Count Raven - The Sixth Storm
Chronique
Count Raven The Sixth Storm
Si tu es un lecteur attentif de ces colonnes, tu auras remarqué qu’on y parle souvent, ces derniers temps, des vieilles gloires du doom. Du Pentagram ou du Orodruin par ci, du Trouble ou du Cathedral par là, bref, de la bel ouvrage, en veux-tu en voilà. En quelque sorte, si tu es novice dans le genre, on fait ton éducation et tu nous en es reconnaissance et joie.
Aujourd’hui, tu vas la parfaire. Count Raven, vieille bique née dans les années 80, a longtemps roulé sa bosse dans les marécages d’un doom trad’ de chez trad’, un parmi les puristes, où chacun de ses plans ont inspiré une cohorte de jeunes loups destinés à composer la relève du style. De Storm Warning, sa première perle, au sublime High on Infinity, le combo suédois n’aura fait que deux grandes pauses, entre 96’ et 2009, puis entre 2010 et 2021. Juste le temps qu’il faut à un doomster pour réfléchir à son prochain album.
The Sixth Storm est ainsi le… sixième méfait longue durée du groupe, qui sonne comme un écho de Storm Warning paru 31 ans plus tôt. Toutefois, pour être honnête avec toi, le premier nommé n’aura sans doute pas le même destin que le second, la faute à une époque qui a changé, des critères et des canons d’appréciation de la musique aussi… et a un petit manque d’inspiration qui fait de The Sixth Storm un album finalement moyen.
Dès l’intro à l’orgue et l’entrée en piste de la guitare ultra chaude et de la voix ultra typée 70’, on sait qu’on sera en terrain connu. Blood Pope et The Curse sont des modèles de doom trad’, des moules à reproduction ; tout y est : rythmique rock n’ roll, basse ronronnante, son chaud et confortable, guitare gorgée de feeling. Comme à la grande époque, le riff est partout chez Count Raven (alors qu’il n’y a qu’une seule gratte active…). Ainsi, Blood Pope est littéralement coupé par un break ultra heavy surpuissant, qui relance le titre avant de l’achever sur des accords ultra lourds, quand The Curse surprend par son pont central mélodique. Oden, ultra lent et épique, place encore le riff au centre du propos, comme le tout aussi puissant The Nephilims, construit comme un titre prog’, mais qui assoit sa performance sur une lourdeur et un groove déments.
C’est vrai, comme depuis 35 ans, Count Raven convoque Black Sabbath à toutes ses sorties. Mais qu’importe. Il y a toujours ci ou là un petit arrangement pour enrichir le propos (les cloches sur Blood Pope), pour diversifier l’univers des suédois (les mélodies sur The Curse, la ballade doucereuse sur Heaven’s Door et son chant habité) ou pour emporter l’auditeur vers d’autres horizons (la rythmique saccadée, presque death sur Blood Pope, en fin de titre ; le piano et les cordes envoûtants sur Goodbye).
C’est vrai encore, certains morceaux sont peut-être surnuméraires. The Ending, et sa jolie basse qui ricote, et The Giver and the Taker n’apportent pas grand-chose à l’univers des suédois. Raboté d’un quart d’heure, l’album n’aurait sans doute rien perdu de sa force, au contraire. Agréables, puissants et lourds, ces deux titres restent néanmoins très calibrés. Baltic Storm, dans la même veine classique, comprend trop de longueurs pour tenir en haleine sur près de 10 minutes. Seule la pièce maîtresse, Oden, parvient à clôturer l’album sur des airs majestueux et mystiques, pachyderme sonore lent, lourd et épique à souhait.
Ce retour montre un groupe en forme, qui n’a rien perdu de sa superbe, ni de sa science légendaire du riff. Néanmoins, si quelques pièces maîtresses se détachent, The Sixth Storm est aussi trop long et peine à maintenir l’attention sur sa fin. Souvent trop classique, parfois trop bavard, The Sixth Storm aurait gagné à être raccourci d’un bon quart d’heure… voire plus. L’amateur de beau doom trad’ ne doit cependant pas bouder son plaisir. Il reste chez ces anciens de quoi assouvir sa soif de riffs gorgés de feeling.
| Raziel 23 Décembre 2021 - 1137 lectures |
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