Si la pression permet à certains d’exceller dans des situations jugées stressantes, elle est en revanche pour d’autres un véritable frein à la créativité et bien souvent la cause de tensions pouvant mener à de sérieux désaccords. Après
American Nervoso et
We Are The Romans, les quatre membres de Botch se sont malheureusement retrouvés dans une impasse particulièrement inconfortable... Incapable de composer quoi que ce soit digne de figurer sur ce qui aurait pu être son troisième album et sentant l’humeur s’alourdir au fil des mois, le groupe de Tacoma finira par prendre la décision d’en rester là avant que la situation ne leur échappe et que le ressentiment ne l’emporte sur tout le reste.
Paru le 15 octobre 2002 à titre posthume,
An Anthology Of Dead Ends (on appréciera l’autodérision de ce titre) est donc à ce jour la toute dernière sortie de Botch. Un EP d’environ vingt-deux minutes paru plusieurs mois après la séparation des Américains et constitué de six nouvelles compositions volontairement mal orthographiées ("Spaim", "Japam", "Framce", "Vietmam", "Afghamistam" et "Micaragua"). Sorti chez Hydrea Head Records, celui-ci a une fois de plus été enregistré au Litho Studio de Seattle sous la houlette du producteur Matt Bayles. Pour ce qui est de l’artwork, David Knudson a laissé sa place à monsieur Aaron Turner qui pour l’occasion a utilisé une photographie du Grand Teton National Park (et de sa montagne du même nom) situé dans l’état du Wyoming. Un instantané faisant écho au probable sentiment de paix et de soulagement finalement ressenti par les membres du groupe à l’issu de leur séparation autant qu’aux nouvelles opportunités découlants de cette même décision.
Bien que court et un poil disparate (un titre de quatorze secondes, un autre de près de sept minutes, des sonorités nouvelles et parfois assez éloignées du Botch que l’on connaissait jusque-là),
An Anthology Of Dead Ends n’en reste pas moins l’ultime témoignage d’une formation particulièrement talentueuse qui en dépit des difficultés d’écriture rencontrées a tout de même trouvé le moyen de conclure son histoire en beauté. En effet, si nombreux sont ceux qui à l’époque ont été terriblement déçus de voir le groupe mettre ainsi la clef sous la porte après deux albums exceptionnels et si Botch a vraisemblablement lutté pour accoucher de ce modeste EP (seuls trois titres étaient déjà composés à l’entrée des Américains en studio), la qualité de ce dernier n’est clairement pas à mettre en défaut. Certes, celui-ci est peut-être un petit peu différent des deux albums qu’il précède mais ces quelques titres n’ont rien à envier à ceux d’
American Nervoso et de
We Are The Romans.
Passé l’excellent "Spaim" malheureusement beaucoup trop court et frustrant (la faute à un riff Noise prometteur qui transpire Botch par tous les pores mais que le groupe choisira de ne pas développer davantage), la formation va très vite embrayer (quatorze secondes seulement) sur l’excellent "Japam". Ce dernier ainsi que les tout aussi efficaces et convaincants "Framce" et "Vitemam", laissent à découvrir et à entendre un groupe toujours au sommet de son art, quelque part entre Hardcore, Noise et Metal. Trois titres nerveux tout au long desquels la magie de David Knudson et de son riffing à la fois dissonant, complexe, tordu et pourtant mémorable continue d’opérer à plein tube. Une énergie et une intensité portées également par la basse dominante et ultra-saturée d’un Brian Cook qui tapisse de ces notes épaisses ces compositions syncopées, par le chant toujours aussi arraché et sur le fil de David Verellen et par les frappes sèches et implacables du plus discret Tim Latona. Bref, un élan commun au service de compositions qui à quelques exceptions près s’inscrivent dans la continuité de celles déjà proposées par Botch sur ses deux précédents albums.
C’est avec "Micaragua" et surtout "Afghamistam" que Botch va prendre d’autres chemins relativement nouveaux. Sur ce dernier, c’est Brian Cook qui tient le rôle principal avec cette basse mélodique et envoutante dont il va faire boucler le riff principal pendant près de quatre minutes avec pour seul accompagnement sa voix suave et la batterie de Tim Latona. C’est d’ailleurs à Tim que le bassiste désormais barbu laissera sa place à l’issue de ces premières minutes pour une conclusion au piano et au violon particulièrement chouette. De fait, même s’il n’est pas le dernier morceau de ce EP, "Afghamistam" développe une ambiance certes belle mais surtout mélancolique qui signe en quelque sorte ces tristes adieux avec l’auditeur esseulé...
Sur « Micaragua », le groupe s’essaie à des bidouillages de geeks en studio avec toujours en toile de fond les frappes dynamiques et rythmées de Tim Latona. Une position que Botch va entretenir pendant près de deux minutes avant de laisser parler la poudre sur la base d’un riff ultra-lourd et écrasant avec toujours à l’arrière plan quelques bidouillages et autres sonorités étranges. Forcément rafraichissant même si ce n’est pas lui que l’on retiendra de ce court EP.
Si cette séparation a donc été dure à avaler, Botch a au moins eu le mérite de faire les choses proprement et de s’en aller en laissant à ses auditeurs un dernier témoignage certes plus court et modeste que ses deux précédents albums mais tout aussi convaincant. Naturellement, on lui préfèrera
American Nervoso et
We Are The Romans car tous les deux plus homogènes et consistants mais en l’état que regretter de cette conclusion ? Rien, absolument rien dans la mesure où Botch flirte encore ici avec la perfection. Alors bien entendu, cette mise en terre n’a pas signé pour autant la fin de l’aventure pour David Knudson, Brian Cook et David Verellen qui s’en iront exercer de longues années chez Minus The Bear, These Arms Are Snakes et Narrows (trois formations des plus respectables) mais encore aujourd’hui, s’il ne fallait garder qu’un seul de leurs projets, c’est bien Botch qui l’emporterait. Haut la main.
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