Depuis ses débuts il y’a déjà trente ans la formation d’Oakland a toujours provoqué de vifs débats au sein de la sphère Metal autant par l’attitude de son leader (et dernier membre originel), que par sa discographie inégale aux styles qui évoluent en permanence selon les modes et le sens du vent. C’est sûr que côté intégrité on a connu mieux et cela explique en partie des albums à la qualité variable et plus ou moins décriés comme l’ont été
« The Burning Red » et
« Supercharger » en leur temps, et plus récemment
« Bloodstone & Diamonds » et surtout l’infâme
« Catharsis », totalement raté et dont il n’y avait absolument rien à retenir. Depuis ce dernier opus en date les grandes manœuvres se sont effectuées en interne avec le départ (ou le limogeage selon les sources) des historiques Phil Demmel et Dave McClain, présents respectivement au sein de l’entité depuis quinze et vingt-deux années… autant dire que cette annonce a été un choc et on se demandait bien ce qu’il allait advenir du combo plus que jamais dépendant des lubies de sa tête-pensante. Ayant profité de l’anniversaire de
« Burn My Eyes » pour voir Chris Kontos et Logan Mader venir faire quelques dates à ses côtés celle-ci s’est mise à suivre la nouvelle mode actuelle des singles publiés au format digital (le truc qui ravit les nombreux fans du support physique !). Résultat en 2019 et 2020 il en a sorti un sacré paquet (« Do Or Die », « Circle The Drain », « Stop The Bleeding », « Bulletproof ») avec l’aide de batteurs de session, pour un rendu plus que mitigé et qui donnaient l’impression d’avoir affaire à des chutes de studio de ce désastreux long-format.
Pourtant au milieu de ce marasme (dont on se demandait s’il se terminerait un jour) la publication de « My Hands Are Empty » sonnait comme un avertissement, qui bien qu’étant imparfait voyait le retour à un style plus traditionnel et immédiat qui a fait la gloire du quatuor et prouvait surtout qu’il était encore capable de pondre des choses intéressantes. D’ailleurs la sortie quelques mois plus tard de l’Ep « Arrows In Words From The Sky » confirmait ce ressenti vu qu’on y trouvait un morceau-titre religieux et mélodique (dans la droite ligne de « A Farewell To Arms ») intéressant malgré sa durée excessive, « Rotten » légèrement rétro et classique dans l’exécution, mais surtout le surpuissant « Become The Firestorm » (et futur hymne scénique) qui faisait franchement plaisir tant on n’avait plus entendu les Californiens aussi virulents depuis longtemps, tant ce mélange brutalité et mélodie faisait mouche et donnait des espoirs tangibles pour ce dixième chapitre. Ça n’est sans doute pas pour rien que ses quatre plages ont été inclus dans celui-ci, la bande sentant sans doute qu’il y’avait du potentiel à exploiter et qu’elles allaient bien s’intégrer au reste des nouveautés à venir. Du coup pour l’occasion ils ont été réenregistrés toujours avec le mercenaire Navene Koperweis à la batterie, mais surtout avec l’apport du guitariste Polonais Wacław "Vogg" J. Kiełtyka (DECAPITATED, VADER…) dont la réputation n’est plus à faire, et dont le jeu s’intègre ici très (voire même trop) fidèlement à celui de son prédécesseur. Si cela est appréciable vu qu’on reconnait de suite le son de l’entité (le constat est identique pour le frappeur) on aurait sans doute aimé un soupçon de personnalité, même si cela n’est nullement dommageable et est de l’ordre du détail, vu que pour le reste ce cru 2022 est clairement le meilleur depuis
« Unto The Locust » malgré quelques baisses de régime, des longueurs évitables et certains excès vocaux fatiguants mais habituels.
