Michael Romeo - War Of The Worlds // Pt.2
Chronique
Michael Romeo War Of The Worlds // Pt.2
Qui est Michael Romeo ? Un virtuose de la guitare, assurément. Bien trop sous-côté, qui plus est. Il faut dire que l'homme a tendance à faire preuve d'une modestie à toute épreuve. En effet, ce sympathique résident du New Jersey est principalement connu pour avoir fondé Symphony X et avoir nourri ce combo de sa créativité débordante depuis 1994. Cette tête d'affiche du metal progressif très chère à mon cœur a enquillé les albums monstrueux depuis sa formation : entre les fabuleux The Divine Wings Of Tragedy (1997), Twilight In Olympus (1998), The Odyssey (2002) et son extraordinaire « épique » final qu'Astraldeath et moi avions célébré sur votre webzine préféré, ou encore plus récemment le démentiel Iconoclast (2011), célébré comme il se doit par ce bon Thomas Johansson, on ne compte plus les classiques de ce quintet qui n'a rien sorti depuis 2015 et un Underworld en demi-teinte. L'occasion idéale pour ce génie de la six-cordes de satisfaire sa faim de musique et de poursuivre son aventure en solo avec War Of The Worlds // Pt. 1 en 2018. De toutes façons, notre homme grattouillait dans son studio bien avant de fonder le groupe avec lequel il a connu le succès, ce qui avait occasionné la sortie de The Dark Chapter en 1995. Fortement influencé par le style néo-classique d'Yngwie Malmsteen, il a progressivement su imposer sa patte, à coup de riffs atypiques et pugnaces qui comportent sa signature. Que n'ai-je pas vibré aux coups de boutoir assénés par les « Sea Of Lies », « Set The World On Fire (The Lie Of Lies) », « Bastards Of The Machine » ou encore « Heretic », qui font clairement partie de mes écoutes hebdomadaires! C'est donc tout naturellement que j'ai eu envie de me pencher sur ce War Of The Worlds // Pt. 2, sachant pertinemment que j'y trouverai largement chaussure à mon pied.
Mais attends deux secondes, Voay, un album solo d'un guitariste de metal progressif, ça doit forcément être avant tout de la grosse branlette technique, non ? Et bien, pas du tout. Vous ne pouviez pas vous gourer davantage, mes petits amis. C'est précisément là que Michael Romeo fait très fort. Certes, notre homme a tout à fait le bagage technique pour faire des soli interminables, qui chatouillent à qui mieux mieux moult gammes exotiques... notre six-cordiste, armé de son emblématique Caparison Dellinger II blanche, est avant tout un maître ès-shred ; bon nombre de classiques, notamment ceux cités plus haut, ont confirmé cette titulature. Sur War Of The Worlds // Pt. 2, notre bon prince a préféré sélectionner un line-up aux petits oignons, s'installer au chaud dans son studio et charbonner dans l'ombre pour sortir un opus éminemment collectif plutôt qu'un haut-fait individuel. Chapeau bas pour la démarche, déjà tentée avec succès sur War Of The Worlds // Pt. 1 (2018). De nouveau épaulé par John DeServio (Black Label Society) à la basse et John Macaluso (éminent membre de feu-Ark) à la batterie, il s'adjoint pour cette deuxième partie de sa « guerre des mondes » les service du jeune Dino Jelusić, dont la tessiture rocailleuse n'est pas sans rappeler un certain... Russell Allen. On jurerait même entendre le seigneur de Symphony X lorsqu'il va chercher ces graves si caractéristiques sur certains morceaux! Ce n'est pas « Divide & Conquer » qui me fera mentir, tant cette cavalcade ultra efficace qui surfe sur un tempo agressif et enlevé plonge la tête la première les auditeurs dans cette fournaise de metal progressif. Vous l'avez compris, nous sommes en terrain parfaitement connu et défriché ; il n'y a aucun effort à faire, il faut juste savourer cette efficacité clinique que ce compositeur de talent déverse à longueur de morceaux. Car c'est bien Michael Romeo qui brille le plus, d'abord pour la création de ses onze nouvelles tueries qui comportent toutes sa signature, ensuite pour ce délicat apparat de claviers dont il les vêtit habilement.
