l’ensemble est très original, et a un côté antique des plus intéressants, qui, pour le coup, me fait penser à Menace Ruine, notamment dans la manière d’agencer les choses. Sauf qu’ici, il n’y a pas de luminosité, mais une certaine noirceur qui ressort dans l’ensemble. Un rendu qui est renforcé par le côté incantatoire des paroles, notamment sur What Curse Comes This Way, et qui sont comme des entailles dans ce côté assez onirique de l’ensemble. Dans tous les cas, en dépit du name dropping, histoire de bien situer la démarche de la musicienne, il y a ici une véritable personnalité et une volonté de mettre l’auditeur hors de ce monde sur cette grosse vingtaine de minutes.
Rêver l’obscur, c’est réellement le sentiment que l’on a en écoutant ce Fear Not the Dark Nor the Sun’s Return. Comme une forme de magie que l’on avait oublié et qui ne tend qu’à revenir sur le devant de la scène. Mais une magie qui n’est pas là pour enchanter le monde, mais bien pour nous le dévoiler tel qu’il est, sans fard, et nous permettre de sortir de cet aveuglement. C’est ainsi que Vulgarite nous surprend très agréablement avec ce premier effort, avec une réelle personnalité et une réelle originalité, qui va bien au-delà du sound design de belle facture qu’a pu réaliser Margaret Killjoy, et encore ce ne fut pas son seul coup d’essai pour l’an passé. Voilà bien une formation qu’il va falloir sans doute suivre dans les prochaines années car si la suite est de ce niveau, l’aura de quoi être amplement satisfait.
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