Cependant au départ on pouvait logiquement avoir des doutes à cause de l’ouverture intitulée « Slaughter The Martyr » qui ne va jamais décoller, du fait d’abord d’une durée totalement excessive et surtout d’une introduction (qui contient de doux arpèges froids et une voix susurrée) qui n’en finit pas, avant d’enchaîner sur des plans classiques et pas mauvais en soi mais trop basiques pour vraiment marquer les esprits. Ceci sera d’ailleurs le même ressenti dès la compo suivante (« Choke On The Ashes Of Your Hate ») qui fait le boulot et offre un rendu relativement basique, même si l’on y retrouve des parties rapides et bien énervées très agréables à l’oreille et complétées par une relative sobriété dans l’écriture fort bienvenue. En effet sans s’éterniser la plupart des nouveautés restent assez cohérentes tout en misant toujours sur ce penchant moderne désormais assumé, à l’instar du sympathique et rampant « Kill Thy Enemies » et de « No Gods, No Masters » dont le point commun est d’avoir des chœurs et voix claires assez marquées mais pas vraiment réussies, une habitude auquel on ne déroge pas malgré les années et le fait que ça ne s’améliore pas. Et encore si tout ça tournait en pilotage automatique avec un apport d’une douceur relative cela tenait quand même la route… tout le contraire de l’insupportable et larmoyant « Unhallowed » qui retombe dans les travers entendus ces dernières années (entre introduction plaintive à la guitare et voix douce mielleuse remplie d’effets), dont le rendu reste d’une platitude affligeante… constat que l’on peut faire aussi sur « Bloodshot » que l’on croirait sorti des fonds de tiroir de la période avec Ahrue Luster. Car tout nous replonge dans cette époque où le Néo faisait sa loi de par le chant au phrasé totalement hip-hop, les chœurs aux accents Hardcore et ces plans en cassures qui sont tous aussi immondes les uns que les autres, et on a juste envie que le frontman ferme sa gueule et passe à autre chose vu qu’il n’a visiblement toujours pas compris qu’il n’est pas à l’aise dans cet exercice et qu’il serait bien inspiré de revenir à l’essentiel et à la simplicité.
S’il a appliqué en partie ce schéma aujourd’hui il n’en reste pas moins qu’il continue à persévérer à jouer sur le modernisme et jeunisme pour plaire au plus grand-nombre, avec au final une réputation d’opportuniste justifiée et qui a fortement nuit à son bébé. Néanmoins malgré ces points négatifs la majorité de ce nouveau cru reste d’un niveau quand même assez convaincant et relève clairement la tête après une chute que l’on croyait interminable, et ce même si ça reste relativement accessible et finalement presque grand-public sur certains plans (sans tomber heureusement dans le mielleux et formaté radio). S’il est certain qu’il sera difficile pour lui de marquer durablement les esprits ça reste quand même une bonne surprise, intéressante et agréable (malgré ses faiblesses et erreurs), qui prouve que le vieux briscard a encore des choses à dire à l’instar de la surprenante et très jolie pochette signée Seth Siro Anton (SEPTIC FLESH) qui donne un cachet supplémentaire. Si ça n’est certes qu’une galette de plus dans sa longue existence ce cru 2022 de MACHINE HEAD relève la tête après une décennie d’errance musicale et de perte de repères artistiques, à voir si cela se confirmera dans le futur ou pas mais pour l’instant on se satisfera facilement de celle-ci qui bien qu’elle soit imparfaite et hétérogène a des atouts pour plaire pas mal de monde, ce qui n’était vraiment pas gagné au départ et de fait d’autant plus appréciable.
2 COMMENTAIRE(S)
10/02/2023 15:18
Une succession de riffs tranchants, une batterie qui assure grave (et pourtant il faut passer après Dave Mc Clain), des soli excellents, le retour de Richardson et ca s'entend et pour finir, Robb Flynn s'est sacrement amélioré en chant clair.
Mention spéciale à Slaughter the Martyr - no Gods no Masters et surtout Become the Firestorm
J'assume mon 9/10 - mon 3ème préféré de MH après Burn my Eyes et Into the Locust
11/10/2022 15:52
Par contre, contrairement à toi je trouve que Slaughter The Martyr est le meilleur son de l'album.