En effet, notre homme développe sur War Of The Worlds // Pt. 2 un style très cinématique et martial, influencé par Hans Zimmer, Junkie XL ou encore Two Steps From Hell. Il se permet de franchir allègrement un rubicon que son groupe aux tendances symphoniques pourtant déjà bien prononcées n'ose dépasser. Cors majestueux, violons lyriques, tambours battants, toute la panoplie y est. Mais point de kitsch ici, ou si peu : juste du grandiloquent, de l'épique à l'état pur qui saura donner les frissons dès les premières écoutes. En effet, cet opus est parsemé d'interludes raffinées qui laisse au guitariste le loisir de développer des atmosphères totalement maîtrisées : la fin très emphatique de « Divide & Conquer » qui déploie son armada, le ton ultra martial de « Mothership » qui vient mourir sur un sublime solo exécuté avec grande maestria, l'iconique « Hunted » qui a de faux airs de l'excellent « Wonder Woman Theme » composé par Hans Zimmer et Junkie XL pour le film Batman v Superman (2016) de Zack Snyder. Des frissons, je vous dis ! En tout cas, avec moi, ça marche à tous les coups. L'ultime coup de dague nous est planté par « Brave New Worlds » et ses magnifiques choeurs guerriers qui évoqueront évidemment les bonnes œuvres de Nick Phoenix et Thomas J. Bergesen (« Heart Of Courage », « Invincible » ou encore « Moving Moutains » pour ne citer que quelques morceaux choisis qui filent instantanément la chair de poule). Lorsque Michael Romeo y ajoute sa guitare ravageuse lors d'un solo mélodique totalement céleste, il y a de quoi jubiler.
Parce-que le bonhomme ne boude évidemment pas son plaisir à ce niveau. Outre un enchaînement de soli virtuoses, évidemment, Michael Romeo exprime toute la palette de son talent. D'abord dans le groove permanent de ses riffs très metal qui sonnent toujours comme une fin du monde. Sa signature ? Un mélange parfait entre complexité et facilité. Ses allers-retours majestueux sonnent toujours comme une évidence absolue. Il a déjà accroché à son tableau de chasse un nombre astronomique de riffs qui savent séduire immédiatement, et il continue, le bougre! Les neuf minutes apocalyptiques de « Maschinenmensch » sont là pour nous le prouver, qui plus est avec un refrain immédiatement catapulté dans l'inconscient par un Dino Jelusić qui impose sa silhouette vocale avec un aplomb révoltant :
« Heart and soul forged fire
I have bled for you – will you bleed for me ?
Now it's down to the wire
If you only knew – what's become of me ? »
De manière générale, Michael Romeo et ses sbires développent sur War Of The Worlds // Pt. 2 un sens de la mélodie fabuleuse, prenant l'auditeur à la gorge avec cette énergie clinique qui ne redescend jamais. L'excellent « Hybrids » propose encore l'un de ces riffs ciselés que ses magnifiques refrains viennent sublimer, tout comme ce « break » progressif très réussi, mettant en scène un affrontement démentiel entre le piano fulgurant et le solo emblématique du maître à penser. Malgré une ballade un peu anecdotique et maniérée, « Just Before The Dawn », qui vient interrompre un peu cette avalanche de mandales, la guerre permanente que livre Michael Romeo promet d'autres moments épiques, parrainés par le mur de guitares et la production limpide. Le morceau bonus « The Perfect Weapon » qui confronte « palm mutes » dévastateurs et « staccati » ravageurs ou encore le monstrueux « Parasite » et son refrain ultra efficace (« I'm your parasite! ») ne manquent pas de nourrir cet hybris débordant.
War Of The Worlds // Pt. 2 est donc autant un coup de maître qu'une œuvre collective dans laquelle le président sait faire briller ses ministres, son jeune vocaliste en tête. Bourlingué entre ses tentatives martiales et orchestrales très réussies et son riffing épique à en crever, Michael Romeo, tel un empereur romain, offre à la plèbe un spectacle de qualité, un divertissement immédiat qui est aussi un véritable témoignage de l'étendue de son talent. Une nouvelle pierre parfaitement polie venant consolider une demeure déjà foutrement bien garnie, en somme. S'il reste toutefois limité par son format et sa facilité apparente, nul doute que cet album saura conquérir sa place. Jusqu'à devenir inoubliable ? Pas sûr. Mais pour l'heure, la dose réglementaire de virtuosité et de plaisir auditif immédiat qu'il offre lui confère de bien belles proportions.
| Voay 25 Mars 2022 - 1305 lectures |